«Dans les films de Hollywood, l’Indien était le sauvage méchant qui faisait tout pour empêcher le bon Blanc de faire avancer la civilisation.» Voilà la base du documentaire Reel Injun du réalisateur cri Neil Diamond et de la coréalisatrice Catherine Bainbridge.


Sous la forme d’un road movie dans l’Ouest américain –un choix qui cause une certain éparpillement –, Reel Injun retrace l’évolution de l’image de l’Amérindien projetée partout dans le monde par quelque 400 films sortis de Hollywood. Joli titre, Reel Injun, homophone de «Real Indian» (vrai Indien) jouant avec ce reel qui fait référence au rouleau de cinéma.


Les premières bobines du cinéma muet montraient des Indiens exécutant leurs danses sautillantes pour le plaisir des Yankees en mal d’exotisme, conquérants nostalgiques du temps où leurs courageux ancêtres «chassaient l’Indien», désormais confiné à sa réserve, entre le désert et la famine. Puis vinrent les deux John, qui allaient couler le mythe dans leur moule de l’Histoire: le réalisateur John Ford et son acteur fétiche John Wayne, réunis dans Stagecoach, icône des années 40.

«Stagecoach, dira un critique ojibway, est le western qui a causé aux autochtones, présentés comme des sauvages sanguinaires, le tort le plus grand et le plus durable.»


Face à John Wayne et aux autres «Reel’Marican», l’Indien est ignorant, stupide, lâche, frappe par derrière à la faveur de la nuit. S’il s’est fait ami avec le Blanc, le sauvage se transforme en noble, gagne de suite en statut et en sagesse.


Sauf pour certains films à grand déploiement où les figurants autochtones étaient payés en tabac et en «eau de feu», rappelle le réalisateur Jim Jarmusch, le vrai Indien apparaissait peu à l’écran; «Iron Eyes», le plus connu des Indian actors,était sicilien…

Moins compliqué d’employer des Blancs, surtout pour les rôles principaux: Burt Lancaster, Charles Bronson, le trait plutôt crédible, Burt Reynolds, Anthony Quinn qui a joué le rôle de Crazy Horse, vainqueur mythique de Custer à la bataille de Little Big Horn. Même Elvis Presley a joué un métis!

Dans Flaming Star (1960), voyant passer une princesse kiowa, le King des mauvais acteurs dit à son comparse: «Celle-là, elle peut venir mâcher mes mocassins n’importe quand!»


En voyant les noms des intervenants, finalement, le Québécois se rend compte qu’il a plein de cousins amérindiens: des Lamotte, des Trudell, des Rondeaux et d’autres comme André Dudemaine, historien innu du cinéma et directeur général du festival montréalais Mémoires autochtones. Un Reel Injun de l’école moderne.