General Motors a profité de son association avec les JO de Vancouver pour faire rouler pour la première fois au Canada l'un des prototypes de la fameuse Chevrolet Volt, cette voiture électrique appelée à changer la face du monde automobile.

Plus encore, il ne serait pas exagéré de dire que son arrivée prochaine sur le marché constituera l'une des étapes les plus significatives de toute l'histoire de l'automobile ou du moins du dernier demi-siècle.

 

Dévoilée en 2007, la Chevrolet Volt a fait beaucoup de chemin depuis, chacune de ses composantes ayant été testée dans plusieurs autres véhicules, dont la Malibu et la future Cruze, afin d'en vérifier le rendement et, avant tout, la fiabilité. On les a ensuite intégrés dans pas moins de 100 prototypes pour en parfaire la mise au point. De ce nombre, neuf sont actuellement soumis à la froidure de Kapuskasing, dans le nord de l'Ontario, pendant qu'un nombre similaire circule sous la chaleur torride de l'Arizona. Car GM n'a absolument pas les moyens de se tromper avec la Volt. Dès qu'elle posera ses pneus à faible résistance de roulement sur une voie publique, elle devra être parfaite et exempte du moindre pépin qui pourrait faire voler en éclats toutes les convictions que l'on entretient sur l'avenir de la voiture électrique.

 

Ce qu'il faut surtout retenir au sujet de la Volt, c'est qu'il s'agit d'une voiture électrique à autonomie prolongée (ou E-REV, pour «extended range electric vehicule»). Cela signifie qu'elle peut rouler 64 km avant de faire appel à son moteur à essence pour faire fonctionner la génératrice qui rechargera les batteries afin de prolonger l'autonomie à plus de 300 km. Bref, la Volt ne tombera jamais en panne de courant, pourvu qu'il y ait encore de l'essence dans le réservoir. En plus, contrairement à une hybride, le moteur à essence ne transmet pas sa puissance aux roues avant motrices; c'est l'électricité qui s'en charge.

 

Toute cette technologie repose dans une automobile ayant les dimensions d'une compacte et dont la carrosserie bénéficie d'un coefficient aérodynamique meilleur que celui d'une Corvette. Quant aux batteries, dont le poids atteint les 180 kg, elles sont installées dans un espace en forme de T logé sous le plancher, au centre de la Volt.

 

Malgré la loquacité des représentants de GM (dont Tom Odell, directeur du programme pour GM Canada), il y a quand même un certain nombre de questions qui demeurent encore sans réponse et cela, à quelques mois de la mise en marché prévue pour la fin de l'année aux États-Unis et au printemps de 2011 pour le Canada. Le prix de la voiture, son poids, la capacité du réservoir d'essence, le coût de remplacement des batteries au lithium-ion, les intervalles d'entretien, la consommation du moteur à essence ou la date approximative de la rentabilité de l'investissement de GM dans ce projet sont autant de sujets sur lesquels on refuse de se prononcer pour le moment. On suppose que le prix se situera aux environs de 40 000$ et que le constructeur américain aura eu le temps de redessiner la présente version de la Volt avant de récupérer une faible partie de la somme faramineuse consacrée à la mise au point d'un tel véhicule. Ce que l'on sait toutefois, c'est que le petit moteur à essence qui assure le fonctionnement de la génératrice est un quatre cylindres de 1,4 litre qui a déjà fait ses preuves dans des modèles Opel vendus en Europe.

 

Un BlackBerry avec ça?

 

Quant au remplacement des piles, GM offrira une garantie de huit ans sur celles-ci tout en sachant qu'après cette période, elles auront encore en réserve 30% de leur cycle de vie. Elles seront alors échangées pour des neuves à un prix qui tiendra compte qu'elles pourront être réutilisées sans risques pour des moteurs stationnaires. Cette forme de «recyclage» aura pour effet de diminuer le coût pour le consommateur tout en évitant une mise au rancart prématurée et polluante. Parmi les rares options offertes dans la Volt, celle qui ravira les utilisateurs de BlackBerry (ou autres sources d'esclavage similaires) est la possibilité de «brancher» sa voiture afin d'en connaître tous les paramètres (autonomie, consommation, distance à parcourir, etc.)

