Il y a bien des années, Chris Pine avait refusé d’embarquer dans l’aventure de Wonder Woman. Un simple repas avec Patty Jenkins, qui venait d’être recrutée pour ce projet, l’a convaincu de changer d’idée.

La réalisatrice-scénariste de 49 ans a bien souvent persuadé des gens de changer leur fusil d’épaule. Aujourd’hui, elle figure sur la liste « A » des producteurs qui n’hésitent pas à lui confier des films à grand budget, ouvrant la voie à ses consœurs. Bientôt, Jenkins deviendra la première réalisatrice à tourner un film de la série Star Wars.

Ses acteurs sont profondément impressionnés par elle.

« Elle incarne exactement ce que doit être un bon réalisateur, selon moi. On doit être, d’une part, le général Patton. On doit avoir un esprit de décision, être clair, être un bon leader. On doit accomplir plusieurs tâches, avance Chris Pine. Et il faut garder son calme, être attentif. On doit être en mesure d’observer ses acteurs afin de savoir en tirer le meilleur parti. Elle a une capacité sans égal à bien des égards. »

Pedro Pascal s’émerveille de la sincérité sans ironie de Jenkins. Selon lui, c’est cela qui distingue les deux films Wonder Woman des autres longs métrages de superhéros.

« Sa narration est toujours intègre et riche, qu’elle tourne pour le cinéma ou la télévision, une production indépendante ou un gros budget. C’est toujours optimal sur le plan de la performance. Elle ne s’en excuse pas, dit-il. Elle ne perd pas son temps à vouloir être ironique ou trop cool. Cette sorte d’honnêteté viscérale est franchement sous-estimée. »

Prouver sa valeur

Malgré les éloges et les récompenses, Patty Jenkins doit encore prouver sa valeur. En 2017, Wonder Woman est devenu le film le plus rentable jamais réalisé par une femme, totalisant des recettes de 821 millions dans le monde entier. Ceux qui doutaient de la pertinence d’un film de superhéros féminin ou qui remettaient en cause les réalisatrices ont été confondus. Si elle songeait à une suite, elle ne s’est engagée dans le projet que lorsque les producteurs lui ont promis une forte hausse de salaire. Elle touchera de 7 à 9 millions pour Wonder Woman 1984, une somme encore jamais consentie à une réalisatrice.

« Je n’ai jamais été quelqu’un qui parle d’argent. Je n’ai jamais pensé à me retrouver dans une telle situation, raconte-t-elle. Cependant, le film était extrêmement réussi et je savais que je n’étais pas payé à égalité avec mes pairs. C’est donc devenu quelque chose de plus important que ma petite personne. Si je ne le fais pas, qui va le faire ? C’était à la fois une question d’affaire personnelle et une sorte de devoir. »

Patty Jenkins a contribué à ouvrir la voie à d’autres réalisatrices qui la considèrent comme un mentor. Gina Prince-Bythewood l’a rencontrée à quelques reprises avant le tournage de son grand film d’action The Old Guard.

« Elle a été très utile, souligne-t-elle. Ce qu’elle est parvenue à réussir malgré la pression représente un exemple pour moi. Avoir tourné un si bon film, cela a complètement changé la donne. Cela a complètement ouvert la porte à celles d’entre nous qui avons eu des films à sortir cette année. »

Et 2020 marque l’année où les femmes se sont taillé une plus grande place dans les grosses productions avec la sortie de Wonder Woman 1984, de The Old Guard, de Birds of Prey de Cathy Yan, de Mulan de Niki Caro, de Black Widow de Cate Shortland et Eternals de Chloé Zhao. Si seul Birds of Prey a pu bénéficier d’une diffusion traditionnelle avant l’arrivée de la pandémie, les autres ont été plutôt disponibles en ligne ou en vidéo sur demande.

Wonder Woman 1984 profitera d’une distribution hybride puisqu’il sera projeté dans certaines salles. Mais les sorties de Black Widow et Eternals ont été repoussées en 2021.

Malgré tout, Patty Jenkins s’enthousiasme du changement radical qui semble se produire à Hollywood. Malgré la pandémie, 2020 a prouvé qu’elle n’était pas un cas isolé.

« Aucune femme avant moi n’avait tourné un film de cette ampleur. Et aujourd’hui, il y a en cinq qui suivent mon exemple. Cette idée est incroyable, soutient-elle. De toute évidence, ces réalisatrices étaient prêtes et attendaient leur chance. »