Pour son premier long métrage, intitulé Diego Star, Frédérick Pelletier fait dans l'originalité. Son histoire est campée sur un chantier maritime alors que ses interprètes, Chloé Bourgeois et Issaka Sawadogo, n'ont pas été vus souvent au grand écran.

Le cinéaste Frédérick Pelletier a une ancre tatouée sur le bras gauche. La comédienne Chloé Bourgeois porte des boutons d'oreilles frappés du dessin d'une ancre.

Pas de doute, ces deux-là ont fréquenté le même bateau, qui est en fait un long métrage intitulé Diego Star, film portant sur deux êtres que tout sépare sauf le fait d'être à fond de cale. Lancé il y a près d'un an au Festival de Rotterdam, le film a navigué d'un festival à l'autre et nous arrive alourdi de quelques prix et récompenses.

«Tu ne portes pas un film cinq ans sur tes épaules sans qu'à un moment donné, il te passe dans la peau», souligne Frédérick Pelletier en entrevue.

Produit chez Metafilms, Diego Star raconte la troublante histoire de Traoré (Issaka Sawadogo), un mécanicien injustement accusé des avaries causées à son navire, forcé de s'arrêter au chantier naval Davie, à Lévis. Traoré est alors hébergé chez Fanny (Chloé Bourgeois), une jeune mère seule qui tire le diable par la queue. Entre les deux s'installera une fragile solidarité.

Le film aborde autant la question des migrants de passage que de la diversité culturelle et la déresponsabilisation. Car Traoré, pour avoir voulu dire la vérité, se retrouvera bientôt très seul face à des individus qui préfèrent fermer les yeux pour sauver leur peau.

Le scénario est la résultante d'un amalgame de souvenirs d'enfance et de recherches du réalisateur, originaire de Lévis. «Mon grand-père était marin. Il partait six mois par année, parfois plus. Et il a terminé sa carrière au chantier, dit M. Pelletier. J'ai longtemps cru qu'être marin était quelque chose de romantique. Mais en parlant avec mon grand-père, j'ai compris qu'on ne le devenait pas nécessairement par choix.»

Le film s'appuie sur le présent, ajoute le cinéaste. Des cas de marins abandonnés par leur employeur dans des ports étrangers, ça existe. Au Canada aussi. «En faisant mes recherches, j'ai vu le film Navires de la honte [de Malcolm Guy et Michelle Smith] qui traite de cette question. Dans les années 80, avec la "dénationalisation" des navires, on a instauré un régime de non-droit qui fait qu'il n'y a à peu près aucune règle en haute mer. Et en embauchant plusieurs groupes ethniques sur un seul navire, on divise pour régner.»

Chloé Bourgeois

Pour interpréter Fanny, M. Pelletier a fait appel à Chloé Bourgeois, jeune comédienne très remarquée à la sortie du film Tout est parfait d'Yves Christian Fournier.

«Ce qui m'a charmé chez elle autant que chez Issaka [acteur né au Burkina Faso et travaillant en Norvège], c'est que ce sont des comédiens naturels, autodidactes, dit-il. Ils sont très instinctifs. Chloé possède aussi une photogénie très particulière. Elle a de l'aplomb et beaucoup de naturel.»

La comédienne a de son côté aimé le scénario en raison de son originalité et des thèmes abordés. Elle a pour son personnage une affection teintée de désarroi. «Pauvre Fanny, lance-t-elle. On a autant envie de l'aimer que de la détester Elle gère mal ses émotions et est complètement mêlée. Elle et moi ne sommes pas du tout pareilles. Elle était difficile à interpréter, car elle ne sourit jamais alors que moi, au contraire, je suis une fille souriante.»

Récemment, la jeune femme a aussi joué dans un court métrage (Baby Blues), une websérie (Les jaunes), en plus de défendre de petits rôles dans La galère et Toute la vérité. Son prochain rôle? «Je l'attends. Tout est ouvert», lance la comédienne... avec un grand sourire.

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Diego Star prend l'affiche le 6 décembre.