Disney fait des efforts remarqués pour mieux représenter la diversité du monde dans lequel on vit. La multinationale maintiendra le cap en 2020, même si chacune de ses décisions est scrutée à la loupe et soulève régulièrement des critiques. 

La version en prises de vues réelles du film Mulan donnera une vraie visibilité à des comédiens d’origine chinoise. Les studios Marvel, qui appartiennent à Disney, ne seront pas en reste avec le film The Eternals, dont la distribution de haut calibre mettra de l’avant des femmes et des hommes aux origines et aux pouvoirs surnaturels variés. Quant à Pixar (autre filiale de l’empire de Mickey), son film d’animation Soul aura un personnage principal afro-américain. Une première pour le réputé studio.

Ces choix sont parfois critiqués. L’été dernier, l’annonce que le rôle de la sirène Ariel, dans la version en prises de vues réelles du classique d’animation The Little Mermaid, avait été attribué à Halle Bailey, jeune actrice et chanteuse afro-américaine, n’a pas été favorablement accueillie par tous. Outrés que la princesse ne soit pas recréée comme dans le film d’animation de 1989 (blanche avec une abondante chevelure rousse), les fans déçus se sont exprimés avec le mot-clic #notmyariel.

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Halle Bailey, photographiée en juillet à la première mondiale du film The Lion King, de Disney, a été choisie pour interpréter le rôle d’Ariel dans la version en prises de vues réelles du classique d’animation The Little Mermaid.

Traduire la réalité

Au début du mois, la multinationale a encaissé d’autres types de reproches lorsqu’elle a révélé qu’elle entamait la production d’une série télévisée dérivée du film Aladdin, lancé en mars 2019. La série, destinée à sa plateforme de diffusion en continu Disney+, devrait mettre en vedette le prince Anders, interprété par Billy Magnussen. Or, cette fois-ci, les propos défavorables ont fusé pour les raisons inverses. Le prince Anders, qui n’apparaît que quelques minutes dans le long métrage, est le seul personnage à la peau blanche dans le film. 

L’annonce qu’il a obtenu sa propre série est survenue quelques jours après que l’acteur canadien d’origine égyptienne Mena Massoud, qui incarne Aladdin, eut déploré n’avoir fait aucune audition depuis la sortie du long métrage, dans une entrevue accordée au Daily Beast. Sa prestation ne lui a pour l’instant ouvert aucune porte.

> Lisez l'article de The Daily Beast (en anglais)

En mai 2019, Mena Massoud a abordé cet important enjeu lors d’une conférence de presse organisée à Beverly Hills, avant le lancement de la nouvelle version d’Aladdin. Will Smith, dans le rôle du Génie, est le seul acteur connu de la distribution. Les autres rôles ont été attribués à la suite d’un processus qui s’est échelonné sur un an. Environ 2000 acteurs ont passé des auditions un peu partout, de l’Angleterre à l’Égypte en passant par Abou Dhabi et l’Inde, afin de découvrir des nouveaux venus qui incarnent la diversité du Moyen-Orient.

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Mena Massoud à la première mondiale du film Aladdin, le 21 mai 2019, à Los Angeles 

Je suis extrêmement fier de la représentation ethnique, la plus diversifiée dans un film de Disney. Je suis excité que des petites filles et des petits garçons puissent voir des gens qui leur ressemblent à l’écran. Cela m’a manqué en grandissant.

Mena Massoud, en mai 2019

En réalisant la nouvelle version du film d’animation The Lion King, sorti en juillet 2019, Disney a de nouveau cherché à relever le pari de la diversité culturelle. Contrairement à la distribution du classique d’animation, datant de 1994, peu de rôles sont tenus par des artistes blancs. 

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En réalisant la nouvelle version du film d’animation The Lion King, sorti en juillet 2019, Disney a cherché à relever le pari de la diversité culturelle.

« L’action étant basée en Afrique, la diversité culturelle de la distribution va de soi », a indiqué l’acteur anglo-nigérian Chiwetel Ejiofor, lors d’une entrevue réalisée juste avant le lancement du film, à Los Angeles. Il a repris le rôle du cruel oncle Scar, prêt à tout pour devenir roi, interprété par Jeremy Irons dans la version originale. « Juste le fait d’en parler montre que cette question n’est pas réglée », a-t-il poursuivi.

