Straight Outta Compton, qui raconte la naissance du «gansta rap» à travers l'épopée du groupe N.W.A, a ébahi Hollywood en prenant la première place du box-office nord-américain pour son week-end de sortie, éclipsant Mission Impossible et Tom Cruise.

Le biopic sur ce groupe qui a révolutionné la scène hip-hop entre 1986 et 1991 a dépassé les prévisions les plus optimistes, rapportant 60,2 millions de dollars en trois jours, selon la société Exhibitor Relations.

Il devance largement le dernier opus de la série de films d'action Mission Impossible - Rogue Nation, qui collecte 17,2 millions de dollars seulement en troisième semaine, avec pourtant près de 1000 salles de plus que Straight Outta Compton.

«Le réalisateur F. Gary Gray (The Italian Job, 2003) a conçu un film plébiscité par la critique comme le public et qui excède largement les attentes», constate Paul Dergarabedian, analyste de la société spécialisée dans le box-office Rentrak.

«C'est une surprise bienvenue et le dernier blockbuster de l'été», saison des films à gros budget et grosses recettes aux États-Unis, note Jeff Bock, analyste d'Exhibitor Relations.

«Des recettes de 60 millions de dollars pour un film interdit aux enfants (coté R) avec un ensemble d'acteurs afro-américains inconnus, c'est du jamais vu», a-t-il ajouté.

D'après lui, jusqu'à la sortie du film vendredi, le distributeur Universal tablait sur un week-end de sortie à 20 millions de dollars.

Rapportant près du double de son budget de 29 millions de dollars en un seul week-end, selon le magazine Variety, il réalise un joli coup pour le studio.

Le film porte le nom du premier album du groupe en 1988, évoquant la ville jouxtant Los Angeles dont est issus le groupe N.W.A., qui a influencé durablement la musique contemporaine et la culture populaire mondiale.

Public largement afro-américain 

Les membres fondateurs du groupe, notamment Dr Dre, Eazy-E ou Ice Cube, sont interprétés par de jeunes acteurs encore peu connus du grand public, à l'instar de O'Shea Jackson Jr (le fils d'Ice Cube, qui incarne son père à l'écran), Corey Hawkins ou Jason Mitchell.

D'après Jeff Bock, les biographies «en général ne génèrent pas ce succès», mais, remarque-t-il, «il n'y a eu aucun film de studio cet été visant un public afro-américain», qui est largement derrière le succès de Straight Outta Compton.

Jeff Bock remarque aussi que cela fait longtemps que cette «histoire fondatrice de l'histoire musicale» contemporaine méritait d'être portée à l'écran.

«C'est un film très divertissant mais qui comporte aussi un message social pertinent», reprend Paul Dergarabedian, de Rentrak.

Il sort aussi un an après la mort de Michael Brown, un adolescent de 18 ans sans arme tué l'an dernier à Ferguson par un policier blanc.

Los Angeles commémore aussi le 50ème anniversaire des émeutes de Watts, qui dénonçaient les violences policières.

N.W.A (abréviation de «Niggaz Wit Attitudes») et ses membres qui ont hérité de l'étiquette «gangsta rap» dénonçaient la violence et les discriminations policières, en particulier le single le plus controversé de N.W.A, Fuck Tha Police (1988).

L'histoire de N.W.A est aussi celle de destins très différents. Des histoires à succès à l'américaine pour Ice Cube, aujourd'hui producteur et musicien reconnu, et Dr Dre, qui a vendu à Apple sa société de casques et équipements musicaux Beats. Tous deux sont à la tête de fortunes qui se chiffrent en centaines de millions, et jouissent d'une très forte popularité aux États-Unis et au-delà.

DJ Yella s'est quant à lui reconverti dans les films porno. Plus tragiquement, Eazy-E est mort à 31 ans du sida.

Quant à Suge Knight, producteur de rap également originaire de Compton, partenaire de Dr Dre au sein de la maison de disque emblématique Death Row Records, il est aujourd'hui en prison et risque la prison à perpétuité pour avoir tué un homme en le renversant en voiture. Un incident survenu fin janvier lors d'une altercation en marge de la fin de la production de Straight Outta Compton.