Avec la fermeture soudaine de la salle de l’Impérial, la 34édition du festival montréalais Image+Nation de films LGBTQ+, qui se tient du 18 au 28 novembre, s’est efficacement déplacée en ligne où les cinéphiles peuvent découvrir une soixantaine de longs et courts métrages, documentaires et séries. Des films dont beaucoup proviennent de pays d’où émanent de nouvelles voix pertinentes.

« On fait notre possible pour trouver des salles compte tenu des circonstances, dit Charlie Boudreau, directrice exécutive d’Image+Nation. Le film d’ouverture, Wildhood, est diffusé [ce jeudi soir] au Cinéma du Musée. Mais notre plateforme internet est super efficace. Notre programmation y est entièrement disponible, avec des billets à l’unité, des forfaits et des passes pour ceux qui veulent visionner des films comme des fous ! »

On aurait pu penser que la pandémie freinerait la production de films LGBTQ+. Que nenni ! La plupart des films présentés sont sortis cette année. Et portent sur une multitude de thèmes. L’amour, bien sûr, mais aussi la découverte de soi, l’immigration, le polyamour, l’intersexuation, la vieillesse, la résilience ou les différences culturelles. « J’ai rarement vu une telle gamme de films aussi accomplis », dit Charlie Boudreau.

La Presse a visionné un grand nombre de films. Les expériences cinématographiques sont variées. Nous vous faisons part de nos coups de cœur, mais d’autres films valent la peine.

Tel que The Swimmer, un film israélien sur un nageur gai pris entre sa rage de vaincre et ses élans envers un de ses camarades candidats aux Jeux olympiques. Ou encore Te llevo conmigo (I Carry You With Me), sur le désir d’immigration de bien des gais mexicains aux États-Unis.

Les films lesbiens proviennent de voix émergentes, soit de pays d’où sortent ordinairement bien peu de films LGBTQ+. Par exemple, The Hill Where Lionesses Roar, du Kosovo, marque une société qui change. Luàna Bajrami y décrit une jeunesse en quête de nouvelles sensations. Ou encore Celts, de Serbie, illustrant, là aussi, un pays qui avance, malgré la guerre, puisque l’histoire se déroule à Belgrade pendant le conflit de Bosnie-Herzégovine. Des films réalisés par des jeunes femmes qui sont de nouvelles voix pertinentes du cinéma international.

Pour les amateurs de bande dessinée, ne manquez pas No Straight Lines (The Rise of Queer Comics). Une histoire de la BD queer bien faite. À voir aussi, le documentaire Yes I Am – The Ric Weiland Story, sur la bienfaisance de l’ingénieur en informatique Ric Weiland, un des premiers associés de Bill Gates à Microsoft, qui a donné 165 millions US aux organismes LGBTQ+ durant sa vie, notamment pour la lutte contre le sida.

Parmi les films en espagnol, le documentaire Sediments aborde la question des trans en Espagne. Cinq femmes trans d’âges différents accompagnent une amie dans sa décision de subir l’opération chirurgicale qui changera sa vie. Un angle intéressant sur ce thème du changement de sexe.

Consultez le site du festival

Nos cinq coups de cœur

Wildhood, de Bretten Hannam (Canada), 2021

Le film d’ouverture, présenté ce jeudi à 19 h, est Wildhood, du réalisateur micmac bispirituel Bretten Hannam, qui traite de l’homosexualité chez les autochtones et où il est question de relations entre deux ados bispirituels micmacs de Nouvelle-Écosse. Link, battu par son père, qui fugue avec son petit frère à la recherche de sa mère, et Pasmay, qui tombe sous son charme. Un long métrage charmant avec de jeunes acteurs doués et très crédibles. Les deux comédiens principaux seront présents au Cinéma du Musée, ce jeudi soir.

Beyto, de Gitta Gsell (Suisse), 2021

Beyto (joué par Burak Ates) est turc. Il vit avec ses parents en Suisse. Doué pour les études et le sport, il est gai et ses parents sont très traditionnels. Quand ils apprennent qu’il a embrassé un garçon suisse durant le défilé de la Fierté local, c’est le drame. Le film traite avec doigté de la difficulté de vivre la modernité quand les racines culturelles et religieuses sont solidement implantées.

Mascarpone, d’Alessandro Guida et Matteo Pilati (Italie), 2021

Véritable coup de cœur du festival, voici un film à la fois drôle et inspirant sur Antonio, un jeune Romain qui voit son mari, avec qui il vit depuis 12 ans, le quitter pour un autre homme. Déprimé, il loue une chambre chez un gai libertin grâce auquel il va partir en quête de nouvelles rencontres. Une vie débridée qu’il doit concilier avec son amour pour la pâtisserie. Un feel-good movie avec des acteurs superbes.

Wet Sand, d’Elene Naveriani (Géorgie/Suisse), 2021

Un coin de Géorgie désolé, délabré. Des villageois aux préjugés tenaces. Un marin qui meurt et dont le passé resurgit. Des relations amoureuses tues. Des traditions décapées par les évènements. Ce film lent comme l’ennui, et puissant comme la mer Noire, est touchant et illustre, lui aussi, combien le monde change, même dans les endroits les plus reculés. Mais ça prend du courage pour confronter les habitudes et des sacrifices.

Firebird, de Peeter Rebane (Estonie/États-Unis), 2021

Inspiré d’une histoire vraie, Firebird raconte la relation entretenue entre un séduisant capitaine de l’armée de l’air, Roman (Oleg Zagorodnii), et un jeune soldat, Serguei (Tom Prior), qui fait son service militaire sur une base de l’armée dans l’Estonie des années 1970, alors occupée par les Soviétiques. Une liaison torride et clandestine, non conforme aux pratiques imposées par les Russes, l’homosexualité étant sévèrement condamnée par cinq ans de travaux forcés jusqu’en 1993…