Nominé aux Oscars, le documentaire Last Men in Aleppo, qui suit le travail de secouristes dans des quartiers rebelles durant la guerre en Syrie, a été projeté lundi dans la ville syrienne d'Idleb où vivent de nombreux déplacés d'Alep.

Des larmes, un silence empreint de tristesse, parfois quelques rires: le film réalisé par le Syrien Firas Fayyad a rappelé aux dizaines de spectateurs rassemblés sur le campus de l'Université d'Idleb, dans le nord-ouest du pays, «le souvenir des derniers jours difficiles» dans les quartiers tenus par les insurgés à Alep, la deuxième ville de Syrie.

«Il rappelle le souvenir des nombreuses personnes mortes devant nos yeux», souligne Mohamad Al-Chaghel, spectateur originaire de cette ville du nord syrien.

Après un siège asphyxiant et des bombardements dévastateurs, le régime du président syrien Bachar al-Assad avait repris les quartiers rebelles d'Alep le 22 décembre 2016, entraînant l'évacuation de milliers de civils et combattants.

Le documentaire produit par le réseau de militants du Aleppo Media Center (AMC), raconte, à travers la vie quotidienne et l'engagement des volontaires de la Défense civile, les «Casques blancs», cette période cruciale du conflit syrien qui marqua un des plus sérieux revers pour les opposants au régime.

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«Documenter pour les générations futures»

«Durant les bombardements, les habitants cherchaient le moindre abri tandis que les secouristes de la défense civile étaient les seuls à accourir sur les lieux, ils étaient les premiers à arriver et les derniers à partir... Nous avons voulu leur rendre hommage», raconte Fadi Halabi, un membre d'AMC.

«Nous avons essayé d'atteindre le public occidental et de documenter ce qui s'est produit pour les générations futures», ajoute-t-il.

Outre le prix du Jury au festival de Sundance le documentaire a été sélectionné en début d'année dans la catégorie «Meilleur film documentaire» pour la 90e édition des Oscars, prévue le 4 mars.

«L'accès aux Oscars est un rêve, mais ce n'est rien devant l'objectif d'obtenir la sympathie du monde pour la cause syrienne», a-t-il ajouté.

Vie et mort en une même scène

Car bien que centré sur Alep, «ce que les héros de ce film ont vécu est ce qu'ont vécu tous les Syriens», souligne le directeur de l'Institut des médias à l'Université d'Idleb, Alaa Al-Abdallah.

La province d'Idleb est la dernière à échapper entièrement au pouvoir de Damas, mais elle est soumise depuis le 25 décembre à des bombardements intensifs par les aviations syrienne et russe qui cherchent à la reconquérir.

La guerre en Syrie qui a débuté en 2011 après la répression sanglante de manifestations prodémocratie par le régime a fait plus de 340 000 morts et des millions de déplacés.

«Ce qui m'a le plus affecté, c'est la scène où l'infirmier reçoit les victimes et dit qu'il assistera à un mariage le même jour», confie avec émotion Alaa Al-Abdallah. «La vie et la mort ont été résumées ici dans une même scène».

AP

Le réalisateur de Last Men in Aleppo, Firas Fayyad.