(New York) Cinq ans après la déferlante #metoo, la vedette déchue Kevin Spacey a comparu jeudi à New York dans un procès civil intenté par l’acteur américain Anthony Rapp, qui l’accuse « d’agression sexuelle » quand il avait 14 ans en 1986, ce que l’acteur de House of Cards nie.  

L’ancien acteur vedette aux deux Oscars était plutôt détendu et souriant, vêtu d’un costume bleu, chemise blanche et cravate, assis toute la journée à quelques mètres de son accusateur Anthony Rapp au tribunal fédéral civil de Manhattan.

Anthony Rapp, 51 ans à la fin octobre, réclame 40 millions de dollars de dommages et intérêts. Il est beaucoup moins célèbre que Kevin Spacey, 63 ans. Il a joué notamment dans la série Vedette Treck : Discovery.

Devant un jury populaire de six femmes et six hommes, les avocats des deux acteurs ont croisé le fer pour une première après-midi d’un procès qui devrait durer une dizaine de jours.

Les faits remontent à 1986.

Anthony Rapp a 14 ans, est un apprenti comédien de Broadway. Spacey est aussi jeune acteur de théâtre, un inconnu d’à peine 27 ans.

Rencontre à Broadway

L’adolescent Rapp et le jeune Spacey se rencontrent brièvement dans les coulisses d’un théâtre new-yorkais et ce dernier l’invite une semaine plus tard à dîner avec quelques amis dans son studio de Manhattan.  

D’après l’accusation et le président du tribunal Lewis Kaplan qui a consigné les faits dans une ordonnance de juin dernier, une fois les invités partis de la petite fête, Spacey et Rapp se retrouvent assis sur le bord du lit, la télé allumée.

Spacey « soulève » alors l’adolescent et « sa main “frotte” quelques secondes le vêtement couvrant ses fesses ». Puis, Spacey « met Rapp sur le lit, sur le dos, avant de s’allonger tout habillé, brièvement, à côté et sur » le garçon de 14 ans.  

PHOTO YUKI IWAMURA, ASSOCIATED PRESS

Anthony Rapp (à gauche)

Anthony Rapp réussit à « s’extirper » et quitte le studio.

Mais plus de 35 ans après les faits, son avocat Peter Saghir a accusé jeudi Kevin Spacey d’avoir cherché « délibérément » à « assouvir ses désirs sexuels ».

« Ce n’était pas un simple chahut », a tonné l’avocat.

Reste que dans ce procès civil – la procédure au pénal avait été abandonnée après la plainte de Rapp en septembre 2020 – l’accusation initiale « d’agression sexuelle » n’a pas été retenue par le juge Kaplan.

Les faits sont considérés prescrits et ne rentrant pas dans le champ d’une loi de l’État de New York de 2019 sur la protection de l’enfance, qui peut allonger le délai de prescription.

« Détresse émotionnelle »

Le juge a retenu le chef d’accusation d’« atteinte à l’intégrité physique » d’Anthony Rapp ayant provoqué une « détresse émotionnelle ».

De fait, pour l’avocate de Kevin Spacey, Jennifer Keller, l’agression sexuelle « n’a jamais eu lieu ». Anthony Rapp « a répété la même fausse histoire » dans les médias mais « jamais à la police », a-t-elle accusé.

Fin octobre 2017, aux débuts du mouvement #metoo, M. Rapp avait accusé une première fois M. Spacey, avec force détails, dans le média BuzzFeed News. Dès le lendemain sur Twitter, Kevin Spacey lui avait présenté ses « plus sincères excuses » pour son « comportement (d’homme) ivre et profondément déplacé ».

Lors de ses dépositions avant le procès, Anthony Rapp avait reconnu qu’il n’y avait eu « ni baiser, ni déshabillage, ni attouchement sous les vêtements et aucune déclaration ou insinuation à caractère sexuel » lors d’un « échange » qui n’avait pas duré plus de deux minutes.

Acteur doublement oscarisé pour Usual Suspects et American Beauty, Kevin Spacey Fowler de son nom complet, a disparu des écrans et des planches après avoir été l’un des premiers artistes emportés il y a tout juste cinq ans par la vague mondiale #metoo partie des États-Unis.

Il a déjà eu des démêlés avec la justice aux États-Unis et au Royaume-Uni. À Londres, il est ainsi poursuivi pour des agressions sexuelles sur trois hommes entre mars 2005 et avril 2013, lorsqu’il était directeur d’un théâtre, et pour lesquelles il a plaidé non coupable en juillet dernier.