Pouvons-nous faire confiance à Al Gore? La question se pose obscurément, obstinément, même après son très convaincant discours sur le catastrophique dérèglement climatique, discours que le cinéaste Davis Guggenheim relaie fidèlement dans An Inconvenient Truth (Une vérité qui dérange).

Puisqu'il ne s'agit pas, à proprement parler, d'un documentaire, mais plutôt d'une captation, passons outre à la critique artistique pour situer l'ouvrage sur son véritable terrain : la politique.

Al Gore a parfaitement compris que nous sommes au bord de la catastrophe planétaire. Il réalise que l'homme a déjà un pied dans l'abîme... et qu'il s'apprête à y mettre bêtement l'autre pied! Al Gore a tout compris, et il se dit décidé à faire adhérer au Protocole de Kyoto les Américains, qui sont les plus grands pollueurs de la planète encore bleue. C'est d'ailleurs son seul engagement précis.

Mais pour agir, cet homme politique doit être au pouvoir. Le pouvoir ! Al Gore rêve à la présidence depuis toujours. En 1988, il a brigué sans succès la candidature démocrate. Il a dû se contenter d'être le vice-président de Bill Clinton, de 1993 à 2000, jusqu'à l'élection de George Walker Bush.

Il est certain que ses conférences sur les changements climatiques tendent vers son retour en politique, même s'il ne le dit pas expressément. Mais quand la vraie course sera enclenchée, pourra-t-il tenir le même discours, dans un pays où les lobbies pétroliers ont littéralement imposé Bush, ce cheik blanc de l'or noir?

Portrait attachant

Al Gore est-il une sorte de messie ou un habile politicien? Veut-il devenir l'homme le plus puissant du monde pour être le sauveur de la planète? An Inconvenient Truth présente l'argumentation claire et sans faille de Gore, mais il sert aussi à tracer un portrait attachant de l'homme. Un vrai portrait de futur candidat, subtilement glissé dans la trame de sa conférence sur les changements climatiques.

À ce sujet, la démonstration est implacable, sidérante, et pas un seul spectateur n'en sort indemne. La vérité, parfaitement expliquée par Al Gore, va déranger bien du monde et contribuer à conscientiser les masses. Sur ce point, pas de doute. Quant aux vraies intentions du futur ex-candidat à la Maison-Blanche, l'avenir nous le dira...

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An Inconvenient Truth (Une vérité qui dérange) v.o.a. avec s.-t. fr. Réalisateur : Davis Guggenheim. Classement : général. Durée : 1 h 36.

On aime : la démonstration parfaite et l'éloquence redoutable d'Albert Gore.

On n'aime pas : le culte de sa personnalité.