Que ce soit en photo ou sous la froide réalité d'un ciel nuageux, la Mercedes-Benz SLS-AMG ne paraît pas avoir été gâtée par le coup de crayon de ses stylistes. Pourtant, une fois au volant et alors qu'on s'attend à des huées, ce sont des regards admiratifs qui s'allument au passage de cette voiture d'exception qui cultive la note rétro en évoquant la célèbre 300 SL des années 50.

Mais, nous ne sommes pas là pour discuter de goûts et de couleurs et, pendant que vous évaluez les mérites et les démérites des traits du dernier porte-étendard de Mercedes, permettez-moi de faire la découverte de cette voiture née d'un conflit sur sa vraie nature entre McLaren (concepteur de la SLR) et le bureau de direction de la marque allemande.

McLaren avait des idées qui ne s'accordaient pas nécessairement avec la vision de Mercedes d'un modèle pouvant succéder à la SLR, créée en 2003. Le constructeur allemand a donc décidé de mettre à profit sa filière haute performance, AMG. Et c'est ainsi qu'est née la SLS pendant que McLaren offrira sous peu sa MP412-C, modèle qui ne se veut rien de moins que le premier rival de la Ferrari Italia 458.

Solide avant tout

Mais, revenons à nos moutons. Si la SLS me laisse froid par sa silhouette, ses performances et son comportement routier sont on ne peut plus spectaculaires. Conduire une voiture d'exception en sachant qu'elle n'est pas susceptible de vous laisser tomber est déjà un acquis important pour cette Mercedes. Car elle bénéficie de cette qualité qui est devenue la marque de commerce des voitures de Stuttgart.

Une autre qualité de la SLS est de se prêter au farniente comme à la haute performance sans jamais rechigner.

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

La SLS-AMG, le nouveau porte-étendard de Mercedes-Benz.

Pour hommes seulement?

Si les lignes de ce coupé haute performance sont, au bas mot, contestables, elles sont rachetées par les fameuses portes-papillon, probablement le principe de design le plus frappant, même plus d'un demi-siècle après son apparition sur les 300 SL de 1954. Si l'utilisation d'un tel attrape-l'oeil ne s'est jamais vraiment répandue, c'est qu'il présente une foule d'inconvénients, comme la SLS en fait la preuve. S'installer au volant de ce coupé sport exige une certaine technique qui consiste à s'asseoir latéralement, en faisant dos à la voiture pour ensuite pivoter vers la droite afin de faire face au poste de pilotage. C'est la meilleure façon de courber l'échine et d'éviter un dur contact de la tête avec le haut de la portière. La garde au toit est aussi problématique et les plus grands devront s'assurer d'être assis correctement ou d'abaisser le baquet au maximum pour ne pas heurter le pavillon. L'expérience se complique s'il s'agit d'une femme et il y a fort à parier que madame n'appréciera pas d'avoir à se donner un élan pour attraper la courroie servant à refermer la porte.

Interrogés sur l'absence d'une assistance électrique, les gens de Mercedes affirment qu'une telle solution aurait entraîné un surplus de poids inutile. Ce qui fait de la SLS une voiture pour hommes seulement. Enfin, ce mauvais moment passé, cette Mercedes ne demande qu'à vous faire plaisir, même si elle exige en retour quelques attentions. On ne s'élance pas au volant d'une telle monture comme on le fait dans une compacte bon marché. Il faut avoir pris le temps de bien la connaître. Son étonnante largeur et sa faible garde au sol, par exemple, doivent être prises en compte dans les parcs de stationnement ou les rampes d'accès de certains immeubles.

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

S'installer au volant de ce coupé sport exige une certaine technique en raison de la présence des portes-papillon.

Passons rapidement sur la présentation intérieure rouge vif pour souligner sa correction grâce à des matériaux de belle et bonne qualité consciencieusement assemblés. Tous les accessoires de luxe inhérents à une automobile de ce prix font partie de l'équipement de série, tout comme les divers systèmes de sécurité. À ce propos, une meilleure visibilité de trois quarts arrière faciliterait les déplacements en ville, étant donné que, malgré sa vocation de grande routière, la SLS doit se contenter d'un coffre plus petit que celui d'une Mini.

De l'essence super +



Le moteur V8 de 6,2 litres et 563 chevaux de cette Mercedes ne boit pas n'importe quelle piquette: il n'avale que ce qu'il y a de mieux en essence avec un indice d'octane obligatoire de 94. Parfaitement désaltéré, il vous offre en échange une sonorité gutturale envoûtante dans la tonalité des gros cubes américains tout en étant à l'origine d'une poussée qui s'exprime davantage comme un décollage plutôt que par un simple démarrage. Les accélérations se passent tellement vite qu'on a peine à conduire et à regarder le chronomètre en même temps. Il n'est pas commun en effet d'être catapulté à 100 km/h en 3,7 secondes, trois fois plus vite qu'avec la grande majorité des voitures sur nos routes. Je me demande ce que dirait le chrono s'il n'y avait pas ce léger temps mort quand on enfonce l'accélérateur de la SLS.

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

Tous les accessoires de luxe inhérents à une automobile de ce prix font partie de l'équipement de série, tout comme les divers systèmes de sécurité.

La boîte de vitesses est, bien entendu, séquentielle avec un double embrayage qui accélère le passage de ses sept rapports actionnés par des palettes parfaitement ergonomiques. La conduite la plus agréable est obtenue en plaçant le bouton de réglage de la dynamique de la voiture sur «sport» ou «sport +» tellement le mode «confort» engendre des secousses désagréables.

Ne pas oublier le confort

La répartition du poids de 47/53 entre l'avant et l'arrière est la résultante d'un moteur placé en position dite central/avant et dont la puissance est acheminée aux roues arrière motrices par l'intermédiaire d'un arbre de transmission en fibre de carbone. Le bel équilibre ainsi obtenu est à l'origine d'un comportement routier dont il est difficile d'atteindre les limites. Ce n'est qu'en supprimant les garde-fous (système de stabilité) qu'on découvre un brin de sous-virage qui n'a rien de dramatique. Certains croient que Mercedes a sacrifié légèrement la tenue de route au bénéfice du confort et c'est très bien ainsi, puisque cette voiture passera 99,9% de son existence sur le bitume de nos routes au lieu du tapis lisse d'un circuit. La direction reliée à un volant à méplat est aussi rapide que précise alors que le freinage assuré par des disques en carbone-céramique (optionnels) vous obligera à reprogrammer vos réflexes tellement les distances d'arrêts sont raccourcies.

Vendu à 198 000$, environ 100 000$ de moins que la plupart des modèles de cette classe, le coupé Mercedes-Benz SLS fait figure d'aubaine dans ce marché fou des supervoitures. Il n'a sans doute pas le mordant d'une Ferrari ou d'une Lamborghini et il s'adresse plutôt aux conducteurs de Bentley Continental ou Aston Martin DB9, pour qui la performance ne doit pas réduire le confort.

Par ailleurs, ses portes-papillon, si impressionnantes soient-elles, pourraient freiner l'ardeur des acheteurs tellement elles rendent la conduite de tous les jours laborieuse. C'est en même temps ce qui confère à ce coupé ce caractère exceptionnel qui, comme pour les 300 SL, fait qu'une voiture est mémorable.

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

Le moteur V8 de 6,2 litres et 563 chevaux de cette Mercedes, à la sonorité gutturale envoûtante rappelant les gros cubes américains, est assemblé à la main.