 

Silence on roule

 

Conduire la Volt pour la première fois sur une route publique dans Stanley Park constitue davantage une exclusivité qu'une expérience inoubliable. Comme le soulignait si bien une personne dans notre entourage, «c'est une expérience extraordinairement ordinaire». Et c'est précisément ce que GM désire. La dernière chose que l'on souhaite est de dépayser la clientèle. En 30 secondes, mon accompagnateur m'avait enseigné d'appuyer sur le frein et d'actionner la touche Start avant de saisir le curieux et très fonctionnel levier de vitesse au milieu de la console centrale toute blanche. Comme dans une voiture hybride, on n'entend absolument rien et il faut prendre de la vitesse avant de percevoir les bruits de la route. Le niveau sonore n'en demeure pas moins très faible, sauf évidemment quand on a épuisé ses 64 kilomètres d'autonomie et que le moteur à essence doit intervenir pour recharger les batteries.

 

Ce mode de régénération sert à récupérer l'énergie dégagée par le freinage. En levant le pied, il se produit une légère décélération comme si l'on faisait appel à un rapport inférieur d'une boîte de vitesses manuelle.

 

La Volt accélère franchement grâce en partie au couple inhérent au moteur électrique et les performances ne vous obligeront pas à porter un béret pour expliquer la lenteur de vos déplacements. Le traditionnel 0-100 km/h est assuré en moins de 9 secondes et la voiture peut vous emmener tout droit au poste de police à 160 km/h. En dépit de son orientation écologique, la Volt peut se montrer agréable à conduire et capable de performances sportives. Il suffit de placer le levier de vitesse sur «M5» pour voir surgir une poussée supplémentaire du moteur électrique, ce qui n'est pas déplaisant dans les enfilades de virages.

 

 

 

 

 

 

 

 

Économiser 1892 litres d'essence

 

Pour la consommation, on peut assumer que quelqu'un qui travaille à 30 km de chez lui pourra faire l'aller-retour à son boulot sans avoir à s'arrêter une seule fois à la station-service, pourvu qu'il recharge les batteries de sa Volt pendant 8 heures chaque soir. GM s'est aussi livré à un petit calcul qui démontre que, par rapport à une automobile ordinaire, la voiture permettra à son utilisateur d'épargner 1892 litres d'essence sur un parcours annuel de 25 000 kilomètres.

 

Si la direction m'a paru un peu trop légère et les places arrières assez coincées pour une quatre places (en plus d'être pénible d'accès), la Volt semble posséder une tenue de route très acceptable, si j'en juge par les quelques infractions que je me suis permises dans Stanley Park en roulant à 80 km/h au lieu des 30 km/h réglementaires. Sans en avoir l'air, la Volt est une berline à arrière ouvrant qui, avec ses sièges arrière repliables, propose un généreux espace pour les bagages.

 

Cela dit, devez-vous commencer à déchiqueter vos cartes de crédit des grandes pétrolières et la voiture dont tout le monde rêve est-elle à nos portes? Voilà des questions auxquelles il est difficile de répondre à la lumière de cette prise de contact (!) avec la Volt. Même GM est prudent à ce sujet et, parallèlement à la Volt, on travaille activement sur les piles à combustible alimentées à l'hydrogène qui équipaient un grand nombre de Chevrolet Equinox utilisées à Vancouver pour le déplacement des VIP. La Volt a tout de même quelques kilomètres d'avance sur l'hydrogène dans ce casse-tête.

 

Il reste que pour GM, le défi est colossal et crucial.

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

La Volt peut être rechargée en la branchant sur une prise de courant domestique.