Tous les chemins mènent à Rome, mais Woody Allen s’est quand même un peu perdu en cours de route. Et si la Ville éternelle est magnifique dans To Rome with Love (grâce à la direction photo de Darius Khondji), l’hommage est moins réussi que celui rendu à la Ville lumière dans Midnight in Paris.



Sympathique au premier abord, ce film choral s’éparpille en effet bien vite. Mais on y entend tout de même la petite musique «allenienne». Pour les fans, c’est ce qui sauvera le voyage.

La trame la plus intéressante met en scène Alec Baldwin (vraiment formidable) dans la peau d’un architecte de renom qui a préféré le fric à l’art et qui, en vacances à Rome, rencontre un étudiant en architecture (Jesse Eisenberg, craquant avec son allure de jeune Woody Allen) coincé entre sa petite amie (Greta Gerwig) et la meilleure amie de cette dernière, actrice névrosée et calculatrice sous des airs d’innocence (Ellen Page, excellente). L’aîné suivra ainsi le plus jeune, qui lui fait penser à ce qu’il a été autrefois.

Woody s’éparpille



Il y avait dans ce filon un terreau assez riche pour semer une grande partie du scénario. Woody Allen semble avoir préféré faire l’école buissonnière et butiner d’une histoire à l’autre, survolant les situations au lieu de les creuser. Quant à ses personnages, on passe trop peu de temps en leur compagnie pour s’y attacher, pour savourer leur brillance (quelques répliques sont absolument savoureuses) ou jouir de leurs névroses.

On croise ainsi un monsieur Tout-le-Monde (Roberto Benigni) qui se retrouve sans explication au sommet de l’échelle de la célébrité; un nouveau marié qui a perdu sa femme et présente comme telle à sa très stricte famille une flamboyante prostituée (Penélope Cruz) qui s’est trompée de client; un metteur en scène d’opéra à la retraite (Woody Allen) qui découvre que le futur beau-père de sa fille possède une voix de ténor absolument exceptionnelle... dans certaines conditions seulement.

Les bonnes idées ne manquent pas. Montrer du doigt la téléréalité et ses vedettes aussitôt créées, aussitôt jetées. Tremper un orteil dans la piscine des Marx Brothers en jouant la carte de l’humour absurde. Unir par les liens sacrés du mariage le personnage joué par Woody Allen à une psychiatre (beaux échanges avec Judy Davis). On le voit, l’itinéraire du cinéaste passe par ses étapes habituelles – angoisses existentielles, réflexion sur la célébrité, appétit sexuel. Mais le voyage est moins original que ce à quoi on s’attend de lui. Sauf qu’un faux pas signé Woody Allen vaut tout de même le détour.

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TO ROME WITH LOVE (V.F. : ROME MON AMOUR). Comédie de Woody Allen, avec Alec Baldwin, Ellen Page, Jesse Eisenberg, Woody Allen. 1h52.