Depuis sa sortie le 24 février, Get Out a généré des recettes de plus de 130 millions de dollars au box-office. Personne n'avait prévu un tel succès pour ce film anxiogène, réalisé par Jordan Peele, qui dénonce le racisme. Exploration d'un phénomène.

À POINT NOMMÉ

Au-delà de la qualité du film, le succès de Get Out s'explique peut-être aussi du fait que son propos fait écho à un vrai questionnement sur le racisme. Daniel Kaluuya (Sicario de Denis Villeneuve) et Allison Williams (la série Girls) forment un jeune couple interracial qui semble filer le parfait bonheur. Présenté aux parents de la jeune fille, de blancs bourgeois d'allégeance très libérale, le jeune homme se rend pourtant vite compte du piège qui se referme sur lui, duquel même les Noirs dans l'entourage de la famille semblent soudain complices. Plus anxiogène que véritablement gore, Get Out est l'un des rares films du genre dont le succès se prolonge sur plusieurs semaines.

UNE ÈRE POST-RACIALE ?

L'idée de Get Out est venue à Jordan Peele pendant les années de présidence de Barack Obama. Dans un podcast diffusé par Buzzfeed, le réalisateur, qui signe aussi le scénario du film, expliquait son idée en ces termes : « Apparemment, nous vivons dans une ère post-raciale. Les gens disaient qu'avec Obama au pouvoir, le racisme était chose du passé, que nous n'avions plus besoin d'en parler. Au cas où vous ne le sauriez pas, oui, le racisme existe toujours. C'est ce que j'ai essayé d'évoquer à travers cette histoire. Vous croyez vraiment que le racisme n'est plus un problème ? »

QUI EST JORDAN PEELE ?

Âgé de 38 ans, Jordan Peele est le premier cinéaste afro-américain à réaliser un premier film dont les recettes dépassent les 100 millions en Amérique du Nord. Connu jusqu'ici à titre de scénariste et d'acteur, Jordan Peele a fait sa marque à la télévision, notamment grâce à Key & Peele, une série comique qu'il a élaborée avec Keegan-Michael Key (diffusée au Canada par The Comedy Network). Le cinéaste, qui a signé seul le scénario de Get Out, compte réaliser d'autres films d'horreur au coeur desquels se trouvent toujours des enjeux sociaux.

SAMUEL L. JACKSON CRÉE LA POLÉMIQUE

Lors d'une entrevue à une radio new-yorkaise, Samuel L. Jackson a créé une polémique en suggérant que les acteurs noirs britanniques - ils sont quelques-uns à obtenir des rôles aux États-Unis - ne pouvaient pas ressentir la situation des Afro-Américains de la même façon que les acteurs noirs américains. La vedette de Get Out, Daniel Kaluuya, acteur né à Londres de parents d'origine ougandaise, a répliqué en affirmant qu'il lui déplaisait d'avoir à prouver qu'il est noir. « Dans certains milieux, ma peau est trop noire, dans d'autres, pas assez, a-t-il déclaré au magazine GQ. En Ouganda, je ne peux parler la langue du pays. En Inde, je suis noir. Dans la communauté noire, j'ai la peau foncée. En Amérique, je suis britannique [...] Seulement à cause de la couleur de notre peau, on est obligés de représenter quelque chose. Ça reflète ce que raconte le film. »

EN ANGLAIS SEULEMENT

Le studio Universal a visiblement été pris de court par le succès de Get Out, un peu comme il l'avait été il y a deux ans face au succès de Straight Outta Compton, le film de F. Gary Gray. Ainsi, le film de Jordan Peele a pris l'affiche au Québec uniquement dans sa version originale anglaise, sans que le studio ne prévoie offrir aux cinéphiles francophones une version doublée ou sous-titrée. Plus tôt cette semaine, Universal Canada nous a confirmé qu'aucune mesure particulière ne serait prise à cet égard, d'autant que le film sera à l'affiche en France seulement le 3 mai. Les cinéphiles québécois devront ainsi attendre la sortie de Get Out sur d'autres plateformes avant d'avoir droit à la version de leur choix.

Photo : Universal Pictures

Catherine Keener, Bradley Whitford, Daniel Kaluuya, Betty Gabriel et Allison Williams dans Get Out

Photo Valérie Macon, archives Agence France-Presse

Jordan Peele, réalisateur de Get Out