Ils marchent sur l’avenue du Mont-Royal en direction ouest, tournent vers le sud sur la rue de Bullion, descendent jusqu’à Duluth où ils tournent à nouveau vers l’ouest pour se rendre jusqu’à l’entrée du parc Jeanne-Mance et terminent leur odyssée au pied du monument George-Étienne-Cartier.



Car odyssée il y a dans J’espère que tu vas bien, film expérimental de David La Haye, sa complice Marie-Chantal Perron et le coréalisateur et directeur photo Jay Tremblay. Opus singulier, l’œuvre est le fruit d’un seul plan-séquence de 87 minutes tourné dans ces rues du Plateau-Mont-Royal.

Oeuvre de fiction aussi, il faut le préciser, même si les deux comédiens pigent avec un malin plaisir dans leur propre existence pour tricoter leurs personnages de Dave et Minou qui en arrachent avec l’amitié et l’amour.

Par hasard, Dave et Minou se retrouvent le dimanche 8 avril 2012, jour de Pâques, après une séparation de 10 ans. Elle sort d’une pharmacie en larmes; il mendie près de la station de métro. À la suite d’une chute, Dave a perdu la mémoire à court terme. Il a aussi perdu ses contrats de comédien et ses amis. Tandis que Minou, choyée au travail, n’est pas douée pour l’amour.

Au cours de cette marche pascale, genre de chemin de croix montréalais de la vie moderne, ils vont deviser sur ce qui les a unis puis désunis, leurs amitiés communes, les joies et les affres du métier de comédien.

Évidemment, l’improvisation a ses limites et le film en témoigne. À partir d’un simple canevas, les deux comédiens ont inventé leurs personnages, leur passé et peaufiné leurs répliques au rythme de leurs pas. Cela donne parfois des propos savoureux et parfois... laborieux. Certains sujets sont «plantés», d’autres étirés (la blessure de Dave).

Par contre, La Haye et Perron font preuve d’une bonne dose d’autodérision. Et ils ont eu la bonne idée de faire quelques écarts afin de casser le rythme de leur déambulation urbaine: l’arrêt devant le «de Bullion Castle»; les arrières-pensées de Minou sur ses amours meurtries.

Avoir tourné le film avec seulement six personnes a permis d’écrire un générique de fin cocasse. Soyez donc avisés de ne pas sortir trop tôt. À moins que les mouvements de la Steadicam, parfois houleux, vous donnent le mal de mer.

Ce serait dommage, parce que J’espère que tu vas bien, film indépendant, est plus divertissant et surprenant que certains navets subventionnés par nos institutions.

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J’espère que tu vas bien. Comédie de David La Haye et Jay Tremblay. Avec David La Haye et Marie-Chantal Perron. 1h27.