Face à la menace d'un conflit atomique, Pier-Luc, adolescent de Baie-Saint-Paul, se donne pour objectif de ne pas mourir puceau. Mais le sens de sa quête cache autre chose. La Presse en discute avec les artisans d'Avant qu'on explose, comédie qui revisite le thème de la liste des choses à faire avant l'inéluctable.

Le long métrage Avant qu'on explose constitue un télescopage déjanté de deux fins du monde dans la vie de Pier-Luc (Étienne Galloy), jeune homme perclus d'angoisse. Celle, possible, issue d'un conflit nucléaire entre les États-Unis et la Corée du Nord. Et la perspective de mourir puceau, sorte de fin du monde pour un adolescent dont les amis sont - EUX ! ! ! - passés à l'acte.

« C'est assez juste, répond le scénariste Eric K. Boulianne à qui on propose cette interprétation de l'histoire. Il y a un stéréotype ancré dans notre société voulant que, pour un jeune, perdre sa virginité constitue la fin du parcours. Et qu'après cela, il devient nécessairement un homme. »

Alors que la réalité est décalée. « Ne plus être puceau est censé changer bien des affaires, continue M. Boulianne. On se dit que tout à coup, la vie ne sera plus la même. Alors que souvent, c'est... fuck all. C'est un événement ben rapide qui n'a finalement pas eu tant d'importance que ça. »

Interprète de Pier-Luc, l'acteur Étienne Galloy, 19 ans, confirme. « Le monde de l'adolescence tourne autour de cette découverte, dit-il. Et c'est normal ! Parce que c'est l'interdit. Mais, c'est curieux, je n'accordais pas tant d'importance à ça. Pas plus d'ailleurs qu'à l'idée de me saouler la gueule. Même si j'ai aimé ça ! »

Là-dessus, le jeune comédien au sourire permanent éclate de rire. Puis, il pousse sa réflexion plus loin. 

« C'est tellement weird, l'adolescence, avec cette complexité psychologique nous poussant à vouloir faire comme les autres... quitte à ne pas nous respecter. »

- Étienne Galloy, comédien

Justement ! Dans l'histoire, Pier-Luc tente par tous les moyens et sans réfléchir aux conséquences d'en finir avec son pucelage, avec les encouragements (ou non) de ses amis Samuel (Will Murphy) et Hubert (Madani Tall). Avec pour résultat que ses tentatives répétées versent de la comédie au drame.

L'ambiance du film n'est pas sans rappeler le long métrage Prank de Vincent Biron, dont un des scénaristes était Eric K. Boulianne et dont le personnage principal de Stefie était incarné par... Étienne Galloy. Où doit-on voir les différences ?

« Dans Prank, l'adolescence se définit par la solitude de Stefie, répond le comédien. Il ne pogne pas et s'accroche à la moindre parcelle d'amitié que son entourage lui donne. Dans Avant qu'on explose, même si le personnage de Pier-Luc se donne pour mission de se dépuceler, il a tout pour être heureux. Il a une soeur, des parents, des amis qui l'aiment. C'est sa quête qui détruit un peu ce bonheur. »

La peur derrière la peur

Eric K. Boulianne et le réalisateur Rémi St-Michel estiment que la peur de Pier-Luc de demeurer vierge cache des angoisses plus fondamentales. Notamment celle de mourir tout court. Au fond, analysent-ils, Pier-Luc cherche à être réconforté par rapport à ses démons intérieurs. 

« Chercher à ne plus être puceau lui change les idées. Car il est un peu dans le déni par rapport à ses vraies angoisses. »

- Rémi St-Michel, réalisateur

Rémi St-Michel avait lui aussi travaillé avec Étienne Galloy dans le passé, le dirigeant dans le court métrage Petit frère qui s'est rendu à la Semaine de la critique du Festival de Cannes en 2014. « Étienne est un jeune qui, comme acteur, est super bon, juste, sensible, décrit-il. Il a une attitude positive absolument remarquable. Il est toujours joyeux et a un enthousiasme contagieux. »

Au fait, s'ils faisaient face à la fin du monde, la vraie, que feraient le réalisateur et le scénariste ?

« J'irais faire un safari, voir les lions, répond Rémi.

- Moi, j'aimerais rencontrer une de mes idoles, poursuit Éric.

- Elle est juste là, ton idole ! lance Rémi en se pointant du doigt.

- Non, mais j'aimerais rencontrer Bruce Springsteen. Aller faire de la moto avec lui », avoue Éric en riant.

Réaliser son plus grand rêve, ça aussi, c'est un peu la fin du monde.

Vers la réalisation

En marge du jeu, Étienne Galloy tournera son premier long métrage à titre de scénariste et réalisateur. Intitulé La marina, le film s'intéresse à un jeune adepte de planche nautique vivant son loisir à l'excès. « C'est un film sur les passions qui prennent parfois tellement de place dans nos vies qu'elles détruisent les relations humaines créées au début de l'âge adulte et qui sont fondamentales pour le reste de notre existence », explique le jeune comédien. Cet essentiel principe d'équilibre, Étienne Galloy l'applique dans sa vie. Passionné de cinéma, il est capable d'en décrocher. Galloy a coécrit le film et le coréalisera en juin avec Christophe Levac. Leur projet est financé par Téléfilm Canada dans le cadre du programme Talents en vue. Avec des enveloppes budgétaires de 125 000 $ et 250 000 $, ce programme appuie des projets de premier long métrage ou de série web de cinéastes émergents.