Après avoir été coupée en morceaux dans The Lovely Bones, Saoirse Ronan vit à deux dans un même corps dans The Host, adaptation par Andrew Niccol du roman de Stephenie Meyer. Discussion avec les piliers d'une oeuvre où The Invasion of the Body Snatchers rencontre Twilight.

À même pas vingt ans, Saoirse Ronan est une habituée des adaptations cinématographiques de romans. Elle a été découverte dans Atonement, on l'a vue dans The Lovely Bones et elle tient à présent le rôle principal dans The Host, à l'origine un livre de Stephenie Meyer paru à 2008.

L'actrice, qui avait lu Twilight au moment de sa publication mais n'avait suivi que de loin les aventures de Bella, ne savait rien de The Host quand elle a reçu le scénario d'Andrew Niccol. «J'ai aimé que l'histoire ne soit pas une histoire d'amour, mais DES histoires d'amour. Avec notre planète, notre famille, notre «clan». Une histoire d'amour maternel entre une fille et son petit frère, une histoire d'attraction physique entre un homme et une femme, une histoire d'amitié entre deux êtres qui se détestent dans un premier temps, et une histoire d'amour entre deux âmes», indiquait-elle lors de l'entrevue téléphonique qu'elle a accordée à La Presse.

The Host, donc, paru en français chez JC Lattès sous le titre Les âmes vagabondes, est un drame de science-fiction mâtiné de romance.

Dans un futur proche, la Terre connaît la paix sous les fronts politiques, environnementaux, sociaux. Le prix de cette transformation: l'humanité telle que nous la connaissons n'existe plus. Des extraterrestres appelés Âmes habitent le corps des humains dont la conscience disparaît alors. Bien sûr, certains résistent. C'est le cas de Melanie Stryder (Saoirse Ronan) et de Jared, son amoureux (Max Irons).

Elle résiste tellement, Melanie, que même une fois son corps occupé par une Âme appelée Vagabonde (bientôt surnommée Gaby), elle reste consciente. Se débat. Et, bien que poursuivie par une Traqueuse tenace (Diane Kruger), elle pousse Gaby à joindre la résistance. Là, elle retrouvera Jared, qui déteste ce qu'elle est devenue, mais aime celle qu'elle est toujours, et Ian (Jake Abel), qui tombe amoureux de Gaby, l'Âme habitant le corps de Melanie.

«Après le triangle de Twilight, Stephenie est passée au ménage à quatre», dit à la blague Andrew Niccol, qui a été attiré par cette histoire de science-fiction «où il n'y a pas de véritables méchants: les intentions des Âmes sont pures. Et puis, il y a cette idée de deux consciences dans un même corps, ça m'a fasciné».

Mais pour rendre cette dualité à l'écran, il lui fallait une actrice d'exception. Il avait vu le talent de Saoirse Ronan dans Atonement. Il avait aussi noté ses qualités d'actrice physique dans Hanna. Pour lui, elle devait être Melanie/Gaby. Il l'a approchée. Elle a accepté l'offre.

Après le scénario, la comédienne a plongé dans le roman: «Dans ce cas-ci, c'était particulièrement important parce que le livre révèle beaucoup de choses sur le passé et la psychologie des personnages, qui ne pouvaient être incluses dans le film.» Andrew Niccol a en effet fait des choix, des coupures. Une adaptation, une vraie.

Une fois les personnages en tête, Saoirse Ronan a travaillé en solo avec le réalisateur afin d'enregistrer les répliques de Melanie, qui n'est plus qu'une conscience dans le corps à présent mené par Gaby. «Sur le plateau, Saoirse portait un écouteur grâce auquel elle entendait le discours de Melanie. Elle pouvait ainsi se répondre, réagir à elle-même», explique Andrew Niccol.

La comédienne a apprécié l'expérience, qu'elle a poussée jusque dans ses intonations et sa gestuelle, prenant un accent plus «américain moyen» pour Melanie; laissant pointer ses origines irlandaises pour Gaby. «Et puis, continue-t-elle, quand je suis Gaby, je suis en paix, heureuse de mon sort. Je me déplace donc calmement. Mais dans les flash-back, quand je ne suis que Melanie, je suis continuellement aux aguets, rapide, silencieuse.»

Elle aime ce personnage auquel on ne pourra pas reprocher une mollesse à la Bella: «Melanie est une survivante, elle est dure quand il le faut, mais aussi très tendre avec ceux qu'elle aime», fait celle qui «occupe la moitié du carré amoureux» du récit: «Ce n'était pas simple d'être Melanie dans les bras de Jared, puis Gaby dans ceux de Ian. Les deux premiers vivent un amour physique. Pour Gaby et Ian, c'est l'amour pur entre deux âmes: ils aiment ce que représente l'autre.»

Un défi de jeu, là. Qui n'était même pas le plus grand pour Saoirse Ronan. Le pire étant les verres de contact qu'elle devait porter afin de donner à son regard la lumière qui brille dans les yeux des humains habités par une Âme. «Au début, je n'y voyais rien et j'ai paniqué: comment pouvais-je jouer en étant aveugle? Puis, mes yeux se sont adaptés.»

«Les acteurs qui portaient ces verres m'ont détesté», assure Andrew Niccol. À prendre avec un grain de sel: Saoirse Ronan en tête, ils sont tous prêts pour une suite, si suite il y a.

The Host (Les âmes vagabondes) prend l'affiche le 29 mars.

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Stephenie Meyer, l'après-Twilight

Ce qui a surpris Andrew Niccol au sujet de Stephenie Meyer, «c'est à quel point elle est normale alors qu'un tel succès n'est pas normal. Finalement, peut-être qu'elle est une extraterrestre», dit en riant le réalisateur au bout du fil. Chose certaine, il a apprécié sa collaboration et son ouverture lors de l'écriture du scénario de The Host et du tournage. «En tant que productrice, elle a beaucoup appris de Twilight

La principale intéressée abonde, elle qui s'est beaucoup investie dans la production de The Host, le roman qu'elle préfère parmi tous ceux qu'elle a écrits. Résultat: «À mes yeux, c'est l'adaptation qui colle le plus au livre.» Entre autres parce qu'Andrew Niccol et elle n'ont pas été entravés par des hordes de fans, le bouquin étant moins connu que la célèbre saga. «Un exemple, dans Twilight, Kristen Stewart devait porter des verres de contact pour avoir les yeux bruns, comme dans le livre. Mais ça n'aurait rien changé qu'elle ait les yeux verts! Ici, nous n'étions pas esclaves de ces détails.» Ni d'éléments plus vastes. Le roman a donc pu être «craqué» pour en sortir un film.

Parlant roman, Stephenie Meyer assure qu'une fois la promotion de The Host terminée, elle se remettra à l'écriture de ce qui est censé devenir une trilogie. The Soul puis The Seeker devraient suivre The Host. Quand? «Je ne sais pas. J'ai le plan des deux tomes, mais je ne suis au début de l'écriture du premier.» Elle n'en dira pas plus. À personne.

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Stephenie Meyer