Henry Selick et Neil Gaiman. Le premier est un génie du cinéma d'animation, l'autre, un maître du roman fantastique. Qui s'étonnera que dans Coraline, le film 3D qui s'impose d'emblée comme un chef-d'oeuvre du genre, l'horreur comme le merveilleux gagnent la faveur du spectateur?

À quelques détails près, l'adaptation de Zelick respecte dans ses grandes lignes l'histoire que raconte Gaiman dans son livre paru en 2002. Après avoir emménagé avec ses parents dans une grande et très vieille maison, Coraline, une petite fille de 11 ans, fait la découverte d'une porte dissimulée derrière le papier peint du salon. Apparemment, elle ne donne que sur un stupide mur de briques.

Une nuit, pourtant, le passage révèle son secret. Au lieu des briques, Coraline trouve un étrange tunnel dont l'autre extrémité débouche sur une maison semblable à la sienne, mais en mieux, où vivent ses «autres parents» qui, eux, ont le temps de jouer et de la gâter. La seule différence, ce sont leurs yeux, qu'on a remplacés par de gros boutons de chemise noirs. Brrr! On comprend que quelque chose ne va pas du tout.

Quinze ans après L'étrange Noël de M. Jack, Henry Selick signe sans doute son oeuvre la plus achevée. Entièrement réalisé selon la technique de l'image par image, en utilisant des figurines et des décors fabriqués à la main, Coraline parvient à égaler et, dans bien des cas, à surpasser les standards de l'animation numérique. Le choix du format 3D ajoute à la fois de la consistance, du réalisme et de la féerie au rendu final. C'est comme si, tout à coup, l'univers magique d'un View-Master prenait vie devant vos yeux. Fascinant!

 

C'est bien sûr sa portée philosophique, propre à tout conte digne de ce nom, qui donne au film son sens et sa profondeur. Le scénario joue subtilement avec des concepts aussi complexes que l'identité et la dualité en insistant sur le caractère unique et la valeur inaltérable de chaque être ? «je ne suis l'autre de personne, je suis moi», dit le chat. Dans une séquence inoubliable inspirée directement du Ciel étoilé de Van Gogh, on aborde même la question de la rédemption et de l'immortalité de l'âme.

Quelques segments assez mystérieux, voire ésotériques, s'adressent de toute évidence à un public averti. Décoder le sens véritable d'un numéro de trapèze volant exécuté sur un extrait de Hamlet de Shakespeare («Quel chef-d'oeuvre que l'hom-me!») n'est certes pas à la portée de tous les jeunes... ni même de tous les vieux.

On ne peut par ailleurs manquer de noter combien la structure, l'esthétique générale et la puissance symbolique du film tirent leur origine et leur cohérence de l'univers naïf et inoffensif de la poupée de son.

La musique composée et orchestrée par Bruno Coulais (Les choristes) vient discrètement mais très certainement déposer une touche supplémentaire d'originalité sur l'ensemble.

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Genre : animation

Réalisateur : Henry Selick

Salles : Beauport; version 3D à Sainte-Foy

Classement : général

Durée : 1h40

On aime : le Ciel étoilé de Van Gogh

On n'aime pas : les lunettes 3D, au bout d'une heure environ