Parce qu'elle aime varier les plaisirs, Helen Mirren reprend du service en jouant du pistolet et de l'humour pince-sans-rire dans le deuxième volet des aventures de cette bande d'anciens agents de services secrets. Son personnage Victoria l'amuse. Beaucoup.

Pendant 17 semaines, Helen Mirren a de nouveau personnifié la reine Élisabeth II. Tous les soirs, sur la scène du théâtre Gielguld de Londres, elle a reçu en audience les 12 premiers ministres britanniques qui, de Winston Churchill à David Cameron, se sont succédé pendant le règne de la souveraine. Comme si cela était possible, la performance est encore plus éblouissante que celle qui a valu à l'actrice un Oscar pour The Queen en 2007. Dans The Audience, une pièce signée Peter Morgan (aussi scénariste du film de Stephen Frears), Helen Mirren personnifie la reine à tous les âges, de la jeune femme qu'elle était à l'époque de son couronnement jusqu'à la vieille dame que l'on connaît aujourd'hui.

«J'aimerais bien jouer The Audience à Broadway, confie l'actrice lors d'un entretien accordé à La Presse au cours d'une rencontre de presse tenue à New York en marge de la sortie prochaine de Red 2. Mais il n'y a pas encore de confirmation. J'aime l'idée que la pièce ait pu être vue en diffusion simultanée dans plusieurs cinémas aux quatre coins du monde.»

À l'initiative du National Theater Live, The Audience fut en effet projeté récemment sur plusieurs écrans de cinéma, notamment à Montréal. Ce fut probablement l'un des secrets les mieux gardés en ville...

À 67 ans, l'actrice estime vivre actuellement la plus belle période de sa carrière professionnelle.

«Honnêtement, je ne sais comment l'expliquer, dit-elle. Il y a certainement une part de chance dans tout cela. Je me dis aussi que cela doit tenir aux choix de rôles que j'ai faits, à la part de risque aussi parfois - comme celui que j'ai pris en acceptant de jouer dans un film comme Red. J'ai toujours eu un penchant pour les personnages un peu extravagants, même parfois extrêmes. Des personnages qui sortent de l'ordinaire en tout cas. Il faut secouer l'arbre un peu. J'aime aussi varier les plaisirs et les styles.»

Pas gagné d'avance

Dans Red 2, comédie d'action réalisée cette fois par Dean Parisot (Galaxy Quest), Helen Mirren retrouve le rôle de Victoria. À la demande de Frank Moses (Bruce Willis), l'ancienne agente de la MI6 reprend ainsi du service en compagnie de ses vieux acolytes pour sauver le monde d'une tragédie certaine.

«Quand on me parle de Victoria, le mot qui revient le plus souvent pour la décrire est «badass», explique l'actrice. C'est une dure à cuire qui, sous des dehors élégants, n'a vraiment pas froid aux yeux. Cela change d'Élisabeth en tout cas. Cela dit, j'ai beaucoup apprécié le clin d'oeil des scénaristes. Ils n'ont pu s'empêcher d'écrire une scène où je personnifie une reine! Ce n'était pourtant pas gagné au départ. La première fois où le rôle m'a été offert, j'avoue que mon agent et moi étions un peu sceptiques. J'avais déjà joué dans des productions hollywoodiennes dans lesquelles il y a des scènes d'action, National Treasure notamment, mais là, nous n'étions vraiment pas certains de notre coup. Mais bon, il ne faut pas prendre ce métier trop au sérieux non plus. Ce projet avait l'air tellement amusant que j'aurais eu bien tort de bouder mon plaisir. Aujourd'hui, je suis tellement heureuse d'avoir accepté ce rôle!»

Une actrice populaire

Les origines familiales d'Helen Mirren sont dignes d'un grand roman de Tolstoï. Née à Londres d'une mère anglaise et d'un père russe (le grand-père tsariste était en mission en Angleterre au moment de la révolution), Ilyena Lydia Vasilievna Mironoff (son nom à la naissance) est devenue au fil des ans l'une des figures emblématiques du théâtre et du cinéma britanniques. Son entrée dans le cinéma hollywoodien, au début des années 80, s'est pourtant faite grâce à des personnages russes (2010, White Nights).

«Quand j'ai commencé à jouer au théâtre, j'étais évidemment très idéaliste, rappelle-t-elle. Mes idées sur la nature du travail d'un acteur étaient très précises. Cela se dissipe avec les années. La prise de tête fait place au plaisir. On y voit une façon de gagner des sous aussi. Mais la motivation reste toujours la même: raconter des histoires, en retirer quelque chose, frapper l'imagination des gens.

«Puis, poursuit-elle, j'ai souhaité aussi devenir une actrice reconnue. J'ai travaillé un an avec Peter Brook et ce fut très formateur. J'ai appris beaucoup. Je me suis notamment rendu compte que je ne voulais pas être une actrice spécialisée dans le théâtre expérimental. Je préférais être au centre des choses. Cela passe obligatoirement par des projets plus accessibles. Autrement, les gens ne peuvent se souvenir de ton nom. Le processus est long!»

L'actrice estime que sa présence dans la série télévisée Prime Suspect au début des années 90 a été un grand tournant.

«J'étais déjà connue jusque-là, mais la détective Jane Tennison a vraiment marqué l'esprit des gens. J'étais déjà dans la quarantaine avancée. Ce qui est bien. Le théâtre occupe toujours une place importante dans ma vie toutefois. J'essaie d'y retourner tous les trois ou quatre ans. Cela découle probablement d'un sentiment de culpabilité. En Grande-Bretagne, il existe encore cette idée selon laquelle un acteur n'en est pas vraiment un s'il ne monte pas sur les planches. Le vrai travail, c'est au théâtre. Cela dit, on travaille aussi fort au cinéma!»

Cinq essentiels d'Helen Mirren

2010, Peter Hyams (1984)

Cette suite de 2001 l'odyssée de l'espace, le chef-d'oeuvre de Stanley Kubrick, ne se distingue d'aucune façon, sinon par le fait de marquer l'entrée d'Helen Mirren dans le cinéma hollywoodien. Elle y interprétait le rôle d'une Russe cosmonaute.

WHITE NIGHTS, Taylor Hackford (1985)

L'un des derniers thrillers de la guerre froide est passé à l'histoire grâce à ses scènes dansées exceptionnelles, une gracieuseté de Mikhail Baryshnikov et Gregory Hines. C'est aussi sur ce plateau qu'Helen Mirren (directrice du ballet Kirov dans le film) et Taylor Hackford se sont rencontrés. Ils forment un couple depuis bientôt 30 ans.

THE COOK, THE THIEF, HIS WIFE&HER LOVER, Peter Greenaway (1989)

La femme du titre, c'est elle. Mariée au grossier personnage du voleur, elle est au centre d'un film qui, au moment de sa sortie, fut entouré d'un parfum de scandale à cause de certaines scènes crues.

GOSFORD PARK, Robert Altman (2001)

Après avoir été nommée une première fois aux Oscars six ans plus tôt (The Madness of King George), l'actrice obtient sa deuxième nomination dans la catégorie de la meilleure actrice de soutien grâce à cet excellent film choral de Robert Altman.

THE QUEEN, Stephen Frears (2006)

Helen Mirren fait merveille en prêtant ses traits à Élisabeth II. Le scénario (Peter Morgan) et la réalisation (Stephen Frears) sont à la hauteur de la souveraine composition de l'actrice. L'Oscar lui revenait de plein droit.

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Red 2 (R.E.D. 2 en version française) prend l'affiche le 19 juillet. Les frais de voyage ont été payés par Films Séville (Summit Entertainment).