Le long métrage 1991 de Ricardo Trogi a été le grand gagnant du Gala Québec Cinéma, hier, remportant les prix Iris du meilleur film, de la meilleure réalisation, du vote du public et de la meilleure actrice dans un rôle de soutien, à l’issue d’un gala échevelé qui ne passera pas à l’histoire. La Bolduc de François Bouvier a remporté plusieurs prix techniques ainsi que celui de la meilleure actrice pour Debbie Lynch-White.

Drôles de dames

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Edith Cochrane et Guylaine Tremblay animaient la soirée.

Les animatrices Edith Cochrane et Guylaine Tremblay, de retour à la barre pour la troisième année de suite, n’ont pas eu la tâche facile devant une salle qui ne se déridait pas facilement. Elles sont arrivées comme des colis de cigogne, dans un numéro d’ouverture plus ou moins réussi empruntant au cirque, à la comédie musicale et aux variétés, avec quelques « blagues pas fines » bien envoyées. Elles se sont surtout distinguées dans un numéro où elles disaient se reconnaître l’une et l’autre dans des personnages de films. Elles ont été tantôt comiques, tantôt plus sobres, notamment à l’occasion du bref hommage à Jean Beaudin et à Jean-Claude Labrecque (avec qui Guylaine Tremblay, émue aux larmes, a tourné dans Contre toute espérance de Bernard Émond). Assez pour rendre ce gala enlevant ? Non, malheureusement.

Le décor criard

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Debbie Lynch-White a remporté l’Iris de la meilleure actrice pour son rôle de Mary Travers dans La Bolduc.

Les horribles draps plissés et chatoyants qui meublaient la scène, le fond d’écran jaune, vert, bleu ou rouge très vif derrière les présentateurs et lauréats. Visuellement, ce gala avait des airs rétro kitsch « vintage à l’os ». Je ne suis pas convaincu que c’était volontaire, mais je suis certain, en revanche, que ce n’était pas du meilleur goût. Dès le numéro d’ouverture, j’ai hésité entre mettre mes verres fumés ou aller fouiller dans une vieille boîte à souvenirs pour récupérer les lunettes 3D en carton « deux couleurs » qu’on trouvait dans les boîtes de céréales des années 80. J’ai plissé des yeux quand Yan Giroux a remporté le prix du meilleur premier film, pour À tous ceux qui ne me lisent pas, sur fond rose fluo, tellement c’était criard.

Une « ode à la boisson »

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Le film 1991 de Ricardo Trogi a notamment remporté le prix du public.

Depuis 2008, Ricardo Trogi distille un humour rempli d’autodérision dans des films autobiographiques. Le troisième volet de ce qui est pour l’instant une trilogie, 1991, a été le grand gagnant du Gala Québec Cinéma d’hier, remportant les prix Iris du meilleur film, de la meilleure réalisation et du public. Sur une version insupportable de Pump Up the Jam de l’orchestre maison, Trogi, incorrigible bouffon, a remercié son assistant-réalisateur, son acteur et alter ego Jean-Carl Boucher, mais aussi lu la liste des vins sur une facture de la SAQ qui l’ont inspiré dans l’écriture de ses films. Cré Ricardo… Celui que Sandrine Bisson a remercié avec verve en allant cueillir le prix de la meilleure actrice de soutien a tout de même eu quelques mots plus sérieux, en soulignant qu’il faut faire « confiance à ce que l’on est profondément ».

Un acteur d’acteurs

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Martin Dubreuil a remporté l’Iris du meilleur acteur pour le rôle du regretté poète Yves Boisvert dans À tous ceux qui ne me lisent pas.

Martin Dubreuil est un « acteur d’acteurs », comme en témoignait hier l’ovation que lui ont réservée ses pairs. « Le roi du court métrage », ainsi que l’a qualifié Edith Cochrane, a enfin été récompensé d’un prix. Dubreuil a remporté l’Iris du meilleur acteur pour le rôle du regretté poète Yves Boisvert dans le premier film de Yan Giroux, À tous ceux qui ne me lisent pas. « Faire un film sur un poète pas très connu, c’était pas mal audacieux », a-t-il dit, en espérant avoir fait justice au poète. Dubreuil était tout aussi formidable dans le rôle d’un imitateur de Charlie Chaplin en fuite aux États-Unis, dans La grande noirceur de Maxime Giroux (qui a logiquement valu le prix de la meilleure direction photo à Sara Mishara).

L’adolescence à l’honneur

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Émilie Bierre a remporté le prix de la révélation de l’année.

L’adolescence était à l’honneur dans le cinéma québécois de la dernière année. Et c’est l’adolescente Émilie Bierre qui a remporté le premier prix de la soirée, celui de la révélation de l’année, pour son rôle de Mylia, qui apprivoise les aléas du secondaire dans Une colonie de Geneviève Dulude-De Celles. « J’ai appris que c’est correct d’être différente et qu’il faut se respecter. Il faut avoir confiance en soi », a déclaré l’actrice de 15 ans, découverte dans Catimini de Nathalie Saint-Pierre, que l’on a aussi vue récemment dans Genèse de Philippe Lesage. Émilie Bierre a remercié les cinéastes québécois de confier des rôles forts, de « personnages à part entière », à de jeunes comédiens. « On a des messages à faire passer ! » Message reçu.