À moins d'un revirement aussi spectaculaire qu'inattendu, le groupe Volkswagen sera couronné numéro 1 mondial de l'automobile en fin d'année. La bière va couler à flots. Le conglomérat allemand n'a jamais caché son ambition d'atteindre cet objectif qu'il croyait à sa portée en 2018... Il y est parvenu plus tôt que prévu, mais à quel prix?

Naturellement, le groupe allemand compte sur le portefeuille de marques le mieux garni de toute l'industrie. Au total, 12 marques - y compris les filiales poids lourds MAN et Scania - allant de Volkswagen à Bugatti en passant par Porsche, Audi et Skoda. Face à une offre aussi diversifiée que complète, VW a plus de chance que quiconque de s'assurer de la loyauté à long terme des consommateurs et de satisfaire son «besoin de changement» qui le tiraille chaque fois qu'il songe à changer de véhicule.

La force de VW repose aussi sur la vitalité du marché chinois où, en compagnie de deux partenaires locaux, il écoule quelque 3 millions d'unités par année. À cela s'ajoutent les promesses - elles peinent à se concrétiser de manière durable - des pays émergents comme la Russie, l'Inde et le Brésil.

Ni Toyota, l'actuel numéro 1 et sa poignée de marques, ni General Motors ne peuvent rivaliser face au rouleau compresseur allemand qui, si l'on en croit la rumeur, garde son chéquier bien en vue pour intéresser certaines marques - Alfa Romeo par exemple - à se joindre à son groupe.

VW aura toutes les raisons de se réjouir de ce tour de force, obtenu sans l'aide du marché américain, mais aura tout autant de motifs de s'en inquiéter. Ses volumes de production ont de quoi lui faire bomber le torse, mais qu'en est-il réellement de ses marges bénéficiaires sur l'ensemble des modèles qu'il produit? Elles sont confortables (moyenne de 6,4%), mais pas aussi juteuses (9,4%) que celles dégagées par Toyota qui aura tout le loisir d'investir plus massivement dans le développement de ses futurs produits.

Toutefois, même s'il n'engrange pas autant de recettes, le groupe VW peut compter sur une standardisation nettement plus avancée de son outil de production. Celui-ci passe par des plates-formes et des modules communs. C'est cette approche qui lui permet de donner naissance à une multitude de modèles - tous formats et carrosseries confondus - à moindre coût.

En contrepartie, cette stratégie n'est pas sans risque. D'abord, en partageant plusieurs pièces et composantes entre des modèles de marques différentes, la marque la plus chère peut finir par se faire cannibaliser ou encore perdre une partie de son aura. Tenez par exemple, la présence d'un moteur de 2 L suralimenté par turbocompresseur ou de l'architecture commune entre une Volkswagen Golf et une Audi A3.

La stratégie des plates-formes sert très bien les intérêts du groupe VW en lui permettant de multiplier le lancement de modèles globaux, produits à l'identique partout dans le monde. Les standards de qualité et la fiabilité doivent cependant être strictement observés, sans quoi des rappels massifs de véhicules sont à prévoir. Voilà le réel danger qui guette aujourd'hui le groupe allemand.