Contrairement à Denise Bombardier, qui en a stupéfié plusieurs en admettant qu'elle conduisait un camion Ford F-150, l'icône de la catégorie, je n'ai pas un petit côté «truck» qui sommeille en moi. J'irais même jusqu'à dire que je déteste tout ce qui ressemble de près ou de loin à un camion. Quand on trouve son plaisir à piloter une voiture et à en extraire tout l'agrément de conduite qu'elle peut procurer, le camion me laisse de glace.

C'est donc avec une certaine hantise pour ne pas dire une gêne certaine que j'ai accepté de prendre le volant du nouveau Ford Transit Connect 2010. Car, rouler dans un camion vide est une aberration, un gaspillage d'énergie et une impolitesse à l'environnement, au même titre que de se promener seul dans une voiture 5 places. Mais, travail oblige, j'ai été obligé de me prêter à un tel exercice en tant que juré du «North American Car and Truck of the year», dont les résultats seront dévoilés dans le cadre du prochain Salon automobile de Detroit, en janvier 2010.

 

Une boîte de tôle

 

Nouveau venu chez nous, ce véhicule utilitaire est un peu particulier puisqu'il ne s'agit ni d'un vrai camion (pick-up), ni d'un multisegment, ni d'une fourgonnette. C'est plutôt une grosse boîte carrée dont le seul véritable concurrent était le Sprinter de Dodge avant que celui-ci ne retourne à son enseigne d'origine chez Mercedes-Benz. De provenance européenne également (de Turquie, plus précisément), le Transit prône avant tout l'espace et peut cumuler jusqu'à un certain point les fonctions des véhicules précités, quoique je le voie mal transporter tous les détritus que l'on confie habituellement au pick-up. Il lui manque aussi les quatre roues motrices du compagnon de pêche ou de chasse ainsi que les banquettes arrière qui pourraient doubler ou tripler sa capacité de jouer les taxis ou les navettes d'hôtel. Sa fiche technique précise davantage sa vocation de transporteur pour petite entreprise en nous apprenant que l'on a affaire à une traction avant animée par un petit moteur 4 cylindres assorti d'une transmission automatique à 4 rapports.

 

Une fois ce bilan dressé, on a vite l'impression que le Transit n'a, après tout, rien à offrir. Ce n'est pas tout à fait vrai puisque des modèles un peu plus «habillés» sont au programme des prochains mois.

 

On peut déjà commander d'ailleurs une banquette arrière qui portera de 2 à 5 le nombre de places du véhicule qui, soit dit en passant, repose sur une plateforme de Ford Focus. Des glaces latérales sont aussi offertes en option, une nécessité si jamais vous souffrez de claustrophobie ou d'inconfort dans des espaces sombre. Quant au Transit Connect de base qui m'a été confié pour cet essai, il est difficile de trouver un véhicule répondant avec autant de dépouillement à la définition d'un outil de travail. Choisissez vos adjectifs: terne, plat, ennuyeux, inintéressant et tout ce qui vous paraît aussi passionnant qu'une partie d'échecs à la télévision.

 

Facile à conduire

 

En roulant, toute cette tôlerie à l'arrière n'échappe pas à un ensemble de bruits disparates sur nos routes défoncées. Dès que l'on gagne de la vitesse, c'est le bruit du vent qui prend le dessus et vous prive de toute envie de dialoguer avec votre passager(ère). L'absence de vitres sur les côtés complique également la vue lors des manoeuvres en marche arrière pour se garer. À propos de visibilité, on sera par contre comblé par le gigantesque pare-brise qui, de concert avec une position de conduite surélevée et des sièges physiquement bien adaptés, donne une vue panoramique de la route. Ce petit détail et la relative facilité de conduite de cette vannette seront appréciés de ceux qui, comme moi, croyaient que conduire un camion exigeait des aptitudes spécifiques. Je penserais sans doute différemment au volant d'un monstre de la route, mais des modèles comme le Transit Connect ne posent pas de problèmes particuliers à un automobiliste endurci.

 

Adepte de la traction, ce candidat au titre du «camion de l'année» aura des croûtes à manger selon moi pour monter sur la plus haute marche du podium. Sa mécanique a beau être éprouvée et robuste, on la croirait absente tellement ses performances sont languissantes. Avec un 4 cylindres 2 litres de 136 chevaux et l'aérodynamique des murs d'un court de squash, notre Transit fait son boulot tranquillement, pas vite. Et c'est bien ainsi, sauf qu'un moteur diesel avec un meilleur couple serait le bienvenu.

 

Dépouillé, tôlé et faisant appel à des éléments mécaniques dont les coûts de mise au point sont depuis longtemps assumés par la trésorerie de Ford, le Transit fait partie de ces véhicules peu couteux à construire. Que l'on en demande autant d'argent (autour de 30 000$) me dépasse mais, chose certaine, ce camion, couronné ou non, rapportera beaucoup à Ford.

 

Finalement, si l'essai de ce camion m'a permis de mieux apprivoiser la bête, il n'a pas fait de moi un adepte de cette espèce. Par contre, si je devenais camelot pour La Presse, on ne sait jamais...

Photo Jacques Duval, collaboration spéciale

La camionnette commerciale Ford Transit Connect 2010.