Le feuilleton judiciaire continue. Un juge américain a rejeté lundi la demande du cinéaste franco-polonais Roman Polanski de pouvoir revenir aux États-Unis sans être menacé d'emprisonnement, quatre décennies après avoir fui le pays à la suite du viol d'une mineure.

Le juge Scott Gordon «a décidé que les demandes du prévenu ainsi que les requêtes correspondantes sont rejetées», selon une décision écrite du tribunal supérieur de Los Angeles.

Concrètement, la décision maintient le statu quo: si le réalisateur du Pianiste (2002) et de Chinatown (1974) remet les pieds sur le sol américain, il pourra être arrêté, 42 ans après les faits.

Roman Polanski est accusé d'avoir drogué puis violé une adolescente de 13 ans dans la maison de Jack Nicholson en 1977.

Il a admis une relation sexuelle après que les autres chefs d'accusation plus graves ont été abandonnés, et a passé 42 jours en détention avant d'être relâché sous caution.

Il a ensuite fui en France en 1978 et n'est jamais revenu aux États-Unis.

Par la voix de son avocat Harland Braun, qui a affirmé au tribunal de Los Angeles que le réalisateur de 83 ans avait déjà «purgé sa peine», il a fait savoir qu'il voulait revenir aux États-Unis pour mettre fin à l'affaire. Mais seulement à condition d'avoir l'assurance de ne pas être arrêté à son arrivée.

Le juge Gordon ne l'entend pas de cette oreille. Il a estimé, dans sa décision rendue lundi, qu'il n'y avait «pas de base suffisante ou convaincante pour réexaminer ces questions».

«De plus, le conseil du prévenu n'a pas présenté de preuve suffisante, crédible, acceptable ou d'arguments juridiques pour appuyer la réparation demandée», selon la décision de 13 pages.

Surtout, Scott Gordon a décidé d'écarter l'hypothèse de discussions «sur des questions sensibles concernant l'affaire Polanski jusqu'à ce qu'il ne soit présent physiquement au tribunal».

«Aucun sens» 

Il a ainsi conforté la «bonne» décision de la procureure de Los Angeles, qui refuse d'accorder un blanc-seing au cinéaste.

«Les gens ne pensent tout simplement pas qu'il est dans le meilleur intérêt de la justice de donner à une célébrité fortunée un traitement différent de celui de tout autre fugitif», avait justifié la procureure adjointe Michele Hanisee.

La décision de lundi va sans doute relancer le jeu du chat et de la souris qui dure depuis près de quatre décennies entre Roman Polanski et la justice américaine.

Le lauréat d'un Oscar avait passé deux mois en prison en Suisse, puis huit mois assigné à résidence dans son chalet à Gstaad, à la suite de son arrestation à Zurich en 2009, sur la base d'un mandat international lancé par la justice américaine.

Dans sa demande déboutée, son avocat réclamait notamment que les procureurs indiquent le temps que Polanski devrait passer en détention s'il revenait aux États-Unis et s'ils entendent requérir une telle peine.

Après la décision lundi, Harland Braun a dénoncé «une tentative de plus de la part du tribunal supérieur de Los Angeles de couvrir leur mauvaise conduite par le passé», évoquant la «corruption» du système judiciaire.

«Cela n'a aucun sens. C'est déroutant», a-t-il affirmé à l'AFP, en référence à cette décision rendue trois semaines avant une nouvelle audition prévue le 26 avril, selon Me Braun.

Cette dernière est relative à une demande de M. Braun de révéler la transcription du témoignage recueilli en 2010 de Roger Gunson, ancien procureur dans l'affaire Polanski.

Les avocats américains de M. Polanski veulent aussi faire reconnaître une décision de la Cour suprême polonaise, qui a mis fin en décembre à la demande d'extradition du cinéaste vers les États-Unis.

Le juge Michal Laskowski avait alors remarqué que la victime lui avait publiquement pardonné et que ce dernier lui a versé le dédommagement qu'elle réclamait.

AFP

Le juge Scott M. Gordon.