(Paris) Films hués, seins dénudés et poing rageur… Retour sur les scandales qui ont émaillé l’histoire du Festival de Cannes, agité vendredi par le film radical et cru d’Abellatif Kechiche, Mektoub My Love : Intermezzo.

– 1939 : La première édition du festival aurait dû avoir lieu du 1er au 20 septembre. Elle est annulée pour cause de guerre.

– 1954 : Robert Mitchum est photographié avec une nymphette aux seins nus, Simone Silva. La starlette doit faire ses valises.

– 1956 : Le documentaire d’Alain Resnais sur les camps de concentration Nuit et brouillard, qui confronte l’Allemagne à son passé nazi, est retiré de la sélection sur demande de Berlin, afin de ne pas porter atteinte aux relations franco-allemandes.

– 1960 : L’Avventura de Michelangelo Antonioni déstabilise les cinéphiles en faisant éclater les conventions du film policier. Le long métrage reçoit le Prix du jury, mais devant le concert de sifflets que le film provoque, Monica Vitti fond en larmes.

Condamné par le Vatican et hué par le public, La dolce vita de Federico Fellini reçoit la Palme d’or.

– 1968 : Les soubresauts de mai gagnent la Croisette. Des cinéastes contestataires, accrochés au rideau, arrêtent une projection, des membres du jury démissionnent, des réalisateurs retirent leur film de la compétition. Le festival est interrompu avant la fin.

– 1973 : Le festival a du mal à digérer La grande bouffe de Marco Ferreri et La maman et la putain de Jean Eustache.

– 1979 : Françoise Sagan, présidente du jury, se fâche avec le festival qui refuse de payer sa note de téléphone et dénonce une « compétition truquée ». Selon elle, le jury a fait l’objet de « pressions » pour couronner ex aequo Le tambour de Volker Schloendorff et Apocalypse Now de Francis Ford Coppola, alors qu’une forte majorité s’était dégagée en faveur du premier.

– 1987 : Sous les sifflets de la salle, Maurice Pialat, Palme d’or pour Sous le soleil de Satan lève le poing et lance : « Si vous ne m’aimez pas, rassurez-vous, moi non plus ».

– 1992 : Sharon Stone décoiffe la Croisette avec le sulfureux Basic Instinct de Paul Verhoeven, et une scène d’interrogatoire où elle ne porte pas de culotte.

– 1994 : La remise de la Palme d’or à Quentin Tarantino pour Pulp Fiction lui vaut les huées d’une partie du public, auquel il répond par un doigt d’honneur.

– 1999 : Une mémorable bronca accueille les choix radicaux du jury présidé par le Canadien David Cronenberg : la Palme à Rosetta des frères Dardenne, trois prix à L’humanité de Bruno Dumont et un prix de consolation (mise en scène) pour Tout sur ma mère de Pedro Almodovar, chouchou des festivaliers.

– 2002 : Gaspar Noé embrase la Croisette avec Irréversible, un film démarrant par la fin et racontant une vengeance après un viol insoutenable durant dix minutes. Lors de la projection à Cannes, une vingtaine de spectateurs avaient eu des malaises.

– 2004 : Sur fond de guerre en Irak, le jury présidé par Tarantino récompense Fahrenheit 9/11, virulente charge de Michael Moore contre la politique étrangère de George W. Bush.

– 2011 : Lars von Trier, en compétition avec Melancholia, crée la polémique avec des propos ambigus sur Hitler et le nazisme. Malgré ses excuses, la direction du festival déclare le réalisateur danois persona non grata. Il reviendra à Cannes en 2018, mais hors compétition.

– 2013 : Avec La vie d’Adèle-chapitre 1 & 2, le jury décerne pour la première fois la Palme d’or à un réalisateur, Abdellatif Kechiche, et à ses actrices Léa Seydoux et Adèle Exarchopoulos. Quelques jours plus tard, le trio se déchire, lorsque les jeunes femmes dénoncent des conditions de tournage « horribles ».

– 2014 : Abel Ferrara fait le buzz, en projetant en marge du festival, Welcome to New York, inspiré librement de l’affaire du Sofitel qui a précipité la chute de Dominique Strauss-Khan. Gérard Depardieu y tient le rôle de l’ex-patron du FMI.