Chaque matin, le Québécois Yanick Dusseault quitte aux aurores sa résidence de Mill Valley, une petite ville cossue située au coeur d'une forêt de séquoias au nord de San Francisco, emprunte le pont du Golden Gate et gagne son bureau d'Industrial Light & Magic (ILM), une entreprise de calibre mondial spécialisée dans les effets visuels pour le cinéma.

Pendant deux ans, Yanick Dusseault a assuré la direction artistique d'une production colossale attendue par des milliers d'admirateurs, Star Wars: The Force Awakens (Le réveil de la Force), qui prend l'affiche vendredi.

Ce septième épisode de la saga intergalactique créée en 1977 par le réalisateur américain George Lucas se déroule 32 ans après Return of the Jedi (Le retour du Jedi), troisième film de la trilogie originale.

Une fois par semaine, Yanick Dusseault tenait une réunion de travail avec le réalisateur qui lui passait des commandes précises comme celle d'imaginer un vaisseau spatial pour intégrer une scène du film.

«Mon mandat était de réaliser des designs, de créer des looks et d'offrir des compositions. La conception définitive était par la suite confiée à mon équipe d'illustrateurs composée de six personnes dont chacune est spécialisée dans un domaine particulier comme celui des créatures, des vaisseaux ou des environnements», explique Yanick Dusseault, originaire de Plessisville.

Facture visuelle

Ce n'est pas la première fois qu'il déploie ses talents dans cet univers légendaire. En 2003, il a travaillé comme illustrateur numérique sur l'épisode précédent, Revenge of the Sith (La revanche des Sith), qui était sorti sur grand écran deux ans plus tard.

Pour ce film réalisé par George Lucas, Yanick Dusseault avait créé de nombreux décors hyperréalistes comme celui d'une planète recouverte d'une gigantesque ville aux allures futuristes.

Même si c'est un film de science-fiction, The Force Awakens aura une facture visuelle nettement moins virtuelle que Revenge of the Sith. Selon son directeur artistique, ce nouvel épisode sera plus proche de l'esprit de la première trilogie.

«Il est important que les choses soient palpables à l'écran. Si l'on sait que ce que l'on voit a été créé à 100% par ordinateur, on risque de perdre le contact émotionnel avec l'histoire», considère Yanick Dusseault.

Ainsi, de nombreux vaisseaux «utilisés par les héros du film» ont été construits en partie grandeur nature. C'est le cas du Millenium Falcon, l'engin spatial du contrebandier Han Solo et de son fidèle copilote Chewbacca.

La production a mis un point d'honneur à garder secrets l'intrigue, le rôle des principaux personnages ainsi que le coût de production qui serait évalué à plus de 200 millions. «Je crois que je n'ai même pas le droit de dire que cela va être le fun», glisse Yanick Dusseault avec le sourire.

La force d'ILM

Avant d'inscrire son nom au générique de deux Star Wars, Yanick Dusseault a réalisé les décors grandioses de quelques superproductions d'envergure comme Pirates of the Caribbean, Indiana Jones and the Kingdom of the Crystal ou Avatar.

«Dans Avatar, le défi était de donner l'illusion que des montagnes flottaient. Je me suis inspiré de roches qui existaient réellement. J'ai réalisé la plupart de ces séquences du film de James Cameron», explique le directeur artistique.

Yanick Dusseault a dessiné numériquement ce décor vertigineux à partir de photographies prises dans le parc naturel forestier de Zhangjiajie, en Chine.

«La force d'ILM est d'être capable de créer techniquement des effets visuels très complexes. Dans mon cas, je ne parlerais pas de difficultés techniques, mais plutôt de difficultés visuelles.»

Aujourd'hui âgé de 43 ans, Yanick Dusseault a déposé ses valises à San Francisco il y a 12 ans. Il vivait alors en Nouvelle-Zélande lorsque les patrons d'ILM ont pris contact avec lui pour sonder son intérêt à faire partie de l'aventure Star Wars.

Yanick Dusseault était alors sur le point de poursuivre sa collaboration sur une autre trilogie célèbre, The Lord of the Rings.

«Le travail était très créatif. Nous étions seulement trois personnes au département matte painting de Weta [studio de postproduction]. Sur les deux premiers films de cette trilogie, j'ai eu la chance de travailler avec le réputé illustrateur anglais Alan Lee», se remémore Yanick Dusseault qui occupait le poste de matte painter.

Le matte painting est une technique cinématographique qui consiste à combiner sur une même image une partie filmée et une partie dessinée réalisée avec une palette graphique.

«L'illustration assistée par ordinateur m'a permis de créer des mondes que je pouvais par la suite animer. Mes dessins sont ainsi devenus vivants», de conclure Yanick Dusseault.

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Star Wars: The Force Awakens (Star Wars: Le réveil de la Force) prend l'affiche le 18 décembre.