Disney a aussi prêté une grande attention à la composition de la distribution dans la version en prises de vues réelles du film Mulan, qui prendra l’affiche en mars prochain. Dans la bande-annonce, l’actrice et chanteuse sino-américaine Liu Yifei est crédible dans le rôle-titre. Des artistes hyper connus en Chine, qui ont percé dans le cinéma occidental, ont l’occasion de se démarquer, comme l’expert en arts martiaux Jet Li (trilogie The Expandables), dans le rôle de l’empereur chinois, et l’actrice Gong Li (Memoirs of a Geisha), qui prendra les traits d’une méchante sorcière.

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L’actrice Gong Li prendra les traits d’une méchante sorcière dans la version en prises de vues réelles du film Mulan.

La multinationale montre une nette volonté de s’éloigner des stéréotypes, flagrants dans le classique d’animation de 1998 (avec les feux d’artifice, les lanternes, le dragon miniature Mushu), pour se rapprocher davantage de la légende de l’héroïne chinoise Hua Mulan, qui s’est déguisée en guerrier et s’est enrôlée dans l’armée impériale afin de sauver l’honneur de sa famille (et la vie de son père), de 432 à 448.

Pour la télé aussi

Ce désir d’inclusion et cette ouverture à la différence ne se limitent pas aux films réalisés pour le grand écran. C’est évident en regardant la version en prises de vues réelles du film Lady and the Tramp (La belle et le clochard), diffusée sur la plateforme de diffusion en continu Disney+. Le classique d’animation, qui date de 1955, a été mis à jour sur plus d’un point.

L’actrice afro-américaine Tessa Thompson (Men in Black : International, Thor : Raganorok) prête sa voix à la chienne Lady, qui vit au sein d’une famille interraciale. Sa maîtresse Darling (l’actrice mulâtre Kiersey Clemons) et son maître Jim Dear (Thomas Mann, qui est Blanc) évoluent dans un univers où la couleur de la peau importe peu.

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Yvette Nicole Brown interprète le rôle de la tante Sarah, dans la version en prises de vues réelles du film Lady and the Tramp (La belle et le clochard), diffusée sur la plateforme de diffusion en continu Disney+. Elle séjourne chez sa nièce avec ses deux chats siamois et est mécontente de garder la chienne Lady.

« Nous n’en avons jamais parlé pendant le tournage, a révélé l’actrice afro-américaine Yvette Nicole Brown, qui interprète le rôle de la tante Sarah, lors d’une entrevue téléphonique. Cela montre que les choses changent. Disney a permis à tous de faire partie de cette nouvelle version. Je suis touchée parce que ce film se passe en 1908. Or, en 1908, en Amérique, on n’aurait jamais vu une telle situation. Et si cela avait été le cas, cela aurait fait beaucoup jaser. Que cela puisse exister, sans que personne ne lève un sourcil, c’est une belle chose que Disney fait. » 

C’est l’occasion de rappeler que nous sommes tous différents. Nous ne nous ressemblons pas, mais nos cœurs sont pareils.

Yvette Nicole Brown

Tante Sarah, qui séjourne chez sa nièce avec ses deux chats siamois, a beaucoup de caractère dans la version en prises de vues réelles. C’est toujours à cause d’elle que la chienne Lady s’enfuit et retrouve le chien de ruelle, qui finira par la charmer. « J’ai essayé de l’humaniser, explique Yvette Nicole Brown. Au fond, elle est déçue de ne pas passer du temps avec la fille de sa nièce. Elle voulait garder le bébé. Elle ne voulait pas garder la chienne. »

La fameuse chanson qu’entonnent les chats siamois en détruisant la maison avec leurs griffes acérées a été remplacée par une autre. « Elle a été créée à une autre époque, indique Yvette Nicole Brown. Elle manquait de sensibilité envers les personnes d’origine asiatique. Quand un groupe marginalisé te dit qu’il est offensé, tu dois le croire et t’ajuster, même si tu n’es pas nécessairement d’accord. C’est ce que Disney a fait. J’applaudis cela. Une autre chanson tout aussi bonne a été créée. »