Les guerres se suivent et se ressemblent, soutient le columnist Norman Solomon interviewé dans War Made Easy. Les présidents américains aussi. Avec War Made Easy, un documentaire façon An Unconvenient Truth, les réalisateurs Loretta Alper et Jeremy Earp démontrent que l'histoire, et plus encore, la communication, sont amenées à se répéter.

En se basant sur des images d'archives des points de presse des présidents américains depuis Nixon, des extraits de reportages télé ou encore l'analyse de Norman Solomon, War Made Easy montre comment la guerre est vendue au grand public américain.

C'est de communication (politique et médiatique) dont il est question ici. Conséquence logique, War Made Easy n'aborde pas les motivations géopolitiques ou stratégiques des interventions américaines, mais bien le discours entourant les guerres menées depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Premier constat: la rhétorique politique met toujours l'accent sur la paix. Il faut faire la guerre maintenant pour préparer la paix de demain. Deuxième constat: les aspérités de la guerre elle-même sont, depuis la guerre du Vietnam, lissées. Les soldats ne se battent plus sur des champs de bataille, mais, dit Sean Penn de sa voix suave, balancent des bombes depuis des avions. La frappe chirurgicale, les dommages collatéraux, bref, toute la novlangue euphémisante est passée en revue dans le documentaire.

Très présente dans le film, la couverture médiatique des conflits armés est bien évidemment questionnée. On y déplore l'omniprésence des grands réseaux d'information continue (CNN, Fox, MSNBC) et les journalistes présents sur le terrain qui sont pris en charge par les soldats (ce qui se fait aussi avec les soldats canadiens en Afghanistan). L'information recueillie dans ces conditions est-elle objective et fiable? Le documentaire penche nettement pour une réponse négative.

Comme bien souvent dans le cas d'un documentaire engagé, on insiste, du côté du montage, de la musique, sur ce que l'on veut démontrer. Au risque, comme c'est aussi souvent le cas dans les documentaires engagés, de présenter une information partielle. On pense notamment à la couverture médiatique de l'Irak: difficile de parler «embeddment» sans évoquer l'impossibilité pour les journalistes de travailler «dans la rue».

Apprend-on vraiment quelque chose de nouveau là-dedans? Pas sûr. Les amateurs d'essais politiques ou d'analyses médiatiques auront déjà eu vent des grands thèmes abordés par Norman Solomon. On n'hésite pas à généraliser, rester en superficie et rappeler des évidences, allant pourtant à l'encontre de la naïveté du grand public américain.

War Made Easy est une démonstration convaincante, c'est certain, mais qui n'invente pas la machine à courber les bananes. Le tout est probablement plus destiné au grand public américain qu'aux habitués des documentaires politiques.

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WAR MADE EASY

Documentaire engagé de Loretta Alper et Jeremy Earp.
Avec Sean Penn (narration).