Aujourd'hui, à 14 h 30, Téléfilm Canada annoncera le titre du film qui aura l'honneur de représenter le Canada aux Oscars, dans la catégorie du meilleur film en langue étrangère.

La Suède a déjà choisi The Square (Ruben Östlund), lauréat de la Palme d'or à Cannes cette année; la France a fixé son choix sur 120 battements par minute (Robin Campillo), Grand Prix à Cannes; et l'Allemagne sur In the Fade, le film de Fatih Akin qui a valu le prix d'interprétation féminine à Diane Kruger sur la Croisette. Plusieurs autres pays ont déjà annoncé leurs couleurs aussi.

Les règles

Chaque pays (on en compte environ 85 chaque année), peu importe l'importance de sa filmographie, sélectionne un seul long métrage, digne de le représenter aux Oscars dans cette catégorie bien spécifique. Ce film doit avoir fait l'objet d'une sortie en salle pendant au moins une semaine sur le territoire national, entre le 1er octobre 2016 et le 30 septembre 2017. Une première élimination aura lieu au mois de décembre, alors que neuf titres seront retenus. Des comités spéciaux, formés de membres éminents de l'Académie, auront ensuite le mandat de visionner les neuf longs métrages et de choisir les cinq finalistes. En tenant compte de tous ces critères, voyons quelles sont les chances des oeuvres le plus susceptibles d'être considérées par le comité canadien.

Le favori

1:54, Yan England

Le film de Yan England, qui a pris l'affiche au Québec en octobre 2016, est tout à fait admissible à la course. En y regardant de près, il y a même lieu de conclure que 1:54 possède les meilleures chances de décrocher l'honneur. Ce drame évoque en effet un thème à caractère social, l'intimidation dans les écoles, auquel les membres de l'Académie pourraient être sensibles. Le film a beaucoup voyagé à l'étranger et a été présenté aussi dans quelques festivals aux États-Unis, de même qu'au siège de l'Organisation des Nations unies à New York. Yan England n'est pas un inconnu aux yeux des académiciens non plus. Henry, qu'il a écrit et réalisé, a été finaliste aux Oscars il y a quatre ans dans la catégorie du meilleur court métrage. En retenant 1:54, le comité canadien ferait un choix tout à fait logique.

Le plus sérieux rival

Hochelaga, terre des âmes, François Girard

Le nouveau film de François Girard a fait l'objet de représentations exceptionnelles à Montréal et à Toronto, mais sa carrière en salle n'est pas encore amorcée. Pour être en règle, Hochelaga, terre des âmes est à l'affiche depuis vendredi dans un seul cinéma, à Medecine Hat, en Alberta, une ville située à trois heures de route de Calgary. Cette fresque historique, qui retrace l'histoire de Montréal à travers ses racines autochtones, a tout pour plaire aux membres de l'Académie sur le plan de la qualité artistique, d'autant que François Girard bénéficie d'une excellente réputation. Au début du nouveau millénaire, Le violon rouge a même remporté l'Oscar de la meilleure trame musicale. Cela dit, les publications spécialisées américaines ont accueilli Hochelaga, terre des âmes avec respect, mais quelques-unes d'entre elles ont relevé le potentiel commercial plus limité d'un film qui évoque l'histoire de la métropole québécoise. Un événement comme les Oscars traduisant toujours une vision très américaine des choses, Hochelaga, terre des âmes passera-t-il la rampe?

Du champ gauche...

Ceux qui font les révolutions à moitié n'ont fait que se creuser un tombeau, Mathieu Denis et Simon Lavoie

Si jamais le comité canadien décidait de jouer son va-tout et d'offrir aux membres de l'Académie une proposition vraiment radicale, il pourrait alors fixer son choix sur le brûlot du tandem de Laurentie. Désigné meilleur long métrage canadien l'an dernier au festival de Toronto, Ceux qui font les révolutions à moitié n'ont fait que se creuser un tombeau s'est aussi fait valoir sur le circuit festivalier, notamment à la Berlinale, où il était sélectionné dans la catégorie Génération Plus. Sans remettre aucunement en question les qualités artistiques du film, on envisage quand même plus difficilement la présence d'un film comme celui-là aux Oscars...

Photo fournie par Les Films Séville

Hochelaga, terre des âmes, de François Girard

Le négligé

Le problème d'infiltration, Robert Morin

Le plus récent film du réalisateur de Journal d'un coopérant a été unanimement salué par la critique québécoise et connaît une carrière en salle aussi inattendue que méritée. Faut-il en conclure que Le problème d'infiltration pourrait dignement représenter le Canada aux Oscars ? Dans les faits, absolument. Dans la réalité des choses, non, malheureusement. Le fait est que Robert Morin, dont l'oeuvre est immense et essentielle, est pratiquement un inconnu sur la scène internationale. Récemment, le cinéaste a révélé à La Presse que son film avait été soumis à tout ce que la planète compte de grands festivals (ou presque) et qu'il avait été rejeté partout. N'empêche. Robert Morin aux Oscars, on voudrait voir ça!

La carte cachée

Maliglutit, Zacharias Kunuk

De façon générale, le comité canadien fixe son choix sur un film québécois, étant donné que les films tournés au pays dans une autre langue que l'anglais sont majoritairement fabriqués ici. Cela dit, Maliglutit, un film tourné en inuktitut, est aussi admissible à la course, du moins en principe. Cette variante du film de John Ford The Searchers, transposé cette fois dans un décor de glace, viendra-t-elle redistribuer les cartes? Ou Nelly (Anne Émond)? Ou C'est le coeur qui meurt en dernier (Alexis Durand-Brault)? Ou Et au pire, on se mariera (Léa Pool)? Réponse aujourd'hui.

Photo fournie par K-FILMS AMÉRIQUE

Christian Bégin dans Le problème d'infiltration, de Robert Morin