Invité à donner une leçon de cinéma virtuelle par le Festival international du film de Shanghai, Denis Villeneuve a fait le point sur Dune, dont la date de sortie est toujours fixée au 18 décembre en Amérique du Nord. Dans une entrevue de près d’une heure menée par Tanya Lapointe, mise en ligne sur YouTube par le compte Secrets of Dune, le cinéaste québécois a aussi évoqué son cheminement.

Installé dans son appartement de Montréal, le réalisateur de Blade Runner 2049 a commencé par expliquer l’effet qu’a eu la pandémie sur la postproduction de son adaptation du célèbre roman de Frank Herbert, non seulement sur le plan de l’échéancier, mais aussi sur le plan de son propre travail.

« À l’étape du montage, j’avais déjà l’intention de tourner quelques éléments supplémentaires plus tard, a-t-il révélé. La pandémie est survenue juste au moment où je m’apprêtais à les tourner. Mon plan de travail a complètement été bousillé, et nous avons pris du retard. On s’engage maintenant dans un sprint pour terminer le film à temps, mais nous avons l’autorisation pour tourner dans quelques semaines. »

Confiné dans la métropole québécoise, Denis Villeneuve a dû travailler les effets visuels et le montage de Dune à distance, loin de son équipe, établie à Los Angeles.

« Pour les effets visuels, c’est relativement facile de travailler à distance. Pour le montage, ça l’est moins. Je me suis rendu compte à quel point — et c’est une grande leçon — monter un film s’apparente à jouer de la musique avec quelqu’un », a affirmé le réalisateur.

L’interaction humaine, spontanée, avec un monteur est essentielle, d’autant qu’il joue aussi le rôle de psychiatre ! C’est lui [Joe Walker] qui gère mon anxiété, mes craintes et mes attaques de panique, tout autant que mes joies. À mes yeux, l’étape du montage est la plus importante dans la fabrication d’un film. En tant qu’artiste, je trouve ça douloureux de ne pas être près de celui avec qui je monte.

Denis Villeneuve

« C’est la même chose pour Hans Zimmer [le compositeur de la trame musicale]. Ça relève de l’ordre du ressenti », a continué Denis Villeneuve.

Fan de Christopher Nolan

Affichant une admiration sans bornes pour son collègue Christopher Nolan (« je suis probablement son plus grand fan sur la planète, a-t-il dit), le réalisateur d’Incendies a aussi parlé des cinéastes qui l’ont influencé, notamment les pionniers Pierre Perrault et Michel Brault. « Ils sont toujours présents dans mon esprit quand je travaille, même s’ils n’aimeraient probablement pas mes films. Mon cinéma n’a rien à voir avec le leur, mais ils ont eu un impact profond sur moi. » Il a aussi tenu à rendre hommage à deux directeurs photo : André Turpin et Roger Deakins.

Retraçant son parcours, Denis Villeneuve y est aussi allé d’une confidence. « Je vais dire quelque chose à mes amis chinois que je crois n’avoir jamais révélé parce que c’est un peu gênant. En vérité, j’ai commencé à m’imaginer réaliser des films dès l’enfance pour contrer mon angoisse », a-t-il avoué.

J’étais un garçon très anxieux, j’avais très peur du monde. Quand j’allais me coucher, la seule façon pour moi de m’endormir était d’imaginer des histoires dans ma tête et de créer d’autres univers. C’est là que je me suis rendu compte que d’inventer des histoires pouvait m’aider dans ma relation avec le monde.

Denis Villeneuve

La poésie reste, selon lui, la composante la plus importante d’un grand film. « On va au cinéma pour être ému par la poésie d’une image, soutient-il. Quand des images d’un film nous viennent à l’esprit, c’est parce qu’elles se sont imprimées de façon profonde, même si rien de ça n’est tangible. C’est ce qui fait la beauté du cinéma. En tant que cinéaste, tu cherches à créer des moments de cette nature. »

> Visionnez la leçon de cinéma de Denis Villeneuve (en anglais)