L’année 2021 a commencé avec l’imposition d’un couvre-feu au Québec. Rien pour aider les salles de cinéma. Il a fallu attendre la fin du printemps pour un lent retour à la normale… avant une nouvelle fermeture fin décembre. Mais pandémie ou non, nous avons vu d’excellents films tout au long de l’année. Voici mes 10 choix, un palmarès dans lequel le cinéma québécois a sa place.

1. Annette

Leos Carax

France

Annette n’est pas en haut de cette liste par hasard. C’est notre film préféré de l’année. Film d’amour et de fulgurances, du Big Bang et de grandes turbulences, à l’image de ce qu’annonce l’affiche. Annette raconte l’histoire d’amour entre Henry McHenry (Adam Driver) et Ann Desfranoux (Marion Cotillard), couple de stars, lui au stand-up, elle à l’opéra. Alors que la carrière d’Henry vacille, celle d’Ann explose. À l’arrivée de leur enfant, Annette, tout va changer. Film d’ouverture et prix de la mise en scène l’été dernier à Cannes, Annette s’ouvre sur une scène mémorable où sont célébrés tout à la fois la comédie musicale, l’amour de l’art et le cinéma sur grand écran.

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2. Nulle trace

Simon Lavoie

Québec

Il est rare qu’un film québécois ouvre un festival à l’étranger. C’est ce qu’a réussi Simon Lavoie avec Nulle trace, film d’ouverture de Slamdance, festival de films indépendants et de créateurs émergents. Et pour cause ! Nulle trace traite d’un sujet très sérieux dans une mise en scène dépouillée et avec une proposition photographique hors norme. Dans un futur proche où l’humanité a été décimée par une guerre, une femme solitaire vit de petits trafics. Un jour, sa route croise celle d’une jeune femme très pieuse et essayant de protéger son bébé naissant. En dépit de tout ce qui les sépare, elles vont s’unir pour survivre. La lumière intérieure des deux actrices, Monique Gosselin et Nathalie Doummar, éclaire l’ensemble. Du grand art.

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3. Il était une fois dans l’Est

Larissa Sadilova

Russie

Encore de nos jours, plusieurs films issus de la Russie portent des réminiscences de l’ère soviétique. Cela se traduit en des œuvres singulières aux textures uniques, où s’entremêlent l’ancien et le moderne dans une osmose esthétique renversante. C’est exactement le cas avec le septième film de Larissa Sadilova, présenté à Cannes (Un certain regard) en 2019 et au Québec cette année. Dans le décor délicieusement suranné de la ruralité russe, Egor, camionneur, et Anna, tricoteuse, sont amants. La découverte de leur adultère provoque des remous, mais avec une certaine retenue. L’histoire est traversée de mélancolie, de douceur, de langueur. Le personnage d’Anna (Kristina Schneider) est absolument lumineux. Ce film est une perle.

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4. Judas and the Black Messiah

Shaka King

États-Unis

Les mouvements favorables à la diversité ont eu une incidence certaine sur le 7e art. Gagnant de deux Oscars, Judas and the Black Messiah en constitue un bon exemple. Les artistes noirs américains se réapproprient leur histoire. Et ils l’abordent de façon frontale, sans compromis et sans cliché. Campée à Chicago à la fin des années 1960, l’histoire est celle de Fred Hampton (Daniel Kaluuya), leader du parti Black Panther en Illinois. Trahi par un de ses membres, Bill O’Neal (LaKeith Stanfield), Hampton sera assassiné par le FBI. Il avait 21 ans. L’impact de cette histoire nous reste en mémoire des mois après avoir vu le film.

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5. The Velvet Underground

Todd Haynes

États-Unis

De tous les nombreux documentaires vus en 2021, The Velvet Underground, de Todd Haynes, grimpe, assez aisément, sur la plus haute marche du podium. Présenté hors compétition à Cannes, ce film raconte de façon chronologique, mais dans une mise en scène brillante, le parcours de ce groupe de rock dont l’influence sur plusieurs autres courants fait encore consensus aujourd’hui. Non seulement y entend-on les principaux acteurs (John Cale, Lou Reed, Nico) en entrevue ou en images d’archives pour ceux qui sont morts, mais encore la parole est donnée à de nombreuses personnes ayant vécu dans l’orbite de la formation. L’ensemble est tout à la fois trash, hallucinant, parfois choquant, toujours envoûtant.

