Dans le huis clos d'un monastère en Cisjordanie occupée, Basil Khalil filme un véritable dialogue de sourds: celui de colons israéliens en panne de voiture en plein shabbat, donc incapables de décrocher un téléphone, et obligés de s'en remettre à des religieuses ayant fait voeu de silence.

Et cette parabole qui s'empare à la fois du conflit israélo-palestinien et des interdits religieux pourrait permettre au jeune cinéaste, né à Nazareth d'un père palestinien et d'une mère britannique, de décrocher dimanche le premier Oscar du court métrage pour la Palestine.

En moins de 15 minutes, Ave Maria, avec son ton ironique et décapant, raconte «un enchaînement d'événements» qui débute avec la voiture des colons percutant une statue de la Vierge devant le petit monastère palestinien.

Ces événements, «aussi absurdes et drôles qu'ils paraissent» au spectateur et au réalisateur qui s'amuse à faire éclater la «bulle» de ses personnages, «ne font pas rire les Israéliens et les soeurs», prisonniers qu'ils sont de «leur pire cauchemar: que leurs lois et règles de vie soient mises à l'épreuve», explique le cinéaste.

D'un côté, le colon juif - entouré de sa femme et de sa mère - se débat pour savoir s'il doit accepter un verre d'eau venu de la cuisine des religieuses où il a aperçu du porc, interdit dans le judaïsme; de l'autre, des soeurs liées par un voeu qui leur interdit de s'exprimer et sollicitées pour contacter quiconque pourra réparer la voiture de leurs visiteurs impromptus.

Et, dit M. Khalil à l'AFP depuis Londres où il réside, Ave Maria n'est «pas un film sur la religion» car le propos de ce film tourné en anglais, hébreu et arabe se veut bien plus universel.

«Dès qu'un enfant naît en Israël/Palestine, on lui assigne des ennemis et des amis, on lui dit qu'il doit se battre pour tel ou tel côté. Ce n'est plus une chose à laquelle il croit, c'est quelque chose qui lui est imposée», affirme-t-il.

Et visiblement le message porte: Ave Maria, une coproduction française, allemande et palestinienne a déjà récolté 16 récompenses, et été projeté dans une trentaine de pays et plus de 75 festivals. L'oscar, dit M. Khalil, «serait une magnifique consécration de mon travail de réalisateur, la cerise sur le gâteau».

Une consécration de plus aussi pour le cinéma palestinien, encore à la traîne dans le monde arabe mais qui a réussi plusieurs percées remarquées, notamment aux Oscars, où plusieurs films ont été retenus dans les finalistes.

En 2014, Omar était en lice pour l'Oscar, alors que l'année d'avant, Cinq caméras brisées, concourait dans la compétition des documentaires.