(Cannes) Les hôtels cinq étoiles ont rouvert, la musique résonne de nouveau sur les plages de la Croisette : après une année « horrible » à cause de la COVID-19, et malgré des réservations encore en berne, Cannes se reprend à espérer à l’approche de son festival de cinéma.

« On est impatients », reconnaît Pierrick Cizeron, chef exécutif du pôle hôtelier au Majestic, un palace à la façade blanche avec vue sur la Méditerranée.  

En 2020, le festival, rendez-vous des cinéphiles au rayonnement planétaire, avait dû être annulé face aux ravages de la pandémie. Cette année, alors que la France a vécu un nouveau confinement au printemps, l’édition 2021 a été décalée du mois de mai pour se tenir du 6 au 17 juillet.

Le festival, qui attire généralement 40 000 personnes par jour – probablement moitié moins cette année – représente 20 % du chiffre d’affaires des hôtels de Cannes.

« C’est plus que l’effervescence, on est en plein recrutement de 250 personnes pour la saison », explique Yann Gillet, le directeur de l’hôtel de luxe Martinez, complet à la Pentecôte.

Le personnel a vécu « comme un crève-cœur » l’absence de festival de cinéma l’an dernier, dans un hôtel habitué à accueillir nombre de stars du grand écran.  

Le festival, « c’est un véritable moteur et ça rythme notre année. Souvent, les clients viennent nous voir et nous demandent si c’était bien la chambre de Brad Pitt », raconte Yann Gillet.

Au 7e étage, l’hôtel, entièrement rénové en 2019, met la dernière main à une double suite penthouse, baptisée du nom de deux figures du cinéma français : le délégué général du Festival Thierry Frémaux et l’actrice Isabelle Huppert. Ils personnaliseront la décoration de cette suite qui sera occupée pendant le festival par le joaillier Chopard.   

Premiers employeurs dans cette ville de la Côte d’Azur de quelque 75 000 habitants qui vivait largement du tourisme et des congrès avant la pandémie, nombre d’hôtels-restaurants ont survécu grâce aux aides et se sont endettés.

Mais malgré la perspective du festival, les hôtels cannois, qui avaient tous refermés en septembre-octobre, sont encore loin d’avoir fait le plein.

« On est à 10 % de réservations en juin et 25 % en juillet, une opportunité inespérée pour des festivaliers pour qui, en temps normal, ce serait compliqué de venir ! », fait valoir Christine Welter, patronne du syndicat des hôteliers cannois.  

« Et c’est le côté sympa cette année ! On a des deux étoiles à partir de 100 euros la nuit, à deux pas de la Croisette, alors qu’il n’y a pas de disponibilité pendant un festival du film normal », ajoute-t-elle. Dans le passé, des chambres à 40 euros pouvaient même passer à 260 euros la nuit.

« Ca commence à revivre »

La mairie a vacciné à tour de bras et les protocoles sanitaires sont prêts, assure encore Mme Welter.

Sur la Croisette, un livreur slalome entre les passants, une composition florale sous chaque bras tandis qu’un bateau tractant un parachute publicitaire sillonne le rivage. Dans les devantures des magasins de luxe, sacs, robes et escarpins de prix attendent le chaland.

Le festival ? « Ca nous explose le chiffre d’affaire, on a une clientèle magnifique », s’exclame Olivier Zambrana, 42 ans, employé à la boutique Jimmy Choo, qui reste pourtant prudent cette année. D’habitude, il double son stock avant l’arrivée des vedettes, mais là, il attend de voir.

Chez Giry, traiteur à Cannes depuis plus de cinquante ans, l’activité redémarre aussi doucement. Dans son bureau encore vide avec une majorité de collègues en chômage partiel, Luc Guibout enregistre ses premières demandes de devis depuis un an. « C’est pas l’explosion mais on sent que ça commence à revivre », dit-il, après une année qu’il qualifie d’« horrible ».

A l’autre bout de Cannes, au quartier de La Bocca, des ouvriers s’affairent sur le chantier du nouveau multiplexe du Cineum de 2400 places qui étrennera quatre de ses douze salles pour des projections du festival.  

Le Cineum est adossé à un nouveau campus audiovisuel qui doit accueillir 900 premiers étudiants en septembre 2021, un projet cofinancé par la mairie de Cannes et son agglomération pour capitaliser sur le renom du célèbre festival.