Fiat est à la recherche de quelques bons concepteurs, et le constructeur italien est prêt à délier les cordons de la bourse.

Fiat est à la recherche de quelques bons concepteurs, et le constructeur italien est prêt à délier les cordons de la bourse.

Avec le lancement de la 500, une petite voiture qui fait revivre un modèle et un style chargés de souvenirs, le constructeur espère raviver la même dévotion que suscitait jadis la famille de prédécesseurs charismatiques de la 500.

Fiat offre des prix pour encourager les gens à soumettre des designs de mascottes, d'accessoires et de sites Web promotionnels pour la nouvelle 500. La campagne de marketing vise à tisser des liens avec le passé de Fiat - avec des modèles portant des surnoms affectueux comme Topolino et Bambino.

La nouvelle 500, qui sera mise en vente à compter de la fin de 2007, se veut une voiture du peuple, une gamme de modèles abordables et attrayants que les Américains ont tendance à juger trop petits. Avec la flambée des prix de l'essence, cependant, les petites voitures font des gains même aux États-Unis; les constructeurs cherchent en Asie et en Europe des modèles à importer ou imiter. L'annonce de l'arrivée de la Smart de DaimlerChrysler aux États-Unis suggère l'existence d'un attrait pour des petites voitures comme la 500 chez les conducteurs américains.

Dans un effort promotionnel avec designboom.com, un site Web qui s'intéresse au design industriel, Fiat sollicite des vidéos, des concepts et même des photos de personnes qui rappellent la 500 d'autrefois - enfin tout ce qui fera vendre le nouveau modèle.

Fiat a rassemblé une table de juges prestigieux pour son concours: le grand couturier Giorgio Armani; Luca Cordero di Montezemolo, président de Fiat; Jasper Morrison, designer de mobilier; Gabriele Salvatores, réalisateur de cinéma; et Luca Trazzi, dirigeant de Designboom. Pour la première fois, «une voiture sera créée par le public et pour le public», affirme Luca De Meo, directeur des marques à Fiat Auto.

Laissons le peuple créer une auto du peuple, proclame Fiat. Ou du moins, laissons-le contribuer à sa promotion. Mais ici c'est l'Italie et il ne faut pas toujours donner un sens littéral aux propos. Au fond, le concours de design de la Fiat 500 concerne peu la conception technique de la voiture; c'est un outil de marketing.

Fiat a déjà son concepteur. Frank Stephenson a quitté Ferrari pour prendre la direction du centre de design de Fiat à Turin l'an dernier. Auparavant, il avait conçu la Mini Cooper pour BMW. Les deux expériences sont pertinentes. Il a reçu le mandat de transformer la Trepiùno, une étude conceptuelle pour la nouvelle 500 que Fiat a rendue publique au Salon de l'auto de Genève en 2004, en voiture de série populaire qui rappelle une forme classique connue.

Le design a une importance vitale pour le succès de modèles rétro de petit marché, en partie parce que de tels véhicules ne peuvent guère se démarquer autrement. Les acheteurs se sont montrés réceptifs envers les modèles «réinterprétés», comme en témoigne le succès de la New Beetle de Volkswagen et la Mini Cooper.

La 500 doit succéder à la Topolino (petite souris), la voiture du peuple italienne construite entre 1936 et 1955, et son successeur, la Bambino, construite de 1957 à 1975. Cette dernière a récemment été nommée «voiture la plus sexy» par le magazine britannique Top Gear. La Bambino jouait aussi le rôle de Luigi, le vendeur de pneus, dans le film Bagnoles de Pixar. On l'a aussi appelée la 500 Nuova (nouvelle 500), ce qui signifie que la prochaine Fiat sera en réalité la nouvelle 500.

La Topolino était fort différente, sur le plan mécanique, de la Bambino. La première, à propulsion, avait un moteur à l'avant. La seconde, conçue par Dante Giacosa avec la même habileté dont Sir Alec Issigonis avait fait preuve en créant la Cooper originale. La prochaine 500 sera munie d'une traction avant.

