En s'attaquant à l'adaptation d'un roman de Joyce Maynard, le réalisateur de Juno et d'Up in the Air change de registre. Kate Winslet et Josh Brolin sont les têtes d'affiche de ce mélo assumé dans lequel se rencontrent deux âmes meurtries...

Né à Montréal il y a 36 ans, Jason Reitman est le fils d'un cinéaste et producteur célèbre (Ivan Reitman, réalisateur de Dave et de la série des Ghostbusters notamment) et d'une mère québécoise qui, un temps, a été comédienne. 

Sous le nom de Geneviève Deloir, Geneviève Robert a en outre été la vedette féminine de Red, troisième long métrage de Gilles Carle, un film que Jason n'a d'ailleurs encore jamais vu. «Ma mère ne me l'a jamais montré, a-t-il déjà déclaré à La Presse. Il doit sûrement y avoir une raison. Comme Red a été tourné à la fin des années 60, je soupçonne un peu de nudité, dit-il en riant. À bien y penser, je ne suis pas vraiment certain de vouloir le regarder!»

Jason a vécu à Montréal quelques mois à peine. Lorsqu'il était toujours poupon, la famille s'est installée à Los Angeles. Il a vécu dans la capitale du cinéma pratiquement toute sa vie.

Pas d'obsession pour les chiffres

Son premier long métrage, Thank You for Smoking, connaît un beau succès d'estime, mais son film suivant, Juno, qui lui vaut une nomination personnelle aux Oscars dans la catégorie de la meilleure réalisation, le propulse au premier plan. 

Up in the Air, aussi sélectionné aux Oscars, confirme son statut à Hollywood. Young Adult distille ensuite un humour grinçant et permet à Charlize Theron de proposer l'une des plus belles compositions de sa carrière d'actrice. Manque de pot, ce quatrième long métrage mord la poussière.

«Honnêtement, je ne peux expliquer pourquoi ce film-là n'a pas marché aussi bien que les autres, confie le cinéaste au cours d'une interview réalisée l'an dernier au festival de Toronto. 

«À mon sens, la réalisation était meilleure que celle de Juno. Cela dit, j'essaie de ne pas trop prêter attention au box-office. Mes films ne coûtent pas très cher. Aussi, je sais que des gens dont je respecte beaucoup l'opinion ont bien aimé le film. Moi, cela me convient.»

Jason Reitman est aussi conscient du fait que ses choix de sujets et le caractère plus singulier de ses personnages peuvent parfois déstabiliser le public américain.

«Je ne sais pas si j'apporte quelque chose de différent dans le cinéma américain, mais il est certain que je m'intéresse à des personnages qui laissent habituellement les autres réalisateurs indifférents. 

«Les héros de mes films sont des lobbyistes pour des sociétés de tabac, des adolescentes enceintes, des types dont le métier est de trouver un moyen pour congédier des salariés et des femmes qui tentent de briser des mariages. Mais comme mes films sont rentables, on me laisse faire!»

Approche plus classique

Pour son nouveau film, Labor Day (La fête du travail en version française), à l'affiche vendredi, le cinéaste a emprunté une approche plus classique. Reitman indique que ce choix n'a rien d'un virage. Étant tombé amoureux du roman de Joyce Maynard dès sa lecture, il a tout simplement tenté de trouver la meilleure façon de mettre cette histoire en images.

«Ma productrice m'a suggéré de lire ce roman, explique-t-il. À la fin de la lecture, j'étais ému au point où j'en ai pleuré. Il y a d'abord le lien entre une mère et son fils de 13 ans, puis cette histoire d'amour qui naît entre une femme vulnérable et un ancien détenu au passé trouble, lourd de dégâts intérieurs. J'aimais la façon avec laquelle l'auteure explorait la complexité d'un désir qui peut naître entre deux êtres humains. Cela n'a pas toujours de sens.»

Force intérieure

Les deux personnages adultes sont interprétés par Kate Winslet et Josh Brolin. À l'étape de l'écriture de l'adaptation, que Jason Reitman signe seul, les deux acteurs se sont imposés très vite dans l'esprit du scénariste et réalisateur.

«On ne peut rêver mieux, fait-il remarquer. Kate peut afficher la fragilité du personnage - et les épreuves qu'il a dû traverser -, mais en même temps, elle peut aussi faire écho à sa force intérieure. Même chose pour Josh. Il affiche une espèce de virilité qu'on dirait tout droit sortie d'un vieux film hollywoodien, mais il ne craint pas non plus d'aller explorer des zones plus délicates ni d'évoquer sa vulnérabilité. 

«Travailler avec des acteurs de cette trempe me rend meilleur. Ils peuvent suggérer des choses formidables, auxquelles je n'avais pas pensé, qui me font mieux paraître en tant que cinéaste, au bout du compte!»

Labor Day constitue une sorte d'aparté dans la démarche de Jason Reitman. Il compte en effet renouer avec son style habituel dès le prochain film, actuellement en tournage. Mettant en vedette Judy Greer, Emma Thompson et Adam Sandler, Men, Women&Children est une adaptation d'un roman de Chad Kultgen.

«Il s'agit d'un récit qui aborde la question du sexe à l'époque du web, explique-t-il. Et l'impact qu'a maintenant l'internet sur nos vies sexuelles.»

Ça promet.

Labor Day (La fête du travail en version française) prend l'affiche le 31 janvier.