Le réalisateur montréalais Malcolm Clarke essaie de ne pas trop penser à sa nomination aux Oscars pour l'inspirant documentaire The Lady in Number 6: Music Saved My Life.

Il dit par ailleurs qu'il n'a pas de superstition sauf une: il refuse d'écrire un discours à l'avance, croyant que ça pourrait nuire à ses chances de l'emporter.

Il faut dire que Clarke n'en sera pas à sa première soirée des Oscars. Il a déjà remporté la statuette, encore une fois dans la catégorie du meilleur court métrage documentaire, en 1989, pour You Don't Have to Die, un film racontant l'histoire d'un enfant luttant contre le cancer et qui inspire d'autres jeunes aux prises avec cette maladie. Lorsqu'il a accepté son Oscar, il a remercié l'Académie de continuer à récompenser les documentaristes à un moment où plusieurs souhaitaient les exclure de la cérémonie.

The Lady in Number 6 raconte l'histoire d'Alice Herz-Sommer, qui, à 110 ans, est décrite comme la plus vieille pianiste au monde et la plus vieille survivante de l'Holocauste.

«La musique a sauvé ma vie et la musique me sauve encore», déclare-t-elle dans le film.

Cette philosophie, l'équipe de tournage l'a bien ressentie lorsqu'elle a passé deux semaines dans le petit appartement de la dame, à Londres, pour discuter de sa vie.

Le producteur délégué du court métrage et fondateur de l'entreprise montréalaise Bunbury Films, Frédéric Bohbot, raconte qu'Alice Herz-Sommer affirme dans le documentaire «qu'il y a de la beauté même dans les choses difficiles de la vie» et qu'il «faut tout simplement savoir où la trouver».

Malcolm Clarke, un Britannique qui habite à Montréal depuis le milieu des années 1990, a d'abord hésité à raconter l'histoire de Herz-Sommer, parce qu'il avait déjà fait un film sur l'Holocauste.

«J'en avais assez de traiter de ce sujet, a confié le réalisateur. Lorsque vous vous assoyez avec ce matériel pendant une certaine période de temps, ça peut finir par vous atteindre. Ça vous fatigue, psychologiquement.»

Clarke a été nommé aux Oscars en 2003 pour Prisoner of Paradise, qui racontait l'histoire de Kurt Gerron, un artiste juif allemand interné dans un camp de concentration et forcé de tourner un film de propagande nazie.

Mais le cinéaste n'a eu qu'à rencontrer Herz-Sommer pour changer d'avis.

«Je me suis assis avec elle pendant une heure, une heure et demie - nous avons pris le thé ensemble -, et à la fin de la rencontre, j'ai réalisé que (...) nous devions le faire parce qu'elle était si remarquable et que son histoire était bien plus qu'une histoire d'Holocauste.»

Frédéric Bohbot croit aux chances du film de l'emporter à la soirée des Oscars, le 2 mars, et espère que son succès braquera les projecteurs sur les documentaires tournés par des Canadiens.

Le producteur croit également qu'un Oscar pourrait permettre à plus de gens d'être touchés par la philosophie d'Alice Herz-Sommer.

«Je crois que le message du film est que nos vies ne sont pas si terribles», a-t-il dit, ajoutant que l'histoire de la vieille dame pourrait «apporter plus de paix dans notre monde».

Malcolm Clark perçoit également un autre message dans les propos de son sujet.

«Ce serait bien si nous pouvions écouter plus attentivement ce que les personnes âgées ont à dire, parce que je crois que nous aurions beaucoup à apprendre (d'elles).»