«Signal» ou «défi» lancé à l'industrie, la performance très mitigée du cinéma québécois pendant l'été 2008 ne laisse pas indifférent. «Je serais heureux de vous dire pourquoi Le banquet ne fonctionne pas autant qu'on aurait voulu. Je n'ai pas de réponse à ça», dit Pierre Even, le producteur de Cirrus.

«Peut-être faut-il revoir nos stratégies de sortie. Il y a des méthodes de distribution qu'on peut raffiner pour sortir des films différemment, peut-être aller chercher les jeunes de façon plus efficace», poursuit-il, alors que le film Le banquet a engrangé, pour sa première semaine en salle, des recettes inférieures à 60 000 $ sur 13 écrans.

Vincent Guzzo, le vice-président des cinémas Guzzo, plaide, lui, pour un retour aux méthodes de mise en marché conventionnelles. «J'appelle ça la tendance au niaisage: les distributeurs disent qu'ils dépensent autant en marketing qu'il y a cinq ans, sauf différemment. Je suis content (de ce qui arrive), c'est peut-être un wake-up call pour un retour au marketing traditionnel.»

Nicole Robert, productrice de GO Films, s'interroge elle aussi sur les choix de la mise en marché des films. «Est-ce qu'on sort les films directement sur DVD? Est-ce qu'on sort avec un gros marketing? Est-ce que nos films doivent faire 1 million au box-office? Peut-être pas. Est-ce qu'on doit produire moins de films, mais mieux? C'est une réflexion qui doit s'amorcer.»

Si elle se dit satisfaite des résultats d'Un été sans point ni coup sûr, la productrice de Palomar, Barbara Shrier, souhaite, quant à elle, voir les films rester plus longtemps à l'affiche: «Beaucoup d'argent est dépensé en promotion, et pour faire le plus d'argent le plus vite possible, on ne laisse pas les films à l'écran suffisamment longtemps pour que le bouche-à-oreille fonctionne.»

Les budgets de production des films, tributaires de la SODEC et de Téléfilm, expliquent peut-être en partie les résultats moroses des films québécois cet été. «On coupe sur 10 % du budget de neuf films pour en faire un dixième, déplore Barbara Shrier. Et qu'est-ce que tu coupes? Tu coupes dans le cinéma: la pluie, les tournages de nuit, les plans difficiles. On finit par faire des films corrects, mais il y en a beaucoup qui pourraient être vus à la télévision.»

Tout comme Barbara Shrier, Pierre Even regrette le manque de budget dont souffrent les films québécois. «Il y a tellement de demandes auprès des institutions que l'on s'aperçoit que c'est difficile de faire des films à 6 millions. Or, ce sont ces films-là qui ont marché au box-office!» lance-t-il.

Est-ce à dire que les écrans de cinéma de la province souffrent d'une trop grande présence de films québécois? «Je ne pense pas qu'il y a trop de films, tranche Pierre Even. On s'est battus pour avoir une masse critique de films. Avoir 20 films par année, c'est primordial pour arriver à avoir du succès.»

Enfin, le grand patron de TVA Films, Yves Dion, veut croire en de meilleures saisons à venir pour le cinéma québécois. «Au cinéma, on est attirés par une histoire, un sujet. J'ai l'impression qu'en ce moment, on n'a rien d'assez fort pour avoir de gros succès comme on en a eu, dit-il. Quand on pense au film de Mariloup Wolfe (Les pieds dans le vide, distribué par TVA en 2009, ndlr) ou le film sur le Canadien, on va, en 2009, rattraper des histoires plus fortes.»

Palmarès

Top 5 des films en salle

The Dark Knight * : 8 278 425 $
Indiana Jones... * : 5 637 936 $
Iron Man : 4 759 448 $
Hancock * : 4 029 132 $
Cruising Bar 2 * : 3 444 491 $

Top 5 des films québécois

Cruising Bar 2 * : 3 444 491 $
Un été sans point ni coup sûr * : 795 670 $
Maman est chez le coiffeur : 627 914 $
Le piège américain : 442 185 $
Ce qu'il faut pour vivre * : 59 070 $

Du 2 mai au 4 septembre

* Ces titres sont toujours à l'affiche