Privés des nombreux cinéphiles qui remplissent habituellement leurs salles, les cinémas québécois subissent toujours les contrecoups de cette pandémie et recevront une aide additionnelle de 4,6 millions, annoncera ce jeudi la ministre de la Culture et des Communications, Nathalie Roy.

Les salles de cinéma à bout de souffle réclament une aide additionnelle depuis plusieurs mois.

Québec accorde donc une somme de 4,6 millions visant à soutenir les salles de cinéma commerciales de propriété québécoise qui peinent à sortir la tête de l’eau. Cette aide supplémentaire s’ajoute aux mesures déjà existantes, dans le cadre du Plan de relance économique du milieu culturel.

Après quelques mois de discussions, Éric Bouchard — président de la Corporation des salles de cinéma du Québec — est heureux du dénouement. « Ça nous donne de l’oxygène. Au-delà du fait qu’on est des cinémas, on est des entreprises. [Le montant] ne compense pas pleinement les pertes qu’on a eues, mais on en avait grandement besoin de cette bouffée d’air. »

La décision arbitraire de fermer les cinémas est politique plus que scientifique, tranche Vincent Guzzo, propriétaire des Cinémas Guzzo.

« Quand on rouvrira, les cinéphiles doivent s’en rappeler. On essaye de nous faire croire qu’aller au cinéma c’est mettre des vies en danger, mais la science ne le prouve pas. »

L’aide est appréciée et vient en partie réparer les dégâts, nuance-t-il. « Quand un gouvernement vient dédommager, ce n’est jamais pour remplacer le manque à gagner d’une entreprise, mais c’est davantage pour essayer d’éponger le volet perte. Je ne m’attendais pas à recevoir un milliard, car on n’a pas perdu un milliard. »

« Tout ce que je peux dire, c’est enfin ! C’est un soulagement, c’est certain, même si on aurait aimé plus. Avec le vaccin, on voit enfin la lumière au bout du tunnel, mais cette lumière est encore faible pour les propriétaires de salles de cinéma », explique Mario Fortin, président-directeur général du Cinéma Beaubien, du Cinéma du Parc et du Cinéma du Musée.

La fermeture prolongée des salles a beaucoup affecté les grandes chaînes et les plus petits joueurs, aux prises avec des frais fixes et des employés qui se sont réorientés durant la pandémie. « Nous allons retrouver du personnel, mais c’est certain qu’ils ne reviendront pas tous à la réouverture », souligne M. Fortin.

Il salue la mesure visant à encourager la diffusion de contenu québécois. « C’est la plus grande part de notre catalogue. Ce volet va nous avantager. Pour d’autres cinémas, ça va les pousser à présenter plus de films d’ici. » Mais au final, c’est le client qui décide ce qu’il veut voir, rappelle toutefois Mario Fortin.

Lueur d’espoir

L’aide prend la forme d’un appel de projets lancé par la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC), société d’État. Ces subventions visent à combler le manque à gagner en matière de liquidités causé par la fermeture des salles de cinéma ou le ralentissement des activités lié à la COVID-19.

On souhaite également maintenir les établissements qui diffusent du cinéma québécois sur leurs écrans.

D’ailleurs, une bonification allant jusqu’à 20 % de l’aide financière pourrait s’appliquer pour les exploitants de salles de cinéma si leur taux de diffusion de films québécois a augmenté en 2020 comparativement à l’année précédente.

On dénombre à travers la province 76 établissements — 469 écrans au total — qui pourraient bénéficier de ces subventions. Notons que seules les entreprises québécoises qui exploitent une ou plusieurs salles de cinéma commerciales détenues en totalité par des intérêts québécois sont admissibles au programme.

Le montant de l’aide financière atteint un maximum de 16 000 $ par écran pour un établissement de moins de 10 écrans, 150 000 $ par établissement de 10 écrans et plus et 400 000 $ par chaîne de cinémas.

L’aide sera accordée en deux versements.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

La ministre de la Culture et des Communications, Nathalie Roy

En attendant la réouverture sécuritaire des salles de cinéma, notre gouvernement a voulu aider nos grands écrans à travers le Québec, afin que les citoyens puissent y découvrir les œuvres cinématographiques des cinéastes québécois lorsque leurs portes rouvriront à nouveau. J’ai bon espoir de voir la lumière rejaillir sur nos écrans en 2021, plus tôt que tard.

Extrait du communiqué de presse de la ministre Nathalie Roy

Relance et pandémie

Le Plan de relance économique du milieu culturel contient une enveloppe de 450 millions. Il est composé d’une série de mesures porteuses pour stimuler la création artistique, relancer la production de contenus culturels québécois et permettre au milieu de s’adapter aux nouvelles façons d’aller à la rencontre du public, dans le contexte de la pandémie qui sévit actuellement.

Rappelons que le gouvernement s’était engagé en octobre dernier à rembourser 75 % des revenus des billetteries jusqu’en mars 2021.

L’annonce ne se limitait pas aux salles de cinéma, mais touchait aussi les arts de la scène, la musique, les variétés et la littérature.

Les propriétaires de salles de cinéma et les musées privés en zone rouge ont également bénéficié des mesures d’aide réservées aux restaurants et aux bars. Québec s’engageait ainsi à couvrir les frais fixes de ces commerces pour le mois d’octobre, jusqu’à un maximum de 15 000 $.

Éric Bouchard demeure convaincu que les nombreux cinéphiles seront au rendez-vous dès la réouverture. « Les gens s’ennuient de leurs cinémas. Ils viendront en grand nombre et on aura une programmation riche comme c’est pas possible d’ici là. On passera de perdants à gagnants. »