Cela faisait plus de 25 ans que Denise Filiatrault n'avait pas joué un premier rôle au cinéma. Quand elle a reçu l'appel du cinéaste Alexis Durand Brault, l'amoureux de Sophie Lorain (sa fille), elle n'a pu résister. Adapté d'un roman de Robert Lalonde, C'est le coeur qui meurt en dernier, elle campe le rôle d'une mère atteinte d'alzheimer qui reprend contact avec son fils. Or, ce dernier a écrit un livre sur sa relation trouble avec elle. Des secrets seront révélés. Le temps de quelques heures, hier, La Presse s'est faufilée sur le plateau de tournage.

Il est 13 h. L'équipe de production est prête pour tourner un premier plan-séquence. La scène sera reprise plusieurs fois pendant près d'une heure. Alexis Durand Brault, le réalisateur (qui dirige notamment Au secours de Béatrice à TVA), recherche la perfection. Il parle avec ses acteurs, dont Denise Filiatrault, avant de crier «action». «Tout le monde connaît la réputation de Denise, mais avec nous, elle est une soie. Elle est hyper game. En même temps, j'ai fait l'horaire pour elle. C'est une madame de 84 ans, tout de même. Elle est parfois très inquiète et très stressée. C'est dur, à son âge, de s'exposer comme elle le fait. Elle va montrer son coeur, ce qu'elle peut toujours faire. Je trouve ça gutsy. Faut vraiment avoir envie de vivre pour avoir toujours le goût de manger avec les techniciens, discuter des textes, croquer à pleines dents dans le métier. Si à son âge, j'ai 10 % de son énergie, ça sera extraordinaire», dit-il, ému. Gabriel Sabourin, qui joue le rôle de Julien, le fils écrivain, abonde. «Elle est super, elle est tout simplement Denise! (rires) C'est aussi spectaculaire qu'on peut l'imaginer», raconte-t-il.

Quand il a lu C'est le coeur qui meurt en dernier, un roman de Robert Lalonde (qui joue le rôle de Christophe Clément dans Au secours de Béatrice), Alexis Durand Brault s'est senti interpellé. «J'ai lu le livre et j'ai dit: "Je vais le faire, mais à une condition. Il faut que Denise accepte de jouer le rôle principal"», explique-t-il. Selon lui, l'histoire qui est racontée, «c'est un peu Les belles soeurs d'aujourd'hui». «Ça nous rappelle ce qu'étaient nos parents et nos grands-parents, les années 70, leurs façons de camoufler les problèmes et de tout maquiller pour éviter d'avoir l'air triste. [...] Le roman m'a rappelé cette époque où les meubles ne bougeaient pas, où il y avait dans les maisons une certaine tristesse», explique le cinéaste.

Après le tournage de la scène, il est déjà 14 h. Les acteurs sont invités à se diriger vers la cantine pour manger un petit quelque chose. Les journées sont longues sur les plateaux de tournage, mais Denise Filiatrault ne se défile pas. Elle vient à la rencontre des journalistes. Pourquoi avez-vous accepté de jouer ce rôle? lui demande-t-on. «Vous avez bien raison! J'ai-tu besoin de faire ça, moi? (rires) Mais non, on a "ben" du fun. Quand j'ai lu le roman de Robert Lalonde, je suis tombée en amour. Quelle belle histoire. Je me suis dit: "C'est dommage que je ne joue plus, c'est un rôle que j'aurais bien voulu faire." La vie est drôlement faite, Alexis m'a appelée pour m'offrir de participer au projet. J'avais très peur, mais j'ai dit oui», explique-t-elle.

C'est le coeur qui meurt en dernier sortira en salle cet automne.