Ayant lui-même mis en oeuvre le projet, Leonardo DiCaprio tenait à ce que Martin Scorsese signe la réalisation de The Wolf of Wall Street. Il lui aura fallu des années, mais l'attente en aura valu la peine.

Au moment où, il y a six ans, il a lu le récit autobiographique d'un dénommé Jordan Belfort, Leonardo DiCaprio ne connaissait rien du monde de la haute finance. Mais l'acteur a tout de suite vu dans le parcours de ce personnage une occasion unique de traduire sur grand écran l'aspect le plus déplorable d'une Amérique obsédée par le fric. Et les drames que cette avidité malsaine entraîne.

«Même si le récit se déroule en 1987, on peut tracer des parallèles évidents avec l'époque dans laquelle on vit, a fait remarquer DiCaprio au cours d'une conférence de presse tenue à New York dimanche. Belfort n'est pas véritablement le problème puisqu'il fait lui-même partie d'un système qui prête le flanc à ce genre de dérive. Mais son parcours est symptomatique du plus mauvais côté de la société américaine. Et de tout ce qui va mal. Je voyais un peu cette histoire comme une version moderne de Caligula. Tu dois mettre de côté ton individualité pour camper ce genre de personnage.»

Le dieu de la finance

Inspiré de cette biographie, le scénario de The Wolf of Wall Street, écrit par Terence Winter (The Sopranos, Boardwalk Empire), décrit l'ascension - et la chute - d'un courtier qui, au cours des années 80, a amassé une fortune indécente en entraînant de pauvres investisseurs dans des marchés frauduleux. Enivré par son succès, le jeune homme tombe dans tous les excès possibles et imaginables. D'autant que l'époque s'y prête: sexe compulsif, drogues en tous genres, fric à flamber, et cette indélogeable impression d'être le roi du monde. Devant qui tout le monde doit se prosterner. La communion sans morale au saint autel du dieu de la finance. Jusqu'au jour où les autorités s'en mêlent. Le conte de fées aura duré trois ans.

«J'ai rencontré Jordan Belfort à plusieurs reprises au cours des dernières années, raconte Leonardo DiCaprio. Je voulais qu'il me raconte lui-même comment il avait vécu cet épisode de sa vie. Cela a grandement nourri mon jeu, car il est difficile d'imaginer pareils excès. Les conversations avec lui étaient vraiment fascinantes, car Jordan se livre sans retenue. Il ne craignait pas du tout les aspects plus gênants de son histoire. Dans son esprit, cette partie de sa vie constitue un épisode isolé. Pour lequel il paie encore le prix. Comme personne-ressource, je ne pouvais souhaiter mieux. J'ai un peu servi de lien entre Marty et lui. Marty ne voulait pas trop se coller au vrai personnage.»

«Marty», c'est bien sûr Martin Scorsese. The Wolf of Wall Street est leur cinquième film ensemble. Les deux hommes entretiennent une relation très féconde, mais l'acteur aura quand même dû se montrer convaincant à l'endroit de son mentor. Et faire preuve de patience. Après The Departed, qui lui a valu - enfin - l'Oscar de la meilleure réalisation, Scorsese n'avait pas envie de replonger tout de suite dans un milieu criminel, fût-il même habillé de ses plus beaux atours. Le cinéaste s'est plutôt lancé dans le thriller Shutter Island, dont la tête d'affiche était aussi Leonardo DiCaprio, et il s'est ensuite attelé à la réalisation d'un film de style très différent. Hugo constitue une parenthèse d'autant plus précieuse aux yeux du cinéaste qu'il s'agissait là d'un projet dans lequel il s'est aventuré pour des raisons personnelles.

«J'estimais que The Wolf of Wall Street était un projet parfait pour Marty, explique DiCaprio. Je savais qu'il en ferait quelque chose de grand. Et puis, nous aimons travailler ensemble, car nous partageons une même sensibilité artistique. Ce film-là, il fallait aller jusqu'au bout, sans rien édulcorer. Chaque jour de travail avec lui devient un privilège. Sur son plateau, on a vraiment le sentiment de faire du cinéma. D'être dans ce que le cinéma doit être. Vraiment.»

Un univers artistique

Affirmant avoir toujours été attiré par des oeuvres qui explorent les parties les plus sombres de l'âme humaine, l'acteur dit être honoré de faire partie de l'univers artistique de Scorsese.

«Marty fait des films qui exposent des facettes de ce que nous sommes, même dans ce qu'elles ont de plus inavouable, dit-il. Des films comme ceux-là sont très pertinents à mon sens.»

De son côté, Scorsese ne tarit pas d'éloges non plus envers son nouvel acteur fétiche.

«Il y a plus de 30 ans de différence entre Leo et moi. Il est assez remarquable qu'à cette étape de ma vie et de ma carrière, je puisse encore entretenir une relation professionnelle de cette nature avec un acteur. Travailler avec Leo me régénère!»

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The Wolf of Wall Street (Le loup de Wall Street en version française) prend l'affiche le 25 décembre.

Les frais de voyage ont été payés par Paramount Pictures.

PHOTO FOURNIE PAR PARAMOUNT

Leonardo DiCaprio en compagnie de Margot Robbie.