Qu'est-ce que votre véhicule dit de vous? Sans doute pas grand-chose. Il ne parle pas. En revanche, son constructeur, si. D'ailleurs, plusieurs consommateurs aiment se contempler dans le miroir (déformant) des marques. Celles-ci profitent du lancement d'un nouveau modèle pour rappeler que ceux et celles qui se le procureront sont dynamiques, éduqués, responsables, pragmatiques, et j'en passe, et des meilleures. Chaque modèle a son public cible. Le marché québécois en compte quelque 280. Et, si l'on tient compte des déclinaisons, ce nombre se multiplie aisément par trois. Ont-ils tous quelque chose de différent à dire de vous? Ne soyez pas naïf.

Votre véhicule a si peu à dire à votre sujet. Selon la marque, le modèle, on saura si vous êtes ou non financièrement à l'aise. Sa propreté et son bon état de marche nous laisseront peut-être deviner quelle importance vous lui accordez. Et encore. Même un véhicule hybride ou électrique ne dit pas clairement qui vous êtes. Cherchez-vous à sauver la planète ou simplement à vous donner bonne conscience? En fait, c'est plutôt nous qui cherchons à faire dire quelque chose à notre véhicule. Tenez, ma vieille Ur-Quattro, elle dit quoi de moi? Que j'aime les problèmes? Que je souhaite préserver le patrimoine automobile québécois? Que je suis nostalgique?

En fait, à moins que vous soyez un adepte du tuning (cette mode consistant à personnaliser sa bagnole de manière plus ou moins voyante) ou que vous conduisiez un modèle franchement exceptionnel, votre véhicule ne dit rien de vous. En revanche, il en a long à raconter sur la société dans laquelle il évolue.

Prenez le marché automobile québécois, par exemple. Les taxes sur l'essence y sont élevées et la Société de l'assurance automobile du Québec (SAAQ) prélève une somme additionnelle sur les véhicules de 40 000$ et plus, et une autre somme si la cylindrée du moteur est égale ou supérieure à 4 litres.

Et il y a de nombreux autres irritants. La liste est juste trop longue à dresser. Conséquence, vous achetez à peu près tous les mêmes véhicules: des Honda Civic, des Hyundai Elantra, des Chevrolet Cruze, des Mazda3 ou des Toyota Corolla. De vrais moutons. En fait, sur les 127 954 compactes - catégorie chouchou des Québécois - vendues l'an dernier, les modèles précités représentaient 75 703 immatriculations. Encore chanceux que vous ne choisissiez pas tous la même couleur!

Évolution des valeurs

Aujourd'hui, l'auto doit coller au style de vie de son conducteur et de ses passagers. Elle doit créer un nouvel imaginaire proche de l'univers domestique, comme en fait foi la présence d'écrans de télévision, de prises auxiliaires pour brancher une console de jeu ou l'ordinateur pour recevoir vos courriels.

Plusieurs constructeurs, pas tous, ont su «sentir» cette évolution des valeurs. Parmi les meilleures ventes, on trouve des véhicules appartenant à des catégories nouvelles - coupé 4 portes, multisegments - et des espèces régénérées: les petits utilitaires qui craignent la boue et les souches, des cabriolets à tête dure.

L'auto doit désormais s'identifier à son propriétaire et à la société. Longtemps ce fut le contraire.

Photo: AP

Les Québécois achètent presque tous les mêmes véhicules: des compactes comme la Honda Civic.