Mercedes-Benz et Hydro-Québec se donnent trois ans pour doubler l’autonomie des autos électriques. C’est, en gros, la trame de fond d’une entente qui permettra au constructeur allemand de tester la plus récente technologie de batterie à électrolyte solide sur laquelle la société d’État québécoise planche depuis au moins 20 ans.

Ce partenariat a été annoncé sur les talons d’une autre nouvelle confirmant la volonté d’Hydro-Québec d’appuyer sur l’accélérateur, afin d’aider la commercialisation de batteries qui promettent, toutes choses étant égales par ailleurs, de multiplier par deux l’autonomie d’un véhicule électrique comme ceux qu’on trouve déjà sur nos routes. À la fin de janvier, l’Université du Texas à Austin a confirmé le transfert à Hydro-Québec de brevets liés aux batteries de prochaine génération appartenant à son professeur John B. Goodenough, par ailleurs Nobel de chimie 2019, justement pour faciliter leur commercialisation.

« Il y a une course à la prochaine génération de véhicules électriques qui démarre, ces temps-ci, dans l’industrie automobile, et nous sommes heureux d’y participer, résume Jonathan Côté, porte-parole d’Hydro-Québec. Nous avons mis au point notre première batterie à électrolyte solide il y a plus de 20 ans, mais il reste encore certains aspects de la technologie à améliorer. Nous avons défini plusieurs objectifs à atteindre dans le cadre de notre partenariat avec Daimler [la société mère de Mercedes-Benz], mais le but principal est de la tester dans une situation réelle, sur la route. »

Plus compacte, plus dense… plus sûre

Les piles qui animent les voitures électriques actuellement sur les routes sont au lithium-ion. Elles peuvent fournir une puissance et une autonomie comparables à celles d’un réservoir d’essence, mais coûtent un peu plus cher pour le consommateur. Surtout, elles ne sont pas sans certains risques. La mésaventure des téléphones Galaxy Note 7 dont la pile prenait feu, il y a trois ans, illustre ces risques.

PHOTO FOURNIE PAR HYDRO-QUÉBEC

Une entente permettra à Mercedes-Benz de tester la plus récente technologie de batterie à électrolyte solide sur laquelle Hydro-Québec planche depuis au moins 20 ans.

Une pile à électrolyte solide à base de polymère ou de céramique comme celle sur laquelle travaille Hydro-Québec élimine ce danger. « On peut la plier, la comprimer, la perforer et rien ne se produira », assure M. Côté. En prime, cette technologie permet de stocker plus d’énergie dans un espace plus compact, et à un poids comparable plus léger, par rapport au lithium-ion. Autrement dit, on pourrait créer des véhicules électriques coûtant sensiblement moins cher, et qui offriraient la même autonomie que ceux actuellement en marché. Ou, à prix et format égaux, leur autonomie serait généreusement bonifiée. Daimler et Hydro-Québec veulent doubler cette autonomie, résume Jochen Hermann, vice-président de la division eDrive de Mercedes-Benz.

Par rapport aux batteries au lithium-ion, les batteries à électrolyte solide s’annoncent comme une percée importante pour l’électrification des transports.

Jochen Hermann

« Les avancées réalisées par les chercheurs d’Hydro-Québec sont très prometteuses, et nous sommes impatients de constater les premiers résultats de notre programme de développement commun », ajoute M. Hermann

À chacun sa batterie

La batterie à électrolyte solide n’est pas la seule forme de stockage étudiée par Hydro-Québec ni par les autres acteurs des secteurs du transport et de l’énergie. La société d’État a aussi mis au point une pile de type lithium-fer-phosphate (LiFePo4) qui fait mieux que le lithium-ion dans certaines applications industrielles, notamment.

La société d’État a aussi récemment accordé une licence d’exploitation à la jeune société québécoise Nouveau Monde Graphite, qui pourra ainsi mettre au point sa propre technologie à base de graphite, promettant d’améliorer encore un peu plus les piles au lithium-ion. Cette dernière mise fortement sur l’industrie automobile afin d’assurer sa croissance. Nouveau Monde Graphite souhaite fabriquer des matériaux à Saint-Michel-des-Saints, notamment, et a récemment lancé une campagne web afin d’attirer l’intérêt du secteur automobile, dont le constructeur californien Tesla, tout particulièrement.

« À 150 kilomètres au nord de Montréal se trouve le secret le mieux gardé de l’industrie automobile : un dépôt de graphite qui pourrait propulser la voiture électrique de demain », promet la minière québécoise. Un secret de moins en moins bien gardé, en fait, qui se trouve aussi, en partie, dans les laboratoires d’Hydro-Québec à Varennes, à Shawinigan, et même en Aquitaine, en France.

« On trouve une application d’au moins un brevet d’Hydro-Québec dans à peu près tous les appareils électroniques actuellement en marché », rappelle Jonathan Côté. On en trouvera sans doute bientôt sous le capot des autos électriques également…