Budget, design, équipements, confort et sécurité arrivent en tête des motivations d'achat d'une voiture. Depuis trop longtemps déjà, la mécanique ne fait plus recette. Et c'est bien dommage.

Design et gadgets (maintenant, il est impératif d'avoir plusieurs prises USB et demain, une connexion internet) sont les valeurs phares de la production actuelle. Je n'ai rien contre. Vous non plus? Le Jeep Renegade a un charme fou. Et le Honda HR-V est intelligemment conçu. Mais les vents et les modes n'y pourront rien changer: c'est sous le capot que bat le coeur de toute voiture. Après tout, c'est son moteur qui lui permet d'avancer.

Il serait sot de séparer la population automobile en deux camps: partisans de la forme et de la ligne d'un côté, défenseurs du fond et du contenu de l'autre. Surtout quand nous pouvons avoir fromage et desserts! Une voiture de designer n'est pas forcément décevante au volant, tout comme une voiture d'ingénieur n'est pas forcément austère. Mais pour qui aime conduire, il n'est pas de voiture réussie sans un moteur de talent.

Si les fluctuations des prix des carburants (et des taxes surtout) ont remis les moteurs d'actualité, c'est uniquement sous l'angle de la sobriété. D'accord, la vitesse est passée de mode et la consommation pèse sur les budgets, mais un moteur ne se limite pas à ça. C'est l'âme d'une auto, celui qui conditionne largement l'agrément de conduite et la performance utile, celle qui fait gagner de précieuses secondes en dépassement. Sans oublier que par son architecture (en ligne, à plat, en V), sa compacité ou son implantation (transversale, longitudinale, à l'avant ou à l'arrière), il influe directement sur la conception d'une voiture (design, habitabilité, sécurité, etc.).

Juste pour cela, le moteur mérite qu'on lui accorde un peu d'attention. Pourtant, très peu de gens s'y intéressent. Par exemple, qui connaît le prix Wards, remis annuellement aux meilleurs moteurs de l'industrie? On connaît tous les vedettes actuelles du design: les frères Callum, Peter Schreyer et Ralph Gilles, mais aucun motoriste. Pourtant, n'ont-ils pas eux aussi une histoire à raconter?

Pourtant, c'est grâce au génie de ces motoristes si nous réalisons plus ou moins que nos voitures prennent sans cesse du poids.

Les moteurs gagnent en puissance tout en consommant et en polluant moins. Il nous paraît aujourd'hui normal de rouler davantage entre chaque révision. On ne s'étonne plus qu'un moteur à essence dépasse les 200 000 km, alors que ce genre d'exploit était jadis réservé aux diesels. Qui remarque que les moteurs sont toujours plus légers, plus compacts et qu'ils doivent supporter des équipements gourmands en énergie?

La tâche n'est pas facile. Aucun organe automobile ne supporte autant de contraintes. Ce qui explique pourquoi le le moteur bénéficie sans cesse des derniers progrès technologiques: distribution variable, injection directe, turbocompresseur, désactivation des cylindres, juxtaposition d'un moteur électrique (hybride), et j'en passe.

Nous sommes ingrats. Nous trouvons de l'audace au galbe d'une aile, de la subtilité à un porte-gobelets. Et nous oublions (trop) souvent ce que l'automobile doit à ses motoristes: l'essentiel des progrès qu'elle a accomplis en cette dernière décennie.

Juste pour ça, vous devriez soulever le capot de votre voiture. C'est vrai, il n'y a rien à voir. Les stylistes sont déjà passés par là. C'est plus beau, qu'ils disent.