Avec des productions comme Chasse-galerie, la légende au cinéma et Les pays d'en haut à la télé, l'histoire du Québec est de nouveau mise en valeur. Selon Jean-Philippe Duval, il ne s'agit pas d'un hasard.

«Si on veut raconter la légende de la chasse-galerie de façon simple, on peut dire que c'est l'histoire de gars qui ont envie de voir des filles. Mais à cette époque-là, c'était plus compliqué!»

Ainsi s'exprime le réalisateur Jean-Philippe Duval (Dédé à travers les brumes) quand il explique son parti pris de réalisme pour traduire sur grand écran la célèbre légende québécoise. Mais à partir de cette histoire de bûcherons qui font un pacte avec le diable afin de pouvoir aller rejoindre leur fiancée au Nouvel An, Chasse-galerie, la légende évoque aussi une époque qu'ont vécue - à la dure - nos aïeuls.

«C'est avant tout pour raconter un pan de notre histoire au XIXe siècle que j'ai voulu faire ce film, explique le cinéaste. Cette époque est peu évoquée dans notre cinéma. Quand on m'a soumis un premier scénario, le récit prenait davantage les allures d'un conte fantastique. Je suis allé chercher Guillaume Vigneault afin de ramener la trame narrative vers la forme de la légende. Qui prend sa source dans une vérité historique.»

Pas un hasard

Lui-même issu d'une famille dont le gagne-pain a toujours été la forêt, Jean-Philippe Duval estime important de faire écho à notre histoire. Il sent en outre un appétit collectif en ce sens actuellement.

«Je crois que la mise en chantier de Chasse-galerie, la légende ainsi que la production des Pays d'en haut à la télé ne relèvent pas du hasard, dit-il. Plusieurs facteurs expliquent cette réappropriation de notre histoire. Notre quête d'identité, nous l'avons déjà vécue. Là, on la revit de nouveau, mais autrement. Nous nous assumons davantage. Nous sommes aussi plus matures en tant que peuple. On a désormais les moyens de nos ambitions, même si, évidemment, on souhaite toujours disposer de budgets plus importants.

«Nous n'aurions pas pu faire Chasse-galerie il y a cinq ans. Les effets spéciaux n'étaient pas aussi raffinés qu'aujourd'hui.»

Le cinéaste apprécie aussi maintenant la possibilité de pouvoir revisiter des oeuvres du passé d'une nouvelle façon. C'est aussi la démarche de Gilles Desjardins, auteur de la nouvelle adaptation des Pays d'en haut.

«Gilles et moi avons eu sensiblement la même approche. Qu'il s'agisse du roman de Claude-Henri Grignon ou de la légende écrite par Honoré Beaugrand, on peut maintenant dégager ces oeuvres du folklore un peu artificiel qui les caractérisait jusqu'à maintenant. Elles n'ont jamais été dépeintes de façon juste et réaliste. Maintenant que nous avons plus de recul avec notre histoire, on peut s'y mettre. Moi, en tout cas, ça m'intéresse. J'ai commencé avec Dédé, qui fait partie de notre histoire récente. Avec Chasse-galerie, dont l'intrigue se situe à la fin du XIXsiècle, je remonte le fil. J'ai même envie de reculer encore plus loin dans le temps. Parce que notre histoire est précieuse. Elle définit ce que nous sommes.»

Toujours du cinéma

Jean-Philippe Duval est aussi le réalisateur de la série télévisée à succès Unité 9. Laquelle frôle des cotes d'écoute de près de 2 millions de téléspectateurs chaque semaine. Toute la discussion autour de notre cinéma national l'intéresse au plus haut point. Parce que, dit-il, il est d'abord et avant tout cinéaste.

«Je milite en faveur d'un bon cinéma populaire. J'ai envie de continuer dans cette veine-là. Il y a sans doute un équilibre à trouver. On favorise le cinéma d'auteur qui se distingue dans les plus grands festivals de cinéma du monde - c'est absolument merveilleux - , mais il faut aussi se permettre des Louis Cyr de temps en temps. Je veux dire, des films à vocation plus populaire dans lesquels on trouve aussi une vraie démarche d'auteur. Cela dit, je suis conscient de mon privilège. Sept millions de dollars pour faire un film, au Québec, c'est quand même beaucoup!»

Grisé à des cotes d'écoute astronomiques à la télé, Jean-Philippe Duval est parfaitement conscient qu'un long métrage obtenant un très grand succès public en salle n'attire guère plus de 400 000 personnes au Québec. Mais ce lien est très précieux, selon lui.

«Unité 9, pour moi, c'est toujours du cinéma. C'est une continuité. Mais la démarche pour un film destiné aux salles de cinéma est quand même différente. Il est vrai qu'on rejoint moins de spectateurs, mais le cinéma reste pour moi le moyen d'expression ultime, l'art le plus complet. Plus tôt cette semaine, j'ai présenté Chasse-galerie dans une salle de 300 personnes à Trois-Rivières. Les réactions des gens m'ont beaucoup touché. C'est direct, c'est là. Je ne peux pas avoir ça à la télé. L'expérience collective de voir un film en salle, c'est imbattable.» 

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Chasse-galerie, la légende prendra l'affiche le 26 février.