(Los Angeles) À 68 ans, James Cameron nourrit peu de regrets en tant que réalisateur : sa carrière l’a amené à enfanter trois des quatre plus gros succès en salles du cinéma mondial, dont l’incontournable Titanic, qui fête ses 25 ans.

Mais à la veille du retour sur grand écran de cette superproduction, dans une édition anniversaire, le Canadien confesse qu’il aurait conçu ce drame différemment, s’il avait pu prévoir l’indignation des admirateurs, outrés par la mort tragique du héros, Jack, à la fin du film.

« Vu ce que je sais maintenant, j’aurais créé un radeau plus petit, pour qu’il n’y ait aucun doute ! », s’amuse-t-il.

Un quart de siècle après sa sortie, les débats font toujours rage entre fans. Beaucoup maintiennent mordicus que l’amoureux transi incarné par Leonardo DiCaprio n’aurait jamais dû mourir après le naufrage du paquebot. Il lui suffisait de monter sur le radeau improvisé pour sauver sa dulcinée, Rose.

Au lieu de cela, le joli cœur décide que la porte sur laquelle flotte le personnage joué par Kate Winslet n’est pas assez grande pour deux, et se sacrifie pour la sauver des eaux glaciales de l’Atlantique nord.

Persistante, la polémique entourant sa mort n’est qu’un exemple de la manière dont l’histoire du Titanic « semble ne jamais s’arrêter pour le public », a estimé M. Cameron lors d’une conférence de presse avant le retour du film sur grand écran cette semaine.  

« Il y a eu des tragédies bien plus importantes depuis le Titanic » et son naufrage causé par une collision avec un iceberg en 1912, ajoute-t-il, en mentionnant les deux guerres mondiales qui ont endeuillé le XXe siècle. « Mais le Titanic a cette sorte de qualité romanesque durable, presque mythique ».

« Je crois que cela a à voir avec l’amour, le sacrifice et la mort », ajoute le réalisateur, en pointant « les hommes qui n’ont pas embarqué à bord des canots de sauvetage pour que femmes et enfants puissent survivre ».

Essai grandeur nature

Pour le 25e anniversaire du film, sorti en décembre 1997, le réalisateur a testé la théorie des admirateurs, grâce à un essai grandeur nature dans un bassin d’eau glaciale, avec deux cascadeurs et une réplique exacte de la porte ayant servi pour le tournage.

Lors de cette performance, accomplie pour un documentaire réalisé par National Geographic, les deux figurants reprenant les rôles de Rose et Jack étaient équipés de plusieurs thermomètres pour mesurer la vitesse à laquelle ils seraient victimes d’hypothermie.

L’expérience a révélé que le destin tragique de Jack n’était pas inéluctable.  

Un premier test où le vagabond s’accroche à la porte sans monter dessus, comme dans le film, confirme qu’il serait mort d’hypothermie. Mais un second test, où les cascadeurs arrivent à trouver un équilibre sur la porte pour maintenir leurs torses – et donc leurs organes vitaux – hors de l’eau, suggère que Jack aurait pu être sauvé.

Dans ce scénario, « il aurait peut-être pu tenir jusqu’à l’arrivée du canot de sauvetage », admet le réalisateur. « Verdict final ? Jack aurait pu éventuellement survivre. Mais cela dépend de nombreuses variables ».

Pour son retour en salles une semaine avant la Saint-Valentin, cette tragique histoire d’amour n’inclut pas pour autant de fin alternative.  

Cela ne devrait pas l’empêcher d’ajouter à ses recettes vertigineuses : avec 2,2 milliards de dollars au box-office mondial, Titanic est le troisième plus gros succès de l’histoire en salles, derrière le film de superhéros Avengers : Endgame et un autre mastodonte de James Cameron, Avatar.

En incluant le deuxième volet de la saga, « Avatar : la voie de l’eau », actuellement en salles et dont les recettes vont bientôt dépasser celles de Titanic, M. Cameron a récolté avec ses trois plus gros films 7,25 milliards de dollars, soit l’équivalent du PIB des Bermudes.

Des chiffres que le réalisateur s’emploie à relativiser. « Je vous accorde que 100 millions de notre box-office (sur Titanic ) est dû au charme de Leonardo DiCaprio sur les adolescentes de 14 ans », plaisante-t-il.

Au-delà d’avoir fait sa fortune, Titanic et ses trois heures a surtout laissé un autre héritage.

« Avant Titanic, la doxa […] voulait qu’un film long ne puisse pas rapporter de l’argent », remarque M. Cameron.  

La superproduction a prouvé le contraire, ouvrant la voie au premier « Avatar » et à ses trois heures de fable écologique, acclamée par le public. Le second volet de la saga dure désormais « trois heures et douze minutes », souligne M. Cameron. « Et il a beaucoup de succès ».