Sur papier, Restless (Sans répit en version française) aurait pu n’être qu’une bluette adolescente sertie d’accents mélodramatiques.

Pensez donc. Il y a d’abord un jeune orphelin amoureux d’un fantôme qui, tel un émule d’un certain Harold, flirte avec la mort au point de s’immiscer dans les cérémonies funèbres de purs étrangers. Il y a aussi cette jeune femme malade dont les jours sont comptés, sorte de Juliette contemporaine qui, plutôt que de se laisser dériver dans la déchéance prévue, préfère s’abreuver à sa fascination un peu folle pour un jeune homme pas comme les autres. Il y aura enfin entre eux une sorte d’histoire d’amour à durée très limitée. Au cours de cette courte période pendant laquelle la maladie de la dulcinée s’aggravera grandement, les deux jeunes êtres feront un apprentissage accéléré de la vie, celui de la mort étant déjà fait.

Ce premier scénario de Jason Lew a été remis entre les mains de Gus Van Sant. L’estimé cinéaste américain prouve ici à quel point un artiste de talent peut transcender un matériel de base somme toute convenu pour construire une œuvre éminemment cohérente et personnelle.

Cela dit, Restless n’affiche pas la même ambition que les films plus «populaires» du réalisateur (Good Will Hunting, Milk), pas plus qu’il ne s’inscrit parmi ses œuvres plus pointues sur le plan formel (Gerry, Elephant, Paranoid Park).

Grâce à de belles évocations poétiques, grâce aussi à des moments d’une très belle délicatesse, Van Sant parvient pourtant à faire écho aux thèmes traversant tous ses films, notamment ceux portant sur l’adolescence. Si, comme toujours, la mort est très présente dans la psyché de ses protagonistes, on transige cette fois avec elle de façon différente. Et plus lumineuse. À travers le destin de jeunes personnes dont le tracé est à l’inverse de celui qu’un être humain emprunte habituellement (la mort avant la vie), le cinéaste propose une vision à la fois romanesque et tragique de l’adolescence.

À cet égard, Mia Wasikowska (Alice in Wonderland, Jane Eyre) et le nouveau venu Henry Hopper (le fils de Dennis, une révélation) font magnifiquement écho au parti pris du cinéaste.
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Restless *** 1/2
Drame psychologique réalisé par Gus Van Sant.
Avec Henry Hopper, Mia Wasikowska, Rio Kase. 1h31.