(Cannes) Scarifications, tentatives de suicide, internement, conversion à l’islam, fondation pour les orphelins : Diam’s, ex-rappeuse vedette, sort de 12 ans de silence médiatique pour livrer sa vérité dans un documentaire présenté à Cannes, qu’elle a coréalisé.

Celle qui fut une figure centrale du hip-hop en France dans les années 2000 n’est pas sur la Croisette.

« Quand vous verrez ce film et la vie que Mélanie (son vrai prénom) a décidé de mener, vous comprendrez qu’elle ne pouvait pas le conduire physiquement à Cannes, elle est cohérente », a dit Thierry Frémaux, délégué général du Festival de Cannes, en introduction de la projection jeudi soir.

Aujourd’hui âgée de 41 ans, Diam’s a toutefois envoyé un petit message vidéo, projeté avant son film, certifiant que son absence « n’est pas du mépris ou du dédain », mais s’inscrit dans un souci de « préserver ce petit cocon de vie simple » qu’elle a aujourd’hui loin du showbiz.

« On t’aime ! », ont lancé les jeunes spectateurs dans le public, pas ou à peine nés quand elle figurait dans les palmarès en France.

Le documentaire Salam (« Paix » en arabe), hormis une incursion de Diam’s aujourd’hui dans un Zénith de Paris vide, ne parle pas de musique.

La quadragénaire se présente voilée et couverte des pieds à la tête, visage apparent. Le film est scindé en deux parties : le mal-être du temps du showbiz et l’après.

Pleurs en coulisses

Diam’s et des proches racontent d’abord les souffrances. On prend connaissance d’une première tentative de suicide à 14 ans, prolongement d’une peur irrationnelle de la mort de sa mère, pourtant toujours bien portante et qui s’exprime dans le documentaire.

Le rap et le succès n’arrangent rien. « À force de courir dans tous les sens, ma vie n’en avait plus aucun », assène-t-elle.

Vitaa, artiste qui fit ses premières parties, décrit les pleurs de Diam’s en coulisses après des concerts triomphaux. Son ancienne gérante relate les scarifications aux bras et visage.

Un internement psychiatrique s’impose. « Ils m’ont éteint avec les médicaments », assure Diam’s. À sa sortie, on comprend qu’il y aura une autre tentative de mettre fin à ses jours.

Survient le tournant de la conversion à l’islam quand, lors d’une soirée entre filles, l’une des convives s’isole pour prier et que Diam’s, qui a pourtant grandi dans le catholicisme, la suive.

L’ex-rappeuse, mère de trois enfants, affirme s’être ensuite convertie seule à l’Île Maurice où elle était partie en virée avec Vitaa. Comme une réponse à ceux qui la disaient endoctrinée quand les photos d’elle, voilée, dans Paris Match, avaient créé l’émoi il y a une dizaine d’années.

Parti pris

Les partis pris de mise en scène sont assumés. On ne voit des proches qui témoignent dans la première partie, assez sombre, que les visages, comme si eux-mêmes étaient voilés.

« On voit la vérité des visages, on resserre sur les silences, les sourires, les larmes, ce qui est aussi peut-être un moyen de faire oublier son voile et le vêtement (long) qu’elle porte quand elle apparaît », estime auprès de l’AFP Anne Cissé, une des coréalisatrices (avec Diam’s et Houda Benyamina).

La deuxième partie du film correspond à la conversion de Diam’s et à sa fondation dédiée à des orphelins au Mali (même si, comme elle le dit au Parisien de vendredi, elle vit aux Émirats arabes unis).

Diam’s en profite pour déminer toute accusation de prosélytisme. L’ancienne chanteuse souligne que sa conversion a résonné avec un choix « de vie » plutôt que d’en finir, comme d’autres artistes au bout du rouleau, par arme à feu ou seringue.

« Généralement, les artistes ne sont plus là pour nous raconter pourquoi ils sont tombés dans les dépendances, comme Amy Winehouse, pourquoi ils se sont tiré une balle dans la tête, comme Kurt Cobain », glisse-t-elle dans Le Parisien.