Dans Il ventait devant ma porte, documentaire consacré au parcours atypique du cinéaste Pierre Goupil, le directeur photo Michel La Veaux dit à ce dernier: «Tu étais seul avec ta création.»

Voilà une petite phrase de six mots qui résume assez bien la vie et l'oeuvre, la vie dans l'oeuvre, mais aussi la vie sans l'oeuvre de ce cinéaste québécois connu pour son travail d'autofiction.

Car après avoir signé quelques films singuliers, Pierre Goupil a connu un long passage à vide attribuable à ses troubles bipolaires. Après avoir été expulsé de son logement, au début de 2010, il décide de se reprendre en main. Avec l'aide du directeur photo Rénald Bellemare, il coréalise ce documentaire où il est question de maladie mentale, de solidarité et d'amitié. Le tout à travers quelques sorties publiques de M. Goupil, durant le printemps érable, par exemple, ou encore au moment des protestations contre la fermeture de la Cinérobothèque de l'ONF.

La Presse a échangé à ce sujet avec Rénald Bellemare.

Quels sont vos liens avec Pierre Goupil?

Nous nous connaissons depuis plus de 30 ans. Nous avons travaillé ensemble sur quelques films avant de nous perdre de vue. Un jour, Pierre m'a appelé à la suite d'une période de crise. C'était comme un appel à l'aide. Mais cela a aussi donné une prise de parole. C'est comme ça, de façon spontanée, que les choses ont commencé pour le tournage de ce film.

Quelle est l'essence de ce documentaire?

Une ouverture. Une ouverture dans le sens de dire oui, je vais m'exposer, prendre la parole, parler de mes problèmes. C'est une façon de créer des liens, d'ouvrir le dialogue sur des questions de santé mentale. Pierre était parfois plus ou moins à l'aise de parler de lui, mais il a appris à dédramatiser les choses.

Au-delà du cinéaste, qui est Pierre Goupil?

Un être excessivement sensible. C'est un homme très intelligent, qui lit beaucoup, qui réfléchit et écrit beaucoup. Mais il fait cela dans la solitude, loin des caméras. En raison de cette façon de vivre, il a développé un grand sens de l'observation. Ce n'est pas un tribun, mais devant une caméra, il s'anime et a toujours quelque chose d'intelligent à dire.

Votre film en est-il un de résistance?

Tout à fait! Il nous montre une facette moins belle de la psychiatrie. On retrouve à travers Pierre le portrait de gens surmédicamentés qui ont bien peu de soutien psychologique. Plus on gratte, plus ce constat se révèle. Trop de gens comme lui passent 15 minutes dans le cabinet du médecin, d'où ils ressortent avec une ordonnance. Ça manque d'humanité.

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Il ventait devant ma porte prend l'affiche à l'Excentris le 4 avril. On pourra aussi le voir à partir de la même date sur les sites onf.ca et cinemaexcentris.com