Un père travesti en nounou excentrique, un DJ militaire irrévérent, un professeur de littérature rebelle, un tueur... Robin Williams a joué pendant quarante ans en virtuose toute la partition du rire au larmes jusqu'à être emporté par ses démons.

«Une boule d'énergie», «un génie comique», «l'homme le plus drôle du monde», «personne capable de prendre sa place»... les superlatifs déferlaient lundi à l'annonce de la disparition de celui qui restera comme une légende d'Hollywood.

Comme l'a dit lundi soir le président Barack Obama dans son hommage, «c'était un docteur, un génie, une nounou, un président, un professeur, un Peter Pan virevoltant» qui «nous faisait rire (et) nous faisait pleurer».

Celui qui était capable de tenir en haleine et faire se tordre de rire des salles de milliers de personnes, qui présentait régulièrement des cérémonies télévisées notamment des téléthons caritatifs. Il avait fait ses armes dans le monde du théâtre d'improvisation et de «stand up comedy», au sortir de la Julliard School, l'une des plus prestigieuses écoles d'art dramatique des États-Unis.

Avec son regard perçant et un visage à l'impressionnante plasticité, semblant toujours en équilibre instable entre le rire et les larmes, le comédien a exploré tout le registre des émotions humaines.

Il était connu pour sa capacité unique à imiter les accents et à modifier sa voix, qu'il a prêté au génie dans l'Aladdin de Disney, ou qu'il hurle dans son micro de DJ son inoubliable «Gooooooood morning Vietnammmmmm!», alors qu'il incarnait un militaire rebelle dans le film de Barry Levinson.

Extrêmement physique, jouant le grotesque dans son rôle d'extra-terrestre dans Mork and Mindy, il dansait avec un balai dans Mrs. Doubtfire. Cela restera l'une de ses performances les plus reconnues, celle d'un père divorcé qui tente par tous les moyens de rester proche de ses enfants et se déguise en vieille nounou.

Il était aussi capable d'une grande subtilité comme dans Good Will Hunting, pour lequel il a remporté l'unique Oscar de sa carrière, récompensant son interprétation d'un psychologue qui saura comprendre et aider un jeune homme surdoué mais en difficulté psychique.

Quelques années auparavant, il incarnait le professeur idéal dans Dead Poets Society, un film qui a marqué toute une génération.

«Capitaine» d'une génération

Ce «capitaine oh mon capitaine» enjoignait ses élèves de profiter de la vie avec la devise carpe diem, qui a résonné pour toujours aux oreilles de tous ceux qui ont vu ce film à la fin tragique.

A l'autre bout du spectre dramatique, il a aussi incarné les personnages les plus noirs et torturés, comme le tueur en série de Insomnia ou le gérant de photomaton maniaque qui harcèle une famille dans One Hour Photo.

Lundi soir, des fans avaient commencé à déposer des fleurs en sa mémoire sur son étoile de Hollywood Boulevard. Adulé dans le monde entier, il était aussi très aimé dans l'industrie du cinéma, où les commentaires décrivaient immanquablement un homme «doux», «adorable», amenant toujours le sourire aux lèvres de ceux qu'il rencontrait.

Lorsqu'il a été opéré du coeur en 2009, ses médecins et infirmières ont ainsi raconté qu'il avait commencé à les faire rire deux heures à peine après être sorti de l'intervention.

Derrière le rire, l'acteur luttait contre de nombreux démons.

Son attachée de presse a révélé lundi soir, après l'annonce de sa disparition (probablement un suicide), qu'il affrontait une «grave dépression».

Il avait parlé publiquement de son combat contre les drogues et l'alcool et avait fait plusieurs cures de désintoxication.

Ce bourreau de travail, qui avait encore trois films en post-production pour les quelques mois à venir, avait avoué être retombé dans l'alcoolisme pour tenir face à son rythme de travail.

Il ne perdait jamais le sens de l'(auto)dérision: «La cocaïne est une manière pour Dieu de vous faire comprendre que vous gagnez trop d'argent», avait-il notamment déclaré.