Il plane une ambiance des plus sinistres dans les couloirs abandonnés du pavillon Ross de l'hôpital Royal Victoria où se tourne ce jour-là Origami. Un lieu que les producteurs Stéphane Tanguay et Cédric Bourdeau ont tout fait pour réserver malgré leur budget serré.

«On n'a pas vraiment eu à refréner notre réalisateur, mais il a fallu redoubler de créativité à certains moments», lancent-ils d'entrée de jeu. «On avait loué un avion à une compagnie de vols nolisés, mais à cause de Fort McMurray, on l'a perdu. On a dû construire notre propre appareil avec des pièces recyclées en quatre jours! Tu coupes dans la location d'équipement, les lieux de tournage, etc., mais tu ne veux jamais que ça paraisse à l'écran», explique Stéphane Tanguay.

Les hommes de Kinesis Productions ont pu compter sur la coopération de Patrick Demers, avec qui ils avaient déjà travaillé sur Jaloux, un film au budget d'environ 100 000 $. «Ici, ce n'est pas le grand luxe, mais c'est quand même plus gros que notre dernier long métrage ensemble!», s'amuse le réalisateur. «J'ai fait certains choix qui font que j'ai moins de journées de tournage, comme tourner avec une steadicam pour les plans-séquence. Je me trouve coincé dans le temps, mais je réussis à faire de jolies choses. Je suis monteur depuis très longtemps et je réalise en fonction de ça. Je fais plus de variations, mais moins de prises. C'est chaque jour une course contre la montre», ajoute Patrick Demers.

Le réalisateur n'est pas le seul membre de l'équipe de tournage qui doit faire des concessions. Camille Parent, directeur artistique habitué des grosses productions américaines comme The Day After Tomorrow, The Fountain, a lui aussi dû travailler avec les moyens du bord. «On fait certaines concessions salariales et on demande à nos collègues dans notre département d'en donner plus. Ça devient un projet personnel dans lequel on croit, dit-il. Puisqu'on a un petit budget, on a choisi de travailler le plus près du sol possible, car on n'a pas l'équipement pour monter des lumières très haut. On a également travaillé avec le mobilier de l'hôpital même si ce n'est pas mon premier choix. Disons que je n'aurais peut-être pas choisi les mêmes couleurs!»

Même son de cloche du côté du maquillage et de la coiffure, dont la réalisation a été confiée à une seule et même personne. «On est dans du contemporain, pas dans le look d'époque, alors c'est faisable! explique Nathalie Trépanier. Il faut être plus organisé sur ce genre de petit plateau, prévoir tout le temps les coûts. En même temps, tu ne dois pas avoir trop de choses parce que tu n'as pas beaucoup de place! On doit déménager tous les jours, car on n'a pas de roulotte ici. Comme dans les années 80, on fonctionnait avec des tables et des miroirs. Ça faisait des années que je n'avais pas vu ça.»

Sur une petite production québécoise comme Origami, impossible de dépasser d'une minute l'horaire établi. «On doit respecter les conventions UDA et AQTIS. Si la scène doit finir à 11 h, on a 10 "minutes de grâce". À 11 h 11, on entre en pénalité, et ça, c'est impossible avec un tel budget!», explique Gabrielle Mankiewicz qui occupe les postes de deuxième et troisième aide-réalisatrice. «Dans mon travail, le plus gros défi est de servir le réalisateur avec peu de moyens. Il faut se réinventer dans tous les départements sur ce tournage. On a peu de figurants, alors il a fallu trouver des techniques à l'image pour les dupliquer.»

Jours de tournage: 23

Budget: 2 millions

Équipe de tournage (sans comédiens): 33 

Date de sortie: 2017

Thriller fantastique de Patrick Demers mettant en vedette François Arnaud, Milton Tanaka, Normand D'Amour, Jacques Godin, Benoît Gouin et Tania Kontoyanni.

Synopsis: Un jeune homme voyage dans le temps afin de modifier certains éléments de son passé.

Photo Hugo-Sébastien Aubert, La Presse

Patrick Demers, réalisateur d’Origami