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6. Dune

Denis Villeneuve

États-Unis

A-t-on besoin de présenter le dernier opus du cinéaste Denis Villeneuve ? Son adaptation du roman de science-fiction de Frank Herbert a fait date au moment de sa présentation à la Mostra de Venise, en septembre. Timothée Chalamet et Rebecca Ferguson mènent le bal dans cette histoire de la famille Atréides, dont le fils du duc, Paul (Chalamet), se rend sur la planète Arrakis (Dune) pour reprendre le contrôle de l’Épice, une ressource naturelle aux précieux pouvoirs convoitée par toutes les factions de l’univers. Ce film à grand déploiement se démarque avec une mise en scène somptueuse, aux combats spectaculaires, mais sans jamais tomber dans l’excès, et des plans magnifiques dans des déserts aux mille dangers. On attend la suite avec impatience.

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7. Chers camarades !

Andrei Konchalovsky

Russie

Le cinéaste russe Andrei Konchalovsky a fait le bon choix de tourner en noir et blanc pour relater les évènements de cette histoire vraie survenue en 1962 dans la ville de Novotcherkassk, dans le sud de la Russie. Excédés de leurs conditions – pitoyables – de vie, des ouvriers se mettent en grève contre l’État. La répression fait 26 morts et des dizaines de blessés. Très proche du régime soviétique, Lyudmila Danilovna (Yuliya Vysotskaya) tente soudainement d’en contourner les règles pour protéger sa fille faisant partie des contestataires. Les nombreux plans extérieurs sont d’une incroyable force narrative. Et le film fait la démonstration, si cela est encore nécessaire, que l’intérieur d’une voiture est un lieu très cinématographique !

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8. La contemplation du mystère

Albéric Aurtenèche

Québec

Pour un premier long métrage, Albéric Aurtenèche frappe dans le mille avec cette proposition singulière et un récit qui se décline dans un milieu rarement exploré et exposé au cinéma québécois : la chasse. À la suite de la mort de son père, Éloi Cournoyer (Emmanuel Schwartz), un indécrottable urbain, est invité à rejoindre les rangs d’un ordre mystique voué à défendre les activités de la chasse. Mystères, hallucinations, fantastique et étranges rituels se bousculent dans ce récit aux accents mythologiques campé dans une inquiétante forêt. Avec Sarah-Jeanne Labrosse et Gilles Renaud.

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9. The Dig

Simon Stone

Royaume-Uni

En cette période de l’année, The Dig est un film à regarder enfoui sous une couverture de laine en buvant un chocolat chaud. Inspiré d’une histoire vraie et campé dans la campagne anglaise à la veille de la Seconde Guerre mondiale, The Dig est le récit de Basil Brown (Ralph Fiennes), invité à faire des fouilles sur le terrain d’Edith Pretty (Carey Mulligan), une riche propriétaire atteinte d’une maladie incurable. Alors que plusieurs histoires parallèles se développent autour de lui, Basil fait une découverte archéologique majeure, celle du bateau de Sutton Hoo. La direction photo de ce film est exceptionnelle. Une histoire émouvante sans jamais verser dans la guimauve.

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10. Les grandes claques

Annie St-Pierre

Québec

Comme chaque année, le cursus des courts métrages québécois est de grande qualité. Dès le mois de janvier à Sundance, Annie St-Pierre a donné le ton avec Les grandes claques, puissante histoire de Noël dans laquelle Julie (Lilou Roy-Lanouette), une gamine de 7 ans, tend la main à son père Denis (Steve Laplante), au bord du naufrage intérieur. Le film, maintenant inscrit sur la courte liste des Oscars, a fait le tour de monde, récoltant de nombreux prix. D’autres courts métrages québécois ont été remarqués en 2021 : La traversée, d’Ève Saint-Louis, Y’a pas d’heure pour les femmes, de Sarra El Abed, Le danger en face, d’Alexis Chartrand, Frimas, de Marianne Farley (aussi inscrit sur la courte liste), Faraway, d’Aziz Zoromba…

On peut voir le film (et d’autres courts métrages québécois) sur le site du New Yorker (avec des sous-titres en anglais). L’article du New Yorker consacré au film d’Annie St-Pierre s’intitule The First Christmas Following a Divorce. En anglais, Les grandes claques s’intitule Like the Ones I Used to Know.

Consultez le site du New Yorker