Un monde lumineux, mais sans soleil. Une fête des Morts, mais sans tristesse. Un garçon qui rêve de musique dans une famille où la musique a été bannie.

C'est Coco, le 19e film d'animation signé Pixar, qui prendra l'affiche le 22 novembre, mais dont La Presse a eu un avant-goût lors de rencontres tenues à Toronto avec la productrice Darla K. Anderson et Adrian Molina - coscénariste et coréalisateur du projet, avec Lee Unkrich.

Ce dernier avait travaillé sur Toy Story 3 avec les deux autres. Ils furent donc parmi les premiers à avoir vent du projet qu'il rêvait de mettre en branle après : une histoire ancrée dans la culture mexicaine, en particulier sur les célébrations entourant la fête des Morts (Dia de los Muertos), qui se tiennent du 31 octobre au 2 novembre.

L'idée avait à peine été exposée qu'Adrian Molina, dont la mère est mexicaine, levait la main : « Il fallait que je participe à ce film ! Le sujet m'est extrêmement précieux. Une fois à bord, j'ai mis de moi dans tous les aspects du récit, dans la dynamique familiale, et chaque personnage possède un peu de moi », dit celui qui avait jusque-là travaillé comme artiste de storyboard (entre autres sur Ratatouille, Monsters University et Toy Story 3).

L'histoire est devenue celle de Miguel, un garçon âgé de 12 ans qui rêve de devenir musicien comme son idole, le grand Ernesto de la Cruz, victime d'un accident fatal bien avant la naissance du garçon. Or, la musique a été bannie de la famille de Miguel, car l'ancêtre a préféré l'art à sa femme et leur enfant.

Cela n'arrêtera pas le garçon, qui est proche de sa grand-mère, Mama Coco, et qui a appris « clandestinement » à jouer de la guitare. Au Dia de los Muertos, il volera celle du mythique Ernesto et sera ainsi catapulté au royaume des morts. Où il découvrira les secrets de sa famille et rencontrera ses aïeux lointains.

« Le potentiel d'un tel récit était immense, mais les défis étaient, eux aussi, très grands », résume la productrice Darla K. Anderson. Ici, elle mentionne la difficulté de trouver la manière parfaite et « festive » d'éclairer un monde sans soleil. Là, elle revient sur le devoir de traiter avec respect une célébration lourde de sens et de trouver la tonalité juste entre la gravité et la joie.

La mort comme une fête

« Parce que c'est avant tout une fête joyeuse », insiste-t-elle. La quinzaine de minutes d'images vues par La Presse sont... à cette image. Festives, drôles. Émouvantes aussi.

Ainsi, l'animation des squelettes ouvre la porte à la comédie physique. La vieille Mama Coco pourrait quant à elle n'être que sagesse, mais elle est également drôle et mordante. Miguel, lorsqu'il joue de la guitare, est pour sa part sublime. Les doigts pinçant les cordes, les yeux fermés, le corps en harmonie avec la musique - « La musique n'est pas en moi, elle EST moi ! », dira-t-il -, tout cela est d'une justesse et d'une puissance fabuleuses.

« Pour créer cette impression de réalisme, nous avons filmé un musicien pendant qu'il jouait, nous avons même placé des caméras GoPro sur sa guitare. Puis, nous avons donné cela aux animateurs. »

Le résultat est spectaculaire. Et, à première vue, n'a pas trébuché sur les deux écueils qui se sont dressés sur la route de Coco.

En 2013, Disney (maintenant propriétaire de Pixar) a en effet provoqué la controverse en tentant d'acquérir les droits des expressions « Dia de los Muertos » et « Day of the Dead » pour différentes plateformes. La communauté latino-américaine n'a pas bien réagi, accusant le géant de vouloir s'approprier sa culture.

« Ça a été une erreur très maladroite, admet Adrian Molina. Mais cela a permis le début d'une conversation sur le respect des traditions et ça a débouché sur l'instauration d'une équipe de collaborateurs culturels. » En fait entre autres partie l'artiste Lalo Alcaraz, le premier à avoir dénoncé la démarche de Disney.

Le second obstacle portait le nom de The Book of Life. Coco était sur les rails depuis une bonne année quand des informations ont commencé à filtrer sur le film du réalisateur mexicain Jorge Gutierrez. La fête des Morts en était la colonne vertébrale. « Quand le long métrage est sorti, en 2014, nous l'avons étudié pour nous assurer de ne pas marcher dans les mêmes eaux... et nous avons été soulagés : les deux histoires sont entièrement différentes », dit Darla K. Anderson.

« De toute manière, il y a assez de place dans l'univers cinématographique pour plusieurs histoires sur cette fête-là, ajoute Adrian Molina. Tout comme il y a de la place pour plus d'un film sur Noël ou l'Halloween. »

Les frais de voyage ont été payés par Walt Disney Studios.

Coco prendra l'affiche le 22 novembre.

image fournie par Walt Disney Studios

Pour créer les prouesses de Miguel à la guitare, les animateurs ont utilisé des images d'un vrai musicien.

image fournie par Walt Disney Studios

Coco est le 19e film d'animation signé Pixar.