(Paris) Tarantino, Jarmusch, le biopic sur Elton John… Après une édition 2018 chiche en vedettes et présence américaine, les relations semblent se réchauffer entre Cannes et les studios hollywoodiens, dans un contexte de concurrence toujours vive entre festivals de cinéma.

« Que Cannes ait obtenu Rocketman (le biopic sur Elton John, présenté hors compétition) est un beau coup et une étape importante, car Paramount était historiquement un des studios les plus réticents à fournir des films au festival », explique Christian Jungen, journaliste suisse et auteur d’Hollywood in Cannes.

D’autres gros studios seront présents comme Universal, avec The Dead don’t Die de Jim Jarmusch, à la distribution allant de Bill Murray à Selena Gomez, et Warner avec la copie restaurée de Shining de Kubrick.

Sans oublier une grande figure hollywoodienne en la personne de Sylvester Stallone qui viendra montrer les premières minutes de Rambo V et une version restaurée du tout premier opus.

En présentant le cru cannois 2019, le sélectionneur, Thierry Frémaux, n’avait d’ailleurs pas manqué de souligner le soutien des studios, et de remercier Jim Gianopulos, à la tête de la Paramount (Rocketman). Ancien président de la Fox, c’est lui qui avait permis à Cannes d’accueillir Moulin rouge, en ouverture en 2001.

À l’époque, les studios amorçaient déjà un retour vers Cannes, après des années difficiles, en venant présenter de grosses productions, souvent hors compétition, comme Matrix Reloaded ou le 4e volet d’Indiana Jones.

Des films reçus parfois très froidement par la critique, comme ce fut le cas pour Da Vinci Code ou Solo, dérivé de la saga Star Wars, l’an dernier.

À sa critique parfois impitoyable, s’ajoute une difficulté supplémentaire pour Cannes : son calendrier. Se déroulant en mai, le festival est mal placé pour les Oscars (fin février), et s’est fait distancer sur ce point par Venise et Toronto, qui ont lieu en septembre, et dont la visibilité a énormément grandi auprès de producteurs et distributeurs américains, en particulier pour les films d’auteur.

Vingt-cinq ans après Pulp Fiction

Signe de cette évolution : Venise a accueilli ces dernières années Gravity, La La land, The Shape of Water et Roma, tous récompensés ensuite de l’Oscar du meilleur film et/ou réalisateur.

Si BlacKKKlansman, Grand prix 2018 et l’un des deux films américains en compétition l’an dernier, a valu à Spike Lee la toute première statuette de sa carrière, le grand succès aux Oscars d’un film cannois remonte à 2012 avec The Artist. Le film est reparti avec cinq Oscars dont celui de meilleur film, acteur et réalisateur.

Dénonçant « l’obsession généralisée pour les Oscars », Thierry Frémaux a souligné récemment, dans un entretien au Monde, que « le projet de Cannes, c’est le cinéma mondial, la mise en scène et les auteurs ».

Et sur ce point, l’édition 2019 frappe fort, avec de très grosses pointures, et notamment américaines : Terrence Malick, Jim Jarmusch et Quentin Tarantino.

La présence de ce dernier « permet à Cannes de commémorer sa propre histoire glorieuse, 25 ans après la Palme d’or de Pulp Fiction. Et le film (Once Upon a Time… in Hollywood) amène en ville des vedettes comme Brad Pitt et Leonardo DiCaprio », souligne Christian Jungen.

Malgré cette éclaircie, reste la question de Netflix, absent de la compétition officielle pour la deuxième année consécutive, après la mise en œuvre d’un règlement imposant une sortie en salle face à la fronde des exploitants français.

« À l’époque, on pensait demander (à Netflix) et obtenir que ces films-là sortent en salles […] Ils n’en sont pas encore là », pointent les organisateurs du festival, qui résistent à la plateforme de streaming, là où d’autres comme Venise accueillent à bras ouverts des films Netflix, dont Roma d’Alfonso Cuaron.

Un bras de fer qui se traduira par l’absence de la plateforme au marché du film, selon son service de presse parisien. Netflix sera là uniquement via le long métrage Wounds, présenté à la Quinzaine des réalisateurs.