La Mini et la 500 avaient le même tempérament. Visant à peu près le même caractère, la Trepiùno avait été créée avant l'arrivée de M. Stephenson au centre du design de Fiat. Elle s'était nettement inspirée de l'approche évolutionniste adoptée par M. Stephenson dans son design de la Mini. Dans les deux cas, les concepteurs ont tenté d'imaginer à quoi la voiture aurait ressemblé si elle avait poursuivi son développement au fil des décennies, sans interruption.

Des airs d'Italie

Le caractère «italien» de la voiture aura une importance critique pour le succès de la voiture, aux dires de M. Stephenson. Tout le monde aime le design italien, l'art italien, la cuisine italienne, croit-il. Une voiture italienne réussie doit respirer la culture du pays, elle doit être reconnue et aimée immédiatement.

G. Clotaire Rapaille, anthropologue spécialisé en motivation des acheteurs, partage ce point de vue. Il vient de signer un nouveau livre, The Culture Code, qui porte sur les archétypes nationaux, sur les caractéristiques particulières de la vie quotidienne. «Le code culturel de l'Italie, c'est le design, déclare M. Rapaille. C'est d'avoir l'air chic, peu importe ce que vous faites.»

Ancien consultant de Chrysler pour le développement du PT Cruiser, M. Rapaille croit que Fiat a bien fait en lançant un concours de design.

Moderniser une voiture légendaire constitue un grand défi. Moderniser une seconde génération peut être encore plus complexe. Les garde-boue de la New Beetle sont moins bulbeux, et les feux arrière ont changé (si vous pouvez distinguer la nouvelle de l'ancienne quand elle passe à vive allure sur l'autoroute, tant mieux pour vous...). L'élégante Ka de Ford, vendue à l'étranger depuis 10 ans, a peu évolué en dépit des éditions spéciales occasionnelles.

Une nouvelle édition de la Mini Cooper a dévoilée au Salon de l'auto de Paris, à la fin de septembre. Gert Hildebrand, concepteur chef de la Mini, décrit ainsi la philosophie du design: «De l'original à l'original.» Cependant, la nouvelle Mini a été allongée de près de quatre centimètres pour se conformer aux exigences de sécurité des piétons et des moteurs. La calandre est légèrement modifiée et les phares avant ont des lampes secondaires.

Le succès de la Mini ne tient pas seulement à sa carrosserie adorable. La variété d'options - versions sport, peinture bicolore, accents de chrome et options de roues - ont aussi une grande importance. Cette personnalisation explique en grande partie l'attrait de la Mini.

Fiat a la même idée. Chez Ferrari comme chez Fiat, M. Stephenson a cherché de nouveaux matériaux pour personnaliser les intérieurs. Le bois pourrait bientôt être supplanté par le granite ou la nacre, suggère-t-il.

Personnaliser a de l'importance dans la mise à jour d'une voiture classique, poursuit M. Rapaille. Il faut privilégier l'évolution, pas le changement, dit-il. Il n'apprécie pas la façon dont Chrysler a déjà modifié le devant agressif du PT Cruiser.

«Les entreprises devraient simplement faire ce que les gens font tout naturellement avec leur voiture, affirme-t-il. Tout le monde veut une voiture qui soit la sienne, qui dit: c'est moi. Personne ne veut une voiture de Wal-Mart.»

En d'autres mots, laissez le peuple concevoir la voiture du peuple.

Le concours de Fiat a des ambitions mondiales. Les propositions reçues à fiat500.com (site italien et anglais) comprennent des douzaines de mascottes fondées sur différents animaux, un oeuf et le chiffre 5. Les candidatures gagnantes seront exposées au salon du meuble de Milan l'an prochain.

Fiat voudrait bien créer l'équivalent à quatre roues de la mobylette Vespa, symbole universellement reconnu du style italien, vedette du cinéma et de la mode, bon marché, économique à la pompe, urbain et inchangé.

Si la nouvelle 500 s'approche le moindrement de la Vespa, Fiat pourrait être tentée de ressayer le marché américain qu'elle a abandonné il y a deux décennies. Après tout, de dire M. Rapaille, «le code américain pour l'automobile, c'est l'identité».