Avec ses trois premiers longs métrages, Amores Perros21 Grams et Babel, Alejandro González Iñárritu a su décrire mieux que personne la première décennie du présent millénaire. Son approche, de nature éminemment contemporaine, a ensuite trouvé une forme différente dans Biutiful, puis dans Birdman or (The Unexpected Virtue of Ignorance), lauréat de l'Oscar du meilleur film.

Cette fois, le cinéaste américano-mexicain change complètement de registre en proposant un western réaliste, aussi brutal que spectaculaire. The Revenant est sans contredit l'une des expériences cinématographiques les plus intenses jamais produites.

Alejandro González Iñárritu entraîne le spectateur en l'immergeant complètement dans l'histoire qu'il raconte, sans lui laisser aucun répit. Nous plongeons ainsi dans l'horreur pratiquement dès le départ, sans même la moindre mise en contexte. C'est d'ailleurs sur le plan narratif que le bât blesse un peu. S'il arrive à la projection vierge de toute information sur ce qu'il s'apprête à voir, le spectateur aura du mal à trouver ses repères quant aux enjeux, aux motivations des personnages, à l'époque et au lieu dans lesquels le récit est campé.

Librement adapté d'un roman de Michael Punke, publié en 2002, The Revenant décrit l'histoire de survie de Hugh Glass (Leonardo DiCaprio), un trappeur qui a réellement existé. Nous sommes en 1823. Dès le départ, l'expédition à laquelle participe Glass au Wyoming est attaquée par des Indiens Arikaras.

L'assaut est d'une telle férocité qu'on pourrait presque y voir, au chapitre du réalisme, une variante de la fameuse scène du débarquement de Normandie dans Saving Private Ryan. Pour tout dire, c'est un carnage.

Glass, père d'un fils dont la mère est indienne, survit quand même à l'attaque. Le repos est pourtant de courte durée pour lui. À peine réfugié en forêt, l'homme est alors repéré par un ours. Cette séquence, qui a inutilement fait couler beaucoup d'encre, glace d'ailleurs le sang tant elle est empreinte de véracité. Très grièvement blessé, laissé pour mort, Glass est néanmoins rescapé, sur ordre du commandant Henry (Domnhall Gleeson), par, notamment, John Fitzgerald (Tom Hardy). Ces deux hommes auront pourtant des comptes à régler...

Plein la vue

Flanqué du directeur photo Emmanuel Lubezki, qui n'a utilisé que la lumière naturelle, Alejandro González Iñárritu en met plein la vue. Sa réalisation n'est rien de moins qu'époustouflante. À un point où l'on en vient à se demander si cette évidente virtuosité ne prêterait parfois pas flanc à un peu d'esbroufe. D'autant que le récit, ponctué de scènes d'une extrême violence (avis aux coeurs plus sensibles!), s'étire un peu.

Malgré ces réserves, somme toute mineures, The Revenant reste une oeuvre très puissante. Le parti pris qu'a emprunté le cinéaste ne pouvait être plus efficace. À cet égard, les comédiens sont au diapason. Dans la peau d'un personnage qui se fie à son instinct, Leonardo DiCaprio franchit une étape supplémentaire en offrant un jeu viscéral, dénué de tout artifice, dans lequel il s'investit complètement. La composition de l'acteur est aussi grandiose que la réalisation d'Alejandro González Iñárritu. Ce qui n'est pas peu dire.

* * * 1/2

The Revenant (V.F.: Le revenant). Drame d'Alejandro González Iñárritu. Avec Leonardo DiCaprio,  Tom Hardy, Domhnall Gleeson. 2h36.

> Consultez l'horaire du film

IMAGE FOURNIE PAR 20TH CENTURY FOX

L’affiche du film The